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Bonjour à tous,
Voici la troisième et dernière partie de La Chevauchée du Pégase.
Bonne lecture,
La Chevauchée du Pégase (Partie 3/3)
La secousse tellurique, d’une durée de deux minutes et seize secondes, marquait une intensité de sept sur l’échelle de Richter. Avec une telle intensité, la terre bouge tellement qu’un homme a des difficultés à se tenir debout et dans la moitié nord de l’île, tous furent précipités avec force sur le sol tandis çà et là, des arbres oscillèrent et, peu après, commencèrent à tomber, créant en certains endroits des obstacles de plusieurs mètres de hauteur difficilement franchissables et en d’autres, y compris dans le sud dans l’île, s’effondrant sur les clôtures, interrompant le courant électrique ou bien pire, créant des brèches. Le Limes résista bien aux assauts des quelques arbres qui lui tombèrent dessus mais son intégrité fut définitivement comprise lorsque deux glissements de terrain, un au niveau des marches septentrionales de la Réserve et l’autre dans les collines à l’est de l’Etreinte, emportèrent des portions entières de l’ouvrage.
Ce qui restait de San Fernandez et du complexe des visiteurs de Jurassic Park se mirent à osciller comme des jouets branlants et une demi-minute après la fin du séisme, les bâtiments en ruines commencèrent à s’écrouler. Tout dégringola à la fois : les murs qui s’effondraient, les plafonds qui s’affaissaient, de gros blocs de pierre ou de béton qui dégringolaient avec fracas dans la jungle.
Même dans le cas où l’I.rex ne se serait pas réveillée lors de son opération et aurait été remise dans son enclos, les événements survenus le même jour lui aurait laissé l’occasion de s’échapper car des pans de la paroi rocheuse du cirque délimitant l’enclos se détachèrent et vinrent s’effondrer sur la plateforme où se trouvait la grue de nourrissage, plateforme qui dégringola dans l’enclos en formant avec les pans effondrés, un éboulis que la chimère aurait pu gravir pour passer outre le haut mur de béton à présent émietté et fissuré suite au tremblement de terre.
A mi-chemin entre la crête d’où ils avaient vus Burroughs et le pont, Zach et Gray sentirent les jambes de Rossinante flageoler sous eux et déconcertée, la jument émit un hennissement à demi-paniqué.
— Oh ! La calma Zach en lui tapotant l’encolure.
Gray lui pointa alors les palmiers oscillants d’un bosquet voisin et de derrière eux, au nord, des mugissements et autres appels paniqués leur parvinrent.
La crainte d’être à nouveau pris dans un troupeau en panique prit les garçons et Zach donna alors un puissant coup de talon dans les reins de leur monture qui se cabra un peu avant de s’élancer à plein galop.
Dans Burroughs, visiteurs, employés et animaux avaient été pris de panique rien qu’en entendant le Sibo gronder au loin ainsi qu’en ressentant la secousse qui les faisait tous chanceler.
Les murs commencèrent à s’émietter et les bâtiments de constitution légère s’effondrèrent en partie, quelques-uns entièrement, puis ce fut au tour de certaines des constructions en pierre ou en béton de commencer à céder face à l’assaut du séisme.
Certains murs cédèrent, s’effondrant avec fracas et emmenant avec eux une partie de la charpente et du toit qu’ils supportaient, piégeant sous les gravats ceux qui n’eurent pas le temps de sortir ou de s’abriter sous un meuble.
Des statues tombèrent des toits ou des parois sur lesquelles elles trônaient, allant se fracasser en mille morceaux en tombant sur le sol, ou pire sur les malheureux qui ne parvinrent pas à s’éloigner à temps de leur zone de chute comme dans le cas de cette touriste dont le hurlement de terreur fut coupé court lorsque la tête décapitée de l’un des giraffatitans de pierre atterrit sur elle, la tuant sur le coup.
L’Administration ne fut pas épargnée non plus car un morceau de l’extrémité du promontoire sur lequel elle reposait se désolidarisa du reste, emportant avec une petite partie du bâtiment dont l’héliport dans une cascade de rochers et de gravats, laissant des ouvertures béantes à la place des pièces qui s’y trouvaient. Par chance, tous ceux qui se trouvaient à ce niveau s’étaient éloignés des bords du promontoire pour gagner plutôt l’atrium et la tour et aucune victime ne fut à déplorer de ce côté.
Au sein de la salle de contrôle, les dégâts furent beaucoup plus limités car on avait pris soin de concevoir la pièce à ce qu’elle résiste aux pires éléments qui soient mais effrayés, certains étaient quand mêmes allés se mettre à couvert sous leurs bureaux en attendant que ça se passe.
— Attention ! Protocole Exodus enclenché. Déclara la voix synthétique d’un ton si calme qu’il en était glaçant. Tous les visiteurs et employés non-habilités sont priés de revenir à Burroughs pour se préparer à une évacuation générale de l’île. Ceci n’est pas un exercice.
La nouvelle fut transmise à tous via les haut-parleurs répartis dans le parc ou par sms aux employés mais la confusion régnant suite au tremblement de terre, la plupart étaient débordés et l’évacuation eut grand peine à s’organiser.
Sur l’un des écrans, on vit sur une carte les navires de la flotte d’InGen naviguant vers l’île amorcer une manœuvre de demi-tour tandis que sur une retransmission de l’écran d’affichage du terminal de Caldera, toutes les traversées figurèrent désormais comme annulées.
Quelques instants plus tard, la radio se mit à crachoter.
— Contrôle ? C’est Alana. Dit la voix d’une guide. Je suis avec un groupe de touristes au sommet d’une colline au nord du comptoir de la jungle. Envoyez-un hélico nous chercher s’il vous plaît. Les gens commencent à vraiment paniquer !
— Combien êtes-vous, Alana ? Lui demanda Cruthers
— Une douzaine.
— Le Pegasus est en mission. Rappela Harriman. On ne peut pas le rappeler.
— Il n’est pas le seul appareil sur l’île. Fit Masrani. Quel est le statut des hélicoptères de tourisme ?
— Etant donné les troubles dans le Nord, les tours ont été annulés et ils sont cloués au sol. Répondit Cruthers.
— Bien. Attribuez un agent de sécurité à chacun des appareils et envoyez-les le plus rapidement possible au Comptoir de la Jungle. Ordonna Masrani.
— Entendu, Monsieur.
Masrani saisit une oreillette et se l’installa.
— Alana ? C’est Monsieur Masrani. Déclara-il. De l’aide est en route.
— Merci infiniment, monsieur.
Distrait par de multiples rapports d’anomalies de confinement un peu partout dans l’île, Harriman ne nota pas immédiatement celui provenant du portail de la trouée au Limes.
Lorsqu’il le vit, le technicien voulut immédiatement s’enquérir de ce qu’il s’agissait étant donné sa proximité avec les alentours du Vieux Centre vers lequel l’I.rex était en cavale. Sur la retransmission des images d’une caméra de surveillance, il vit la chimère, en train de frapper violemment de la tête le même portail par lequel elle avait pénétré dans la réserve plus tôt.
— Nous avons les yeux sur la cible, au portail de la trouée. Informa-il les gardes.
— Entendu. Répondit Laurence.
Le Pegasus prit la direction du portail mentionné et y arriva quelques instants plus tard. Les gardes trouvèrent les battants du portail grands ouverts et partiellement déformés à l’endroit où l’I.rex avait chargé.
En passant au-dessus, l’hélicoptère se trouva face au Mont Sibo et Benedek sortit sa tête de l’habitacle pour regarder le volcan.
— Grands Dieux… Souffla-il.
Le volcan ne grondait plus mais à son sommet, le dôme de lave solidifiée fut comme pris de convulsions et il explosa, libérant un nuage noir et brûlant de tephras et projetant des débris tout autour.
S’ensuivit le staccato des explosions de lave, et le nuage en ébullition rougeoya en son cœur alors que tout autour du volcan, la terre s’ouvrait, et de profonds puits et crevasses jaillirent de la fumée et des vapeurs.
Des bombes volcaniques commencèrent à fendre le ciel, allant s’écraser sur les pentes ainsi qu’au milieu de la Petite Gorgoroth qui allait bientôt devenir pareille à son homonyme de fiction. D’autres projectiles atterrirent eux dans les zones forestières au nord-ouest du Centre thermal et à l’ouest du Colisée de l’I.rex, y allumant des débuts d’incendies.
Une pluie de cendres tombait.
Alors que Laurence contemplait l’éruption avec beaucoup d’appréhension, Holmund aperçut l’Indominus entre le feuillage des arbres, courant dans la jungle.
— A treize heures ! Cria-elle.
Voyant que l’Indominus allait vers le nord, Benedek ne put s’empêcher d’ajouter sur un ton mi dédaigneux mi concerné :
— La sombre conne… Elle va en direction du volcan.
Soudain l’I.rex bifurqua vers le sud-est en direction d’une ligne de crête partant de l’arc nord de l’Etreinte et orientée selon un axe nord-ouest sud-est. De leur position, les gardes pouvaient aisément voir les arceaux d’une volière malgré la brume dans lesquels ils étaient noyés.
— Attends, elle bifurque vers la volière des Quetzal…
Ils virent l’Indominus tourner la tête durant sa course pour leur adresser un puissant rugissement dissuasif.
— Fumons-là ! Rugit le Coréen.
Il chargea le Minigun et commencer à tirer, visant l’Indominus à travers le feuillage épais. Après avoir tiré une première salve, le garde attendit, scrutant la jungle, et quand il vit que l’I.rex courait toujours, il se maudit lui-même et tira une autre salve mais chaque tir manqua sa cible de seulement quelques mètres.
L’I.rex réapparut au niveau d’une petite zone clairsemée en pente douce, traversée en son centre par une piste en terre, menant droit vers un petit cirque d’origine volcanique recouvert par la brume, et dont l’entièreté avait été englobée dans le quart de sphère que constituait la volière des Quetzalcoatlus.
Bien que d’une hauteur de quatre-vingt-onze mètres (près de deux fois moins que la volière de la rivière) et d’une surface de quatre hectares, la volière des Quetzalcoatlus restait malgré tout une structure imposante depuis le niveau du sol et à l’instar de l’autre volière, un maillage étroit s’étendait par-dessus les barreaux de métal arrangés horizontalement vis-à-vis des gigantesques arceaux constituant l’essentiel de la charpente.
A l’endroit où la piste rencontrait les parois de la volière à l’entrée du cirque, il y avait un long sas, emprunté d’ordinaire par les véhicules d’entretien.
L’I.rex s’arrêta juste devant, craignant de se blesser en chargeant le portail extérieur du sas mais surtout quelque peu effrayée par les cris paniqués et stridents des ptérosaures, affolés par l’éruption et abandonnés là à leur sort. Parfois l’un des reptiles volants venait s’agripper brutalement aux parois pour crier vainement avant de repartir aussitôt vers l’intérieur.
Ainsi à découvert et sa route entravée, la chimère représentait désormais une cible facile pour les armes du Pegasus.
— Personne ne tire ! Somma Laurence cependant. Manquerait plus à ce qu’on fasse évader les Quetzal…
— Pegasus. Nous venons de passer le Limes. Leur annonça Brunet. Nous serons bientôt là.
Environ deux minutes s’écoulèrent où l’I.rex et les gardes à bord du Pegasus se regardèrent en chien de faïence. Quand la première marchait nerveusement le long de la volière, tentant de se dérober, le Pegasus la suivait aussitôt et venait se placer au-dessus de sa trajectoire prévue.
Pendant ce temps, alors qu’un panache grand et menaçant s’élevait du Sibo, le ciel devint noir comme en pleine nuit et les premiers éclairs zébrèrent les nuages en ébullition. Il avait plu plus tôt ; la jungle était imprégnée d’humidité, l’air sursaturé de moiteur. Toutes les conditions se trouvaient réunies pour un orage électrique.
Suivant la piste, les marauders finirent par émerger de l’ombre des arbres et s’avancèrent à découvert, ne s’arrêtant qu’à cent mètres de l’Indominus, chacun des véhicules d’un côté de la piste. Tandis que les chauffeurs faisaient gronder les moteurs pour dissuader la chimère d’avancer, des archers vinrent se positionner en lieu et place des servants ainsi qu’à côté des marauders. Ils mirent en joue l’I.rex et commandant ces derniers, Darbinian s’apprêtaient à donner l’ordre de tirer. Dans le même marauder qu’elle, Brunet, installé à l’avant, avait le regard braqué sur l’I.rex.
— Feu ! Ordonna-il.
Darbinian relaya l’ordre et les arcs chantèrent mais au moment où les flèches allaient marquer leur cible, l’I.rex s’aplatit soudainement au sol et tourna la tête en direction de la volière, de manière à protéger sa tête et ses points faibles des tirs. Les flèches vinrent hérisser son dos mais ce ne fut pas pour autant qu’elles s’enfoncèrent suffisamment, empêchant le venin de pénétrer son organisme.
— Tu veux jouer à ce jeu-là ? Dit Brunet. Alors on va jouer…
Il saisit la radio pour communiquer un ordre au Pegasus et juste après, le lance-harpons tira et un trait de près d’un mètre de long vint s’enfoncer dans l’épaule de la chimère, lui soulevant un cri de douleur.
— Celle-là était pour Katashi ! Lança Laurence avec hargne.
Voulant éviter de recevoir un autre trait, l’I.rex se remit en mouvement mais acculée et blessée, elle commença à haleter de panique en regardant avec effroi l’hélicoptère.
— Ah ! T’es baisée, hein ?! T’es baisée ! La railla Sunsin. Et au fait, t’as perdu ta langue ? Ajouta-il en notant que cette dernière avait été coupée.
Tandis qu’on rechargeait le lance-harpons, l’Indominus essuya une seconde volée de flèches et une fois encore, elle s’aplatit et laissa les flèches se ficher dans sa peau dure, dans le cas où elles ne se contentaient pas de juste ricocher contre.
Les archers encochèrent alors une troisième flèche mais soudain, avant que le Pegasus ne puisse tirer, l’I.rex se releva et s’élança furieusement dans leur direction.
En un peu plus de trois secondes, elle couvrit la moitié de la distance la séparant des véhicules mais avant que les archers pris au dépourvu ne s’apprêtent à appuyer sur la détente des canons, elle braqua violemment à la surprise de tous et fit demi-tour, fonçant droit vers le sas.
Bénéficiant de la force accumulée lors sa lancée, l’I.rex chargea tête en avant et enfonça le portail externe sans peine avant de disparaître dans le brouillard, au grand dam des gardes qui regardèrent d’un air horrifié le sas désormais enfoncé.
On entendit l’Indominus forcer son passage à travers le portail interne, puis les cris paniqués et stridents des habitants de la volière redoublèrent d’intensité, cris auxquels l’I.rex répondit par un long rugissement.
Quelques secondes plus tard, douze grandes créatures sortirent par le sas en galopant avec une aisance des plus déconcertantes en raison de leur apparence singulière et de leur nature.
Hauts comme des girafes et d’une envergure proche des douze mètres, les Quetzalcoatlus étaient les plus grands ptérosaures ayant jamais existé ainsi que parmi les derniers à écumer les cieux du Crétacé, comme si dans un dernier éclat, cet ordre de reptiles volants avait cherché à repousser les limites de la biomécanique en donnant naissance au plus grand animal volant jamais découvert.
En vérité, comme les paléontologues l’avaient théorisé depuis quelques années et comme les équipes de Jurassic World l’avaient découvert, les Quetzalcoatlus passaient la majeure partie de leur temps sur le sol. Durant les derniers jours du Crétacé, le Quetzalcoatlus devait se comporter comme une cigogne, arpentant les plaines de la Laramidie et attrapant dans son bec toute proie passant à portée, incluant des dinosaures juvéniles ainsi que tout animal pouvant être englouti, et ainsi, ceux hébergés dans la volière voyaient naturellement en les humains des proies potentielles. Ceux-ci étaient effrayés par les Quetzalcoatlus, terrifiés par leur allure et horrifiés par leur comportement en général.
Leur long bec pointu, blanc comme la chaux, terminait un crâne rouge maculé de noir autour des yeux et surmonté d’une crête en forme de lame de hache. Le cou était long, rosâtre et aussi nu et ridé que celui des vautours et des marabouts tandis que le col était blanc et les ailes gris anthracite. Tout cela leur conférait une allure sinistre et repoussante de créatures vomies par les enfers, et ceci combiné au modus operandi de leurs attaques poussaient bon nombre à les comparer aux montures ailées des spectres de l’anneau de la trilogie du Seigneur des Anneaux, dénommées Faucons de l’Enfer, et partant de ce surnom évocateur, les Quetzalcoatlus avait été surnommés Cigognes de l’Enfer en plus de celui, plus rare, de Cigogne d’Hadès.
Etant donné leur dangerosité, le nettoyage de la volière n’était pas effectué par les soigneurs mais par les gardes qui, revêtus d’armures spéciales aspergées d’ammoniaque, éloignaient les ptérosaures à l’aide d’un appareil à ultrason tandis que quelque uns lavaient le sol à la lance à incendie. C’étaient l’une des missions qu’ils appréhendaient le plus car en vérité, les Quetzalcoatlus n’étaient ni les seuls occupants de la volière, ni les plus nombreux.
A la suite des douze Quetzalcoatlus qui prirent leur envol juste devant les marauders, émergea une nuée d’une cinquantaine de ptérosaures plus petits, d’une envergure de deux mètres cinquante chez les adultes, à la face noire et au corps recouvert d’un manteau de pycnofibres jaunes verdâtres ponctué de nombreuses taches noires.
Il s’agissait d’Harpactognathus gentryii, un prédateur aérien de la fin du Jurassique aussi à l’aise au-dessus des plaines que sous les frondaisons des forêts et vivant en colonies. Là où la livrée de cette espèce évoquait celle du léopard, avec lequel l’Harpactognathus avait pour autre point commun le fait de grimper aux arbres avec beaucoup d’aisance, son comportement lui évoquait celui de cet autre mammifère prédateur africain qu’est le lycaon car tout comme ce dernier, Harpactognathus était une espèce très sociale et attaquait en meutes, appelées formations, pouvant poursuivre leurs proies sur de grandes distances aussi bien en les harcelant depuis les airs qu’en courant sur le sol selon la situation.
Avec sa constitution et ses mâchoires robustes, ses grandes dents exsangues en forme d’épines, sa crête osseuse recouverte de tissus mous courant sur toute la longueur du crâne jusqu’à l’extrémité de la mâchoire et sa longue queue allongée terminée par un gouvernail en forme de losange, Harpactognathus gentryii était la chose se rapprochant le plus de l’incarnation même du ptérosaure tel que représenté dans l’imagerie populaire.
Lors de la Curée, cette animation de nourrissage ayant lieu dans la volière où les visiteurs regardaient une ou plusieurs vaches êtres dévorées par les ptérosaures, les Quetzalcoatlus arrivaient les premiers sur la carcasse pour déchirer la peau et arracher de grands lambeaux de chair. Ensuite, lorsqu’ils avaient finis, les Harpactognathus se jetaient sur les restes, nettoyant la carcasse jusqu’à ce qu’il ne reste quelques morceaux de chair épars attachés sur les os. Ainsi, de par leurs stratégies d’alimentation différentes, les deux espèces n’entraient pas en compétition et se toléraient l’une l’autre, et ce malgré le comportement irascible des premiers.
Voyant les ptérosaures voler en direction du Pegasus, Laurence se déporta hors de leur trajectoire tandis que dans l’habitacle, ses compagnons avaient braqué le Minigun et le lance-harpons vers la nuée et étaient prêts à faire feu s’ils recevaient l’ordre.
Mais désirant avant tout de fuir l’Indominus et l’éruption, les ptérosaures ignorèrent l’appareil et passèrent juste à côté, prenant la direction du sud.
L’évasion des ptérosaures était un spectacle à la fois envoûtant et épouvantable auxquels les techniciens assistèrent impuissants. Tandis que Krill signalait d’une voix paniquée cette brèche de confinement à tous les employés, Harriman en alertait les gardes.
Sachant ce qui était la meilleure chose à faire, ou du moins la plus pragmatique, Hoskins se retourna brièvement en direction de Masrani comme pour s’assurer de son approbation vis-à-vis de l’ordre qu’il s’apprêtait à donner mais l’Indien avait disparu depuis le début de l’éruption.
— Lieutenant Laurence ! Aboya-il sans perdre un instant de plus. Ne laissez pas ces ptérosaures s’échapper ! Abattez-les ! Personne ne veut d’un autre Horseshoe Bay.
Les craintes d’Hoskins étaient justifiées. Il avait vu les ravages que pouvaient faire trois ptéranodons alors douze Quetzalcoatlus, des animaux plus grands et plus vicieux, cela relevait du désastre. De son point de vue, il s’agissait même d’une situation pire que celle de l’évasion de l’Indominus car des études anatomiques avaient montré que malgré leur mode de vie majoritairement terrestre, les Quetzalcoatlus pouvaient couvrir de grandes distances durant leur vol, se comptant en centaines voire milliers de kilomètres, soit autant que bon nombre d’oiseaux migrateurs dont certains étaient capables de rallier deux points opposés du globe.
On avait estimé que des individus échappés de Nublar pouvaient atteindre Carthagène des Indes en à peine quelques jours et il existait même la crainte que quelques individus ne tentent la traversée des Caraïbes puis de l’Atlantique, pouvant gagner l’Afrique de l’Ouest et même les côtes occidentales de l’Europe si les conditions étaient favorables.
De leur côté, les Harpactognathus n’étaient par contre pas adaptés pour les vols longs et ainsi beaucoup doutaient qu’ils ne parviennent à franchir ne serait-ce que les cent trente kilomètres d’océan séparant Isla Nublar de la péninsule de Nicoya, voir même qu’ils n’osent s’aventurer au-dessus. Mais en restant confinée sur l’île, leur nuée aux airs de fléau représentait une grande menace pour tout animal n’étant pas suffisamment gros pour décourager les Harpactognathus de l’attaquer, surtout qu’ils devaient avoir très faim, n’ayant pas été nourrit de la journée. S’ils atteignaient Burroughs…
Les marauders quittèrent les abords de la volière et firent demi-tour vers le sud, tentant de suivre les ptérosaures tandis que le Pegasus s’était détourné de la volière pour faire de même. Laurence hésita brièvement quant au fait de faire feu ou non.
— Hoskins a raison. Finit-elle par dire. Nous devons les empêcher de partir. Notre ordre a été fondé pour retenir ces créatures dans ces îles.
— N’engage pas le combat, Erin ! Hurla Darbinian dans la radio. Ils se jetteraient sur vous aussitôt et vous êtes en infériorité numérique !
— Ce que vous dîtes n’a rien d’impertinent Darbinian mais on ne peut pas rester les bras croisés et les regarder voler au loin ! Intervint Brunet.
Laurence jeta un bref regard à une photo glissée sous l’un des panneaux du tableau de bord, la montrant elle et ses fils à un festival de musique métal, puis se tourna vers ses collègues dans l’habitacle qui lui adressèrent un signe de tête approbateur d’un air résolu.
— Pas le temps de tergiverser ! Autant en abattre le plus possible.
Elle fixa la nuée d’un air décidé puis inspira.
— Feu à volonté ! Commanda-elle dans son expiration et en choisissant la chanson d’un groupe de death métal mélodique suédois dans la playlist de son ipod.
Au son de la musique dans les enceintes, le Minigun et le lance-harpons tirèrent de concert et plusieurs des ptérosaures, dont l’un des Quetzalcoatlus, se mirent à dériver en plein vol avant de plonger vers le sol, les ailes trouées ou le corps criblé de projectiles.
— Erin ! Hurla Darbinian.
Là où les Harpactognathus étaient allés immédiatement se mettre à couvert sous la canopée en se dispersant, les Quetzalcoatlus, entre-autres énervés par la musique, se retournèrent pour fondre sur le Pegasus.
Dans le Marauder de Brunet, on passa au Français une tablette sur laquelle défilaient les images des caméras embarquées du Pegasus. Il vit les ptérosaures se rapprocher dangereusement de l’hélicoptère, s’apprêtant à l’encercler.
— Sortez de ce merdier ! Hurla-il à la pilote.
Mais Laurence tint sa position et les Quetzalcoatlus étant capables d’effectuer des pointes de vitesse d’environ cent quatre-vingt kilomètres par heure, ils furent sur le Pegasus en un rien de temps.
Ils commencèrent par venir heurter l’hélicoptère et tenter de s’accrocher dessus, secouant l’appareil, donnant des coups de becs vers l’habitacle tout en évitant de se rapprocher trop près des pales.
Dans leurs heurts, ils firent perdre l’équilibre à Sunsin qui s’agrippa de justesse au marche-pied mais un Quetzalcoatlus apparut soudainement de sa gauche pour refermer son bec sur le Coréen et l’emporter au loin.
— Remonte ! Remonte ! Cria Benedek à Laurence.
Tandis que certains des Quetzalcoatlus se disputaient le corps de Sunsin, le Pegasus remonta et gagna rapidement de l’altitude, se rapprochant du nuage noir où l’orage électrique frappait dans des explosions lumineuses aveuglantes, d’un blanc bleuâtre. Des éclairs crépitaient tout autour comme des gouttes de pluie et le fracas de la foudre ne se manifestait pas de façon ponctuelle mais continue, comme le grondement d’une cascade.
Les gardes crurent que les ptérosaures n’allaient pas oser venir les attaquer si près du nuage mais gagnés par la frénésie, les Quetzalcoatlus les poursuivirent quand même et le combat se déplaça jusqu’au-dessus de l’arc nord de l’Etreinte.
Benedek s’installa alors au Minigun et tira sur le ptérosaure le plus proche qui fut pris de soubresauts lorsque les balles le trouèrent. Holmund cria dans son dos et le Hongrois hasarda un bref regard par-dessus son épaule.
Un Quetzalcoatlus avait introduit son bec dans l’habitacle et transpercé la Suédoise de part en part au niveau de la poitrine alors qu’elle tenait un harpon en main. Le ptérosaure retira brusquement son bec de l’habitacle et précipita le corps d’Holmund dans le vide.
Ne voulant pas subir le même sort, Benedek s’éloigna le plus possible de l’extérieur, le forçant à abandonner les armes lourdes, et se mit dos au cockpit pour y dégainer son pistolet et attendre le prochain assaut.
Ce dernier vint en un éclair et le Hongrois eut seulement le temps de tireur deux coups qu’il fut tiré par le pied hors du Pegasus pour être emporté au loin.
Les Quetzacoatlus venant d’avoir raison de ses collègues, Laurence commença à paniquer parce qu’il n’y avait plus personne pour manier le Minigun ou le lance-harpons, laissant l’appareil totalement vulnérable face aux attaques des Cigognes de l’Enfer. Alors que les ptérosaures tournaient autour de l'appareil et criaient sur ce dernier, la pilote entama une manœuvre de repli mais soudain, elle se retrouva face à l’un des Quetzalcoatlus et les petits yeux blanchâtres de celui-ci vinrent la fixer.
Le bec du ptérosaure transperça soudain le pare-brise et sa pointe s’enfonça dans l’abdomen de la pilote et y remua un peu, atteignant et déchirant plusieurs de ses organes internes.
Le bec se retira de l’intérieur du cockpit et sous le choc de la douleur, Laurence lâcha les commandes et porta une main sur son ventre, regardant avec horreur le sang se déverser en abondance de la blessure. L’appareil plongea et le Quetzalcoatlus eut à peine le temps de réagir que les pales vinrent trancher son cou, éclabousser le pare-brise de sang, et la tête décapitée bondit dans l’air un instant avant de retomber puis d’être mise en charpie par les mouvements du rotor.
Laurence ne se rendit pas compte tout de suite que le Pegasus avait amorcé une chute inexorable vers les collines vertes de la vallée en dessous car le sang sur le pare-brise gênait grandement sa vision tandis que les sirènes affolées des voyants troublaient sa concentration.
Cela fatigua considérablement ses sens et Laurence perdit conscience alors que son sang avait déjà tâché de rouge ses genoux et le siège dessous.
L’hélicoptère percuta le sol avec violence, puis rebondit et alla s’écraser sur plusieurs dizaines de mètres en laissant des fragments derrière avant de s’embraser. La musique s’était tue au moment de l’impact.
La destruction du Pegasus et la mort de Laurence et des trois autres gardes présents à bord de l’appareil accabla profondément leurs collègues déjà désemparés par l’évasion des ptérosaures. Ce dernier événement, combiné à l’éruption du Sibo et au séisme dévastateur qui avait frappé l’île, avait l’air pour certains d’un funeste présage annonciateur de fin du monde.
— A Burroughs ! Ordonna Brunet alors qu’il reprenait ses esprits.
Les marauders dépassèrent les Harpactognathus et une fois hors de la jungle, les conducteurs engrangèrent la cinquième vitesse et foncèrent vers le sud à travers les champs.
Masrani et quelques autres se tenaient au bord de l’Œil, le regard empli de crainte tourné vers le nord alors que la confusion et la panique régnait dans la vallée de Burroughs. Du zoo, les animaux avaient entonné un concert de beuglements, rugissements et autres jappements, tous inquiétés par l’éruption, tandis qu’au niveau de l’Avenue Richard Owen, les visiteurs sortaient en masse des bâtiments pour se regrouper au centre de l’Avenue et sur la Place de l’Obélisque où des soigneurs accourraient aider les cochers qui peinaient à maîtriser leurs attelages de mantellisaures. Çà et là dans la Cité, des petits incendies s’étaient déclarés principalement suite à des ruptures dans les conduites de gaz et la sécurité avait envoyé des équipes les maîtriser et secourir ceux qui s’étaient retrouvés piégés suite au séisme.
Aussi bien au niveau de l’Œil que depuis toute fenêtre, balcon, toit ou terrasse donnant vers le Mont Sibo, tous ne pouvaient pas s’empêcher de regarder impuissants le sommet de la montagne rougeoyer et le ciel du septentrion s’obscurcir et s’embraser d’une multitude d’éclairs alors que le panache volcanique ne faisait que grossir et s’élever de plus en plus haut.
Venant de passer l’arc montagneux sud de l’Etreinte, les Quetzalcoatlus virent les champs centraux apparaître sous et devant eux.
De sa vue perçante, l’individu de tête repéra quelque chose de particulier au loin à des kilomètres au sud.
Au-delà d’une rivière, il y avait une grande vallée luxuriante, délimitée à l’ouest par les rebords d’un grand plateau et à l’est par des collines bordant l’océan. Au centre de la vallée, il y avait un grand plan d’eau et ça aurait été un lieu de refuge idyllique si sur les bords de cette étendue ne s’étendaient pas des formations à l’allure rocheuse étranges que le ptérosaure vit qu’elles n’avaient rien de naturel. Plus à l’ouest, il aperçut au milieu des champs des dizaines et des dizaines d’herbivores formant une longue colonne se dirigeant vers un grand lac situé en avant des rebords d’un plateau.
Face à la colère de la montagne de feu et la Grand’Peur qui sévissait dans le Nord, dinosaures et autres animaux fuyaient vers le sud, cherchant à aller se réfugier au-delà du Long Lac et de la rivière, parmi les vallées protégées à l’ombre du Plateau Méridional ainsi que dans les hautes terres à son sommet. Or ce faisant, ils se rapprochaient dangereusement du Monde des Hommes et ces derniers n’allaient pas laisser leurs terres être envahies par un afflux massif de créatures réfugiées.
La plupart de leurs demeures avaient été établies dans la même vallée que les Quetzalcoatlus convoitaient désormais. L’affrontement était inévitable.
Par un cri, le Quetzalcoatlus de tête exhorta ses congénères à le suivre et en un ouragan d’ailes, ils s’élancèrent en direction du sud, vers Burroughs, alors que les hélicoptères de tourisme venaient d’atteindre la volière de la rivière, à moins d’un kilomètre et demi de la position des grands ptérosaures.
Pendant ce temps, l’ombre tombait sur Isla Nublar.
FIN DE LA CHEVAUCHÉE DU PÉGASE ET DE L'ACTE II : L'OMBRE DE NUBLAR
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
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La vache, cette tension...
Y a trop de choses en même temps c'est fou !
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Je suis en train de lire Festins d'Urubus enfin, la fin du chapitre et ce qui est bien c'est que Wu explique pourquoi la composition complète du génome de l'I.rex est confidentielle.
Ça se tient là où dans le film on se contente d'un "c'est confidentiel" sans réaction de Masrani, ni aucune explication plausible.
Bien vu l'idée de la surprise totale du camouflage qui pourrait venir d'une espèce de dino. Je dit carnotaure à toit hasard
"Dans d'autres siècles, les êtres humains voulaient êtres sauvés, ou améliorés, ou libérés, ou éduqués. Mais dans le nôtre, ils veulent êtres divertis. La grande peur de notre siècle n'est pas la maladie ou la mort, mais l'ennui. Un sentiment de temps libre entre nos mains. Un sentiment de ne rien faire. Le sentiment de ne pas être divertis."
Michael Crichton
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Bonsoir à tous,
J'ai le plaisir de vous annoncer que le PDF comprenant la version 1.0 des Actes I et II est enfin prête (330 pages au total).
Pour y accéder, suivez le lien suivant :
https://drive.google.com/file/d/1wWvJNF … sp=sharing
Concernant la carte croquis, je l'avais commencée il y a deux semaines mais ne l'ayant pas continué depuis au profit de la publication du dernier chapitre et de la mise en forme du PDF cité haut, je vais à nouveau m'y atteler prochainement.
Je profite également de ce post pour vous informer que je mets en pause l'écriture de cette fic et qu'à partir de fin mai jusqu'à début septembre, je risques fort de ne pas montrer de signes de vie car je serais partit pour trois mois de stage dans un endroit où j'aurais très difficilement accès à internet.
Cependant, je continuerais de travailler sur ma fic pendant une partie de mon temps libre là-bas et je vous redirais alors de ce qu'il en est une fois que je serais rentré.
Donc normalement, rendez-vous en automne pour le début de l'Acte III.
Au passage, voici le nom des chapitres de ce dernier ainsi que de l'épilogue :
Chapitre XII : Assaut sur Burroughs
Chapitre XIII : Le Conseil
Chapitre XIV : La Montagne Hantée
Chapitre XV : Le Temps des Loups
Chapitre XVI : Le Crépuscule des Dieux
Chapitre XVII : Le Choc des Reines
Chapitre XVIII : Rien ne sera oublié
Epilogue : L'Ombre qui s'étend
Le Journal des Changements pour les chapitres de l'Acte II figurera dans un très prochain post mais d'ici là, je vous souhaite une bonne soirée.
A bientôt.
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Bonsoir à tous,
Comme promis dans mon précédent post, voici le Journal des changements des chapitres de l'Acte II :
Le Calme avant la Tempête
- Appel de Cruthers figurant originellement à la fin d'Un Réveil de Dragon déplacé au tout début de ce chapitre.
- Quelques modifications effectuées dans le look de la Caserne de la Garde. Plus de détails sont aussi donnés.
- Ajout d'un passage entier dédié au background de la ville en ruine de San Fernandez.
- Suppression de quelques répliques humoristiques jugées après-coup un peu "gratuites".
- Les gardes ressentent une secousse alors qu'ils quittent La Colère de la Mère.
- Changement de coloris pour l'Ornitholestes.
- Mention de la couleur des styracosaures.
De Charybde en Scylla (ex Bataille sur le Plateau)
- Le passage du camion devant l'enclos des métriacanthosaures est déplacé au début de ce chapitre.
- Ajout d'un dimorphisme sexuel chez cette espèce. Là où les femelles ont la même couleur que sur l'artwork de Julius Csotonyi (celui figurant sur le site JW), les mâles ont une robe pareille à celle d'un des variants de JW : Evolution.
- Description partielle du physique de l'I.rex pendant l'attaque du camion (voir post avec dessin).
- Des Gallimimus ont été ajoutés au troupeau en débandade. L'un d'eux bousculera un garde monté.
- Ajout d'un sac gonflable au-dessus du mufle des shantungosaures qui s'en servent pour amplifier les sons produits.
Sur les Traces
- Déplacement du passage avec Spectre, la dryosaure leucistique, juste après la discussion entre Drekanson et Durant à propos de l'origine de la dague d'Hamada.
- Quelques modifications et ajouts dans la scène où Dearing et Grady trouvent les deux squelettes dans la grotte.
- Le nom (Le Poing du Géant) et la nature (Un dyke) du grand rocher d'où ils contemplent l'intérieur de l'île est donné.
- Cruthers mentionne que les capteurs ne couvrent pas les berges de La Bruyante et la Combe.
- A la fin du chapitre, Masrani ordonne une mise en quarantaine de tout ce qui se trouve à moins d'une demi-douzaine de kilomètres du Sibo.
Un Festin pour les Urubus
- Le nombre de mercenaires présents aux abords de la crique passe de douze à neuf.
- L'échange entre le jeune mercenaire et sa collègue après la fuite de Zach et Gray a été supprimé.
Et sinon, voici une carte de l'île mise à jour :
Légendes
Occupation du sol
Bleu foncé : Eau salée (Océan, Estuaires, Bras de mers et Lagon(s))
Bleu clair : Cours d'eau principaux
Vert foncé : Forêts
Vert clair : Milieux ouverts
Gris Foncé : Champs de lave
Jaune : Plages
Marron : Rocailleux (Montagnes et Falaises)
Infrastructures :
Carré noir : Hub important (contient une station de monorail)
Cercle noir : Station de monorail
Traits gris : Monorail
Traits orange : Téléphérique
Traits noir : Clôture périphérique de la Réserve.
Numéros rouges : Lieux interdits d'accès au public (sauf exceptions)
1 : Centrale géothermique
2 : Enclos de quarantaine
3 : Enclos des achillobators
4 : Village des Employés (à ne pas confondre avec les deux Quartiers des Employés de Burroughs)
5 : Caserne de la Garde Grise
6 : Docks de l'Est
7 : Héliport de la cascade
Numéros noirs : Installations touristiques
1 : Terminal d'arrivée des ferrys et Marina
2 : Grande Porte et Place Hammond
3 : Station de Monorail du Promontoire (sous l'Administration)
4 : Quai de la Croisière de la Jungle
5 : Volière de la rivière
6 : Station du Col Venteux. Tour panoramique et Montagne Russe La Guerre des Os
7 : Station du Bivouac.
8 : Colisée de l'I.rex
9 : Volière des Quetzalcoatlus et belvédère
10 : Complexe hôtelier des sources chaudes.
Et rassures-toi Jurassic One, celle de Burroughs et de ses alentours est toujours prévue.
Passez une bonne soirée,
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Bonsoir à tous,
J'ai le plaisir ce soir de vous dévoiler une version non-définitive (il reste un certain nombre de détails à ajouter au niveau des zones en blanc) de la carte tant attendue de la Cité et de ses environs.
La voici :
Légendes
Occupation du sol
Vert clair : Prairies, gazons ou jardins à végétation basse.
Vert : Espaces verts densément végétalisés dont jardins denses.
Vert foncé : Jungle
Bleu turquoise clair : Plans d'eau artificiels peu profonds
Bleu turquoise : Eau douce
Bleu indigo : Eau salée
Jaune : Plages
Marron : Rocailleux (Montagnes, falaises ou gros rochers)
Violet : Barrières récifales
Orange : Routes
Gris clair : Voies pédestres
Traits noir épais : Clôtures et murs
Traits gris foncé : Monorail
M lavandes : Station de Monorail
M rouges : Station de Métro
Numéros rouges :
1 : Terminal des ferrys
2 : Grande Porte, Place Hammond et Belvédère
3 : Promenade
4 : Avenue Richard Owen
5 : Place de l'Obélisque
6 : Centre de la Découverte (contient l'OMNIMAX dans son aile sud-est)
7 : Bâtiment administratif (contient aussi le Restaurant Panoramique)
Numéros oranges : Hotels
1 : Hotel des Cascades
2 : Bungalows sur pilotis
3 : Palais de la Vallée Perdue
4 : Le Récif (sous-marin)
5 : Grand Nublarian (La boîte de nuit Le Chicxulub, le Multiplexe cinématographique Harryhausen et le Casino se situent juste sous cet hôtel et les jardins le long de la façade nord-ouest)
NB : Présence d'établissements de plus petite taille,d'auberges et d'appartements à louer au niveau de la Promenade, de l'Avenue Richard Owen et des deux quartiers résidentiels.
Numéros noirs :
1 : Gradins du Spectacle Nocturne
2 : Royaume du Tyrannosaure
3 : Lagon du Mosasaure
4 : Lagon L'Aquarium de l'Enfer (Pensionnaires : Petits mosasaures et requins)
5 : Lagon La Voie Maritime Intérieure de l'Ouest (Pensionnaires principaux : Elasmosaures, Archelons, divers poissons de grande taille)
6 : Mont Thétis (contient la station des sous-marins)
7 : Anse des Dolichorhynchops
8 : Lagon Mer d'Oxford (Pensionnaires : Ophthalmosaures et Cryptoclidus principalement)
9 : Lagon Jurassique supplémentaire (peut être divisé en plusieurs parties)
10 : Lagon du Trias (Pensionnaires : Ichtyosaures primitifs, Tanystropheus, autres reptiles marins de cette époque)
Si vous avez des remarques ou des questions n'hésitez pas à en faire part et sinon je vous souhaite une bonne soirée.
Dernière modification par The Geeky Zoologist (13-05-2018 16:56:59)
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
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Wouah !
Magnifique, tout simplement magnifique...
Je n'imagine pas la patience et le temps qu'il t'as fallu pour réaliser cette carte.
Je suis impressionné. Je ne pensais pas que Burroughs pouvait être un endroit aussi énorme et qui a l'air d'être vachement plus cool que La Cité que l'on peut voir dans le film. En voyant la carte et sa légende je suis resté sans voix.
Il y a tellement de choses, de bâtiments, d'espaces verts...sincèrement je ne m'attendais pas du tout à ça !
Bien qu'elle ne soit pas définitive elle est incroyable, vraiment je n'en reviens pas.
Maintenant, place à mes interrogations :
-Ça peut paraître un peu con mais, je ne me souviens plus ce que sont les Quartiers résidentiels et à quoi ils ressemblent, si tu pouvais m'éclairer ça serait sympa !
-Le Gran Nublarian n'est pas censé être sur une colline ?
-Quelle est cette surface blanche où il y a marqué "Océanarium" et "Parc Aquatique" ?
-A quoi ressemble les Bungalows sur pilotis ? Aux Safari Lodges de JP ?
-Je ne me souviens plus en quoi consiste le Spectacle Nocturne.
Voilà toutes les questions qui me viennent à l'esprit pour le moment.
Pour résumé, c'est du super boulot. Bravo pour tes efforts. Cette carte est plus belle que je ne l'imaginais.
PS: désolé pour ce long message mais je voulais t'exprimer mes sentiments après avoir découvert cette carte.
Merci encore et bonne soirée à toi !
Dernière modification par JurassicOne (13-05-2018 17:57:07)
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Merci beaucoup pour tes compliments, Jurassic One.
J'ai en effet passé pas mal d'heures sur cette carte car avant de faire le coloriage sur Paint, il a fallut que je dessine d'abord ses contours au criterium en essayant de respecter au maximum les surfaces occupées par telle ou telle entité pour plus de réalisme.
A l'état actuel, elle est loin d'être exhaustive car il manque les différents enclos et constructions du Zoo et de l'Oceanarium, les rues et les bâtiments des Quartiers résidentiels ainsi que les piscines du Parc Aquatique.
Wouah !
Maintenant, place à mes interrogations :
-Ça peut paraître un peu con mais, je ne me souviens plus ce que sont les Quartiers résidentiels et à quoi ils ressemblent, si tu pouvais m'éclairer ça serait sympa !Les Quartiers résidentiels sont ce que j'appelais par abus de langage Quartier des employés. On y trouve les domiciles des employés, des commerces et services principalement destinés à ces derniers ainsi que quelques auberges et autres petits établissement hôteliers pour les touristes. Quant au look général de ces dits quartiers, imagines-toi quelque chose de ressemblant aux vieux quartiers datant de l'époque coloniale aux Caraïbes et en Amérique Latine.
-Le Gran Nublarian n'est pas censé être sur une colline ?
Si en effet mais là où les reliefs les plus abrupts sont représentes sur cette carte, je n'ai pas trouvé de moyen pour représenter les collines et les pentes douces.
-Quelle est cette surface blanche où il y a marqué "Océanarium" et "Parc Aquatique" ?
C'est la surface occupée par ces deux zones (hors lagon du moins car l'Océanarium inclut aussi ce dernier). Bien qu'étant deux entités distinctes, leurs limites ne sont pas si définies que ça puisque par exemple des toboggans "plongent" dans certains des bassins et ceux qui les empruntent se retrouvent alors dans un tunnel vitré d'où ils peuvent observer les animaux marins nageant autour d'eux.
-A quoi ressemble les Bungalows sur pilotis ? Aux Safari Lodges de JP ?
Non. Ils sont inspirés de ces bungalows construits au-dessus de l'eau que l'on peut trouver dans de nombreux resorts côtiers de par le monde, comme à Bora Bora par exemple.
-Je ne me souviens plus en quoi consiste le Spectacle Nocturne.
C'est le spectacle son et lumière qui se déroule en arrière-plan pendant la discussion entre Owen et Claire dans le chapitre L'Iguanodon Éméché. Il est inspiré de celui du Futuroscope ou des parcs Disney.
PS: désolé pour ce long message mais je voulais t'exprimer mes sentiments après avoir découvert cette carte.
Merci encore et bonne soirée à toi !
T'inquiètes ! Les longs messages ne me dérangent pas du tout, bien au contraire, du moment qu'il y a des choses pertinentes dedans. Et merci à toi pour prendre le temps d'une part de consulter mon travail, et d'autre part de faire état de tes commentaires et remarques.
Bonne soirée.
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Cool ! Merci beaucoup pour tes réponses !
Une autre remarque que j'aimerais partager, c'est le petit jeu que j'envisage de jouer pendant ma lecture de ta fic : hormis les personnages présents également dans le film que j'imagine semblable physiquement dans la fic, pour les personnages inventées (surtout les membres de la Garde Grise) je compte les représenter graphiquement en me servant des éléments de descriptions parsemés tout au long du récit. Ça peut paraître bizarre mais je trouve ça intéressant.
Aussi, avant de te les poser, je voudrais te demander si je peux te poser quelques questions "techniques" en lien avec La Cité telle quelle est dans ton récit.
Dernière modification par JurassicOne (14-05-2018 18:04:34)
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Une autre remarque que j'aimerais partager, c'est le petit jeu que j'envisage de jouer pendant ma lecture de ta fic : hormis les personnages présents également dans le film que j'imagine semblable physiquement dans la fic, pour les personnages inventées (surtout les membres de la Garde Grise) je compte les représenter graphiquement en me servant des éléments de descriptions parsemés tout au long du récit. Ça peut paraître bizarre mais je trouve ça intéressant.
Fort intéressant. Chercher à se représenter de manière graphique ou autre les personnages et autres éléments du récit n'a rien de bizarre, bien au contraire.
Sachant que je me suis basé sur des acteurs existants pour décrire une bonne partie de mes personnages inédits, je peux volontiers poster un petit fan-cast si ça peut aider toi et les autres lecteurs à mettre un visage à mes personnages.
Aussi, avant de te les poser, je voudrais te demander si je peux te poser quelques questions "techniques" en lien avec La Cité telle quelle est dans ton récit.
Bien sûr, aucun problème. Je répondrais à ces questions du mieux que je pourrais mais avec plaisir.
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Des acteurs ? Lequels ? Ah merde, c'est plus du jeu si je demande ça...
Genre, un exemple parmi tant d'autres. le personnage du Lieutenant Gilbert Brunet, je me le représente comme un homme grand, un peu baraqué, un visage rond, des cheveux gris foncé et une moustache de la même couleur. Je l'ai choisi lui car dans ta fic c'est mon personnage préféré (peut-être parce que c'est un compatriote ?). J'aime son caractère ! Il me ressemble un peu.
Je sais pas pourquoi mais j'imagine toujours tous les membres de la Garde habillés avec l'uniforme comme il est décrit dans la fic, ok. Mais je les vois tous avec une casquette de la même couleur à la place du casque et la caméra placée sur le plastron.
Mais oui pourquoi pas un petit fan-cast, ça serait sympa.
Pour ce qui est des questions techniques, tu veux qu'on en parles ici ou dans mon bungalow...
Je deconne !
Plus sérieusement, tu préfèrerais en parler par mail ?
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Genre, un exemple parmi tant d'autres. le personnage du Lieutenant Gilbert Brunet, je me le représente comme un homme grand, un peu baraqué, un visage rond, des cheveux gris foncé et une moustache de la même couleur. Je l'ai choisi lui car dans ta fic c'est mon personnage préféré (peut-être parce que c'est un compatriote ?). J'aime son caractère ! Il me ressemble un peu.
Content que notre ami comtois te plaise.
Je peux déjà t'annoncer que le personnage sera l'un des protagonistes majeurs de l'Acte III.
Je sais pas pourquoi mais j'imagine toujours tous les membres de la Garde habillés avec l'uniforme comme il est décrit dans la fic, ok. Mais je les vois tous avec une casquette de la même couleur à la place du casque et la caméra placée sur le plastron.
Après ils ne mettent un casque, un plastron et toute la panoplie que pour les missions à haut risques telles que la capture ou l'interception d'animaux dangereux et il faut être forcé de reconnaître que le premier protégera bien mieux le crâne et le visage qu'une simple casquette dans ce genre de situations.
Cependant, ces missions étant rares sur Nublar, les gardes de sa garnison portent la plupart juste leur uniforme de service et là par contre, rien n'empêche à ce que le port d'une casquette soit usuel.
Pour ce qui est des questions techniques, tu veux qu'on en parles ici ou dans mon bungalow...
T'es comme ça ? En mode Poungi enclenché ? xD
Après oui, on peut en parler par mail si tu le souhaites.
Quant au fan-cast, il arrivera dans les prochains jours.
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Bonjour à tous,
Dans le présent post, je vous révèle les acteurs et actrices qui m’ont inspirés pour la description du physique d’une partie des personnages inédits de cette fic.
En voici la liste avec entre parenthèses les œuvres les plus connues dans lesquelles ils ont joués où donnés leurs voix dans le cas des films et séries d’animation ou des jeux-vidéos.
Garde Grise :
— Lieutenant Gilbert Brunet : Lionnel Astier (Kaamelott, Asterix : Le domaine des dieux, Les lyonnais)
— Adjudant Nataliya Darbinian : Angela Sarafyan (The Immigrant, Westworld)
— Lieutenant Erin Laurence : Claudia Black (Farscape, Stargate SG-1, Uncharted)
— Sergent Leif Drekanson : Kristofer Hivju (Snow Therapy, Game of Thrones)
— Lieutenant Duncan Glenmore : Graham McTavish (Le Hobbit, Outlander)
— Selma Forrester : Erica Cerra (Eureka, The 100)
— Gareth Turner : George Blagden (Vikings, Versailles)
Autres personnages :
— Lambert Ross, propriétaire de L’Iguanodon Éméché : Joe Morton (Terminator 2, Eureka)
— Jonas Roth, chef animalier du parc et soigneur de l’I.rex : Ian Glen (Aux Sources du Nil, Game of Thrones)
Et en bonus quelques personnages qui seront introduits dans l’Acte III :
— Gregor Sherman, chef des pourfendeurs : Zach McGowan (Black Sails, The 100)
— Susan Lynton, vice-présidente d’InGen : Jessica Walter (Archer, Arrested Development)
— Alistair Iger, directeur des relations publiques et porte-parole d'InGen : Orlando Jones (Evolution, American Gods)
— Caporal Vincent Chapuy, un garde gris français : Alban Lenoir (Hero Corp, Lazy Company)
Si jamais vous vous imaginiez les personnages mentionnés différemment, sachez que ce n’est pas grave du tout, bien au contraire, car libre à chaque lecteur d’avoir sa vision du personnage du moment qu’elle est cohérente dans les grandes lignes avec ce qui est énoncé dans mes écrits.
Dans le cas où vous aviez imaginé d’autres acteurs à la place de ceux cités, n’hésitez pas à faire vos propositions ainsi que pour les personnages auxquels je n’ai pas associé d’acteur en particulier.
Dernière modification par The Geeky Zoologist (22-09-2019 19:09:05)
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Eh bien, c'est pas mal tout ça !
Tu comptes mettre une axenne avec tous les personnages-clés de ta fic et les acteurs dont ils sont inspirés y compris ceux que l'on connaît déjà à travers le film JW et ceux qui ne sont pas présents dans ton post ?
Ça demanderai du travail mais ça serait sympa !
En tous cas, les acteurs ont été bien choisis.
Merci de partager ce genre de chose !
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Tu comptes mettre une axenne avec tous les personnages-clés de ta fic et les acteurs dont ils sont inspirés y compris ceux que l'on connaît déjà à travers le film JW et ceux qui ne sont pas présents dans ton post ?
Ça demanderai du travail mais ça serait sympa !
J'y réfléchirais une fois la fic terminée mais le mieux ce serait que quelqu'un sachant dessiner ait l'amabilité de se proposer si il lui plaît pour faire une galerie des personnages reposant un peu sur le même principe que les suivantes consacrées aux personnages des romans de Crichton faites par l'artiste Green-Mamba (https://green-mamba.deviantart.com/gall … assic+park) :
Personnages de Jurassic Park.
Personnages du Monde Perdu.
Autres personnages.
Je pense que ce serait encore mieux qu'une simple liste de photos d'acteurs étant donné les différences qu'il peut y avoir au niveau des styles vestimentaires, coupes de cheveux, couleur des yeux, présence ou absence de moustache...
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Bonsoir à tous,
Comme certains l'ont peut être déjà lu dans le topic Humeur de jour, je suis de retour sur le forum après 3 mois de stage en Afrique du Sud.
Bien qu'ayant été occupé lors de ce dernier et ayant profité d'une partie de mon temps libre là-bas pour me ressourcer, j'ai pu toutefois continuer d'écrire un peu et ce soir même, je suis en mesure de publier la première partie du premier chapitre de l'Acte III de cette fiction, reprenant pile là où l'on s'était arrêté au niveau de l'intrigue de Dearing et Grady. Les parties restantes du chapitre devraient arriver courant septembre si tout se passe bien.
Bonne lecture.
Chapitre XII : Assaut sur Burroughs
Tout ce que l'I.rex n'avait pas détruit du plafond de la caverne, le séisme s'en chargea et força Dearing et Grady à se blottir contre les parois, les bras levés au-dessus de la tête de façon à se protéger des chutes de pierre.
Alors que les derniers blocs constituant le plafond tombaient, Grady jeta un regard en direction du renfoncement creusé dans la paroi à l’opposé de leur emplacement.
- On est débiles ou quoi ?! S’écria-il.
Il recula, son sac à dos en main, puis, rassemblant toutes ses forces dans son bras, jeta le sac par-dessus le rebord du trou béant en lieu et place du plafond de la grotte.
- Maintenant escaladons les parois de ce renfoncement... Déclara-il ensuite.
- Les escalader ? Mais il n'y a pas de prises !
Le niveau de l’eau se mit subitement à baisser. Un bruit semblable à celui de succion que produit le siphon d'une baignoire ou d’une vasque se vidant devint perceptible. Se doutant que cela ne présageait rien de bon, ils se dépêchèrent de nager vers le renfoncement.
- Il faut essayer. J’ai une solution à ce problème.
Quelques instants plus tard, alors que le séisme était passé et que toute l’eau avait disparue, les deux étaient en train d'escalader les parois du renfoncement d'une manière des plus particulières : Dos à dos, jambes fléchies et bras de l’un passés sous celui de l’autre, ils marchaient sur la roche pas à pas, d’une allure lente mais régulière et coordonnée afin de ne pas s'épuiser l'un l'autre.
Bien que Grady lui ait bien précisé de rester concentrée sur l’escalade, Dearing ne put pas s’empêcher de réfléchir sur la méthode proposée par le soigneur car elle lui sembla familière. En fouillant dans sa mémoire, de vagues souvenirs d’un film d'animation vu alors qu’elle était étudiante lui parvinrent.
- Cette idée pour nous sortir de là... Elle ne serait pas inspirée d’un Disney ? Fit-elle.
- Peut-être.
- Bordel de merde... Jura-elle entre ses dents, pas rassurée par cette semi-confirmation impliquant que Grady jouait leur survie à tout deux sur une idée venue d’un film et non pas d’un cas réel où elle avait fait ses preuves.
Il eut un fort bruit de roulement puis le fond de la caverne, alors un agglutinement de blocs de roche de tailles et de formes variées, se mit en mouvement, d’abord doucement avant de glisser brutalement en direction du cœur de la salle, à son endroit le plus profond, et il se désolidarisa, laissant apparaître un gouffre sans fond.
- Économisons notre souffle ! Somma Grady. Si l’un de nous tombe, l’autre aussi !
N’ayant pas d’autre choix, ils poursuivirent l’ascension.
Cependant, dupé par l'effet de perspective, Grady n’avait pas remarqué plus tôt que plus le renfoncement montait, plus il s’élargissait, les forçant petit à petit à déplier davantage les jambes afin que leurs pieds restent à plat contre la paroi.
S’ils continuaient l’escalade, leurs jambes allaient devenir trop tendues et sous la fatigue, ou dans le cas de Dearing et son mollet blessé, de la douleur, l’un des deux allait céder.
- Putain... Souffla-il en réalisant la précarité de leur situation.
Soudain, ils commencèrent à entendre l’un des grands arbres aux abords de la grotte commencer à vaciller et se déraciner en grande partie avant de tomber, la cime et la partie supérieure du tronc pile au-dessus de la grotte devenue gouffre. Cet événement représenta une aubaine pour les deux compagnons car d’épaisses et longues lianes pendaient désormais dans le vide, dont certaines si près de ces deux derniers qu’ils pouvaient potentiellement les atteindre en tendant le bras.
- Ah ! Un Deus Ex Machina ! Fit Dearing d’une voix mélant espoir, sarcasme et incrédulité.
- Ne bouges pas. Je vais essayer d'en attraper une. Dit Grady.
Lentement, il libéra son bras droit et le tendit vers la liane la plus proche. Il la toucha du bout des doigts mais c’était insuffisant pour bien l’agripper alors il informa Dearing qu’ils devaient se déplacer latéralement de quelques centimètres. Lorsque ce fut fait, il refit une tentative et cette fois-ci parvint a saisir fermement la liane.
- Je l'ai !
Il profita de l'occasion pour en tester la solidité en tirant dessus.
- Pivotes de manière à passer tes bras autour de mon cou. Demanda-il.
Dearing, qui avait plaquée son dos fermement contre le sien pour rester en place, prit le temps de prendre une longue inspiration et tenu à garder le regard vers le haut. Faisant passer son bras gauche devant son visage, elle alla placer sa main sur l’épaule gauche de Grady, de manière un peu précipitée au goût de ce dernier.
- En douceur... Ne te précipites pas.
Elle retira ensuite lentement son bras droit et s’apprêta à pivoter à l’aide de ses pieds dans l’objectif d’être face au dos de Grady. Ainsi, elle fit d’abord face à la paroi du fond de la niche puis à l’abîme qui avait engloutit l’eau et le fond de la caverne. La peur du vide la saisit et pendant un instant, elle se figea et se mit à haleter. Malgré tout, elle se décida à poser sa main droite sur l’épaule droite du soigneur, fit décoller ses talons de la paroi alors que du sang gouttait de son mollet et au fur et à mesure qu’elle s’élançait vers l’avant, passa progressivement ses bras autour du cou de Grady.
- Prête ? Lui demanda ce dernier. Trois...
Elle s’accrocha davantage à lui, menaçant presque de l’étrangler, et fléchissant les jambes pour ne mieux que s’élancer ensuite une fois son compte à rebours terminé, Grady poussa contre la paroi, les emmenant vers le milieu de la caverne, à trois mètres sous le tronc.
- Montes ! Dit-il d'une voix étranglée.
Dearing défit son étreinte autour du cou de Grady pour aller s'agripper sur ses épaules avant de poser un pied puis l’autre contre les hanches du soigneur et de se propulser pour attraper la liane.
Gagnée par l’adrénaline, elle la grimpa en vitesse et une fois qu’elle fut en train de monter sur le tronc, Grady commença à son tour de grimper.
Craignant que l’arbre ne finisse par basculer dans le gouffre à un moment ou un autre, ils se dépéchèrent de parcourir en rampant les derniers mètres les séparant de la partie inférieure du tronc, reposant encore sur le sol. Lorsqu’ils y furent, ils sautèrent sur le coté et s’éloignèrent de quelque pas avant de se laisser tomber au sol pour souffler un instant.
Mais on ne leur laissa pas l’occasion de prendre un peu de répit car un puissant bruit d'explosion venant du nord les fit sursauter et tout autour des arbres tombaient tandis qu'ils entendaient des parties du vieux Centre des Visiteurs s’effondrer.
Grady s’empressa de récupérer son fusil et son sac puis ils se mirent à courir en direction de leur véhicule, en ménageant toutefois leur vitesse à cause de la blessure de Dearing qui la fit boiter jusqu’au lendemain.
Ils voulurent dans un premier temps passer entre la crête et la piscine mais un glissement de terrain coulant de la première en direction du centre les en dissuada.
Ils contournèrent alors le Centre par le nord, revenant sur la piste avant de tourner sur leur droite pour passer devant l’entrée.
Les derniers restes des toits coniques se désolidarisèrent de la structure, tout comme un pan entier de la façade sud. Derrière, le glissement de terrain emportait ou engloutissait tous sur son passage à une vitesse si importante que lorsque les deux compagnons passèrent devant l’entrée, une coulée de terre passa le seuil en sortant les battants de leurs gonds et dévala les marches, forçant Dearing et Grady à faire un écart sur le côté.
Ils s’arrêtèrent à une distance sûre, regardant impuissants la fureur de la Nature mettre à bas et ensevelir les ruines. Ils ne se détournèrent de cette scène qu’après avoir vu l’embrasure de la porte se briser en morceaux et le relief qui en ornait le sommet, représentant le même squelette de tyrannosaure que sur les logos des deux parcs, disparaître.
A l’endroit où se dressait jadis fièrement le Centre des Visiteurs, il n’y avait plus qu’une marée de terre surmontée d’arbres chancelants et d’une couche de végétation.
Le peu qui restait de Jurassic Park n'était plus.
Dearing et Grady sortirent de la piste non loin pour retrouver le chemin par lequel ils étaient venus et tout au long de celui-ci, ils durent éviter plusieurs chutes d’arbres et slalomer entre ou grimper par dessus les troncs couchés en travers de leur route.
En dehors d’un staccato d’explosions au nord et d'un grondement semblable à celui du tonnerre, bien que continu, un silence de mort régnait autour d’eux. Alors que la jeep n’était plus qu’à un peu plus d’une centaine de mètres, Grady commença à entendre comme des croassements, venant du nord.
Il écouta attentivement les cris ; mais Dearing ne tarda pas à se rendre compte que ce n’était pas des corbeaux ou d’autres oiseaux qui en étaient à l’origine mais un tout autre type d'animaux volants, sensés être retenus captifs dans l'une des volières du parc.
- Après la peste... Commença-elle.
- Le choléra... Finit Grady. Couches-toi et reste immobile ! siffla-il, tirant Dearing dans l’ombre d’un buisson dense.
Des Harpactognathus passèrent au-dessus d’eux, en un si grand nombre que leur ombre jeta l’obscurité sur le sol.
Tout deux réalisaient parfaitement le danger que représentaient ces ptérosaures et en conséquence, prirent soin de rester cois.
Une fois la surprise de leur évasion passée, Dearing et Grady s’interrogèrent sur le comment et le pourquoi de cette dernière et leur première hypothèse fut que la séisme eut crée une brèche dans la volière.
Ce ne fut pas avant que les ptérosaures fussent suffisamment éloignés qu’ils se levèrent mais à peine eurent-ils repris leur chemin qu’ils sentirent comme des flocons de neige venir se déposer sur eux.
En s’époussetant les épaules, Dearing remarqua que la pellicule qui s’était déposée n’était non pas blanche mais plutôt d’un gris assez sombre. De la cendre.
Ceci, combiné au puissant séisme, aux bruits d’explosions et au grondement continu dans le ciel les fit réaliser que l’éruption du Mont Sibo avait commencé.
Plus rien ne les retenant au nord, ils remontèrent dans la jeep et se mirent à rouler en direction du sud et à mi chemin entre le Lac Épouvantable et l'arc méridional de l’Étreinte, ils sortirent du couvert des arbres non loin du sommet d’une crête et s’arrêtèrent au niveau de cette dernière.
Faisant face à l’est, ils dominaient la moitié nord des champs centraux. Sur leur gauche, l’Étreinte était déjà passée dans l'ombre de l’épais nuage noir, tumultueux et parcourut d'éclairs émit par le Sibo et qu’un puissant vent du nord poussait vers le sud. D’un instant à l’autre, il allait franchir l’arc méridional de la vallée, roulant au-dessus des monts et des vaux à la manière d’une déferlante qui avancerait au ralentit.
Volant en direction des champs, ils aperçurent la nuée d’Harpactognathus et Grady saisit alors la paire de jumelles dans son sac avant d’ouvrir la fenêtre de toit afin de pouvoir suivre les ptérosaures à la jumelle tout en restant debout dans le véhicule.
Il les vit braquer plein sud, menaçant de sortir de son champ de vision.
- L’éruption les fait fuir vers l’opposé de l’île. Observa-il.
Dearing blémit.
- L’opposé. .. Mais Burroughs se trouve là-bas. Fit-elle, horrifiée. Il faut qu’on y retourne !
- Notre arrivée ne changera rien, il est déjà trop tard. Les Quetzals, car eux aussi ont dû se tirer, y seront en un rien de temps et avec une soixantaine de ptérosaures semant la panique parmi vingt mille personnes dans les rues, on serait plus en sécurité dans la jungle. Si on y retourne, il faudra faire preuve d’une grande prudence. Pour l’instant, contentons-nous de les suivre. Prends le volant.
Dearing alla s'asseoir au volant et Grady, toujours le haut du corps dépassant de la fenêtre, vint se décaler sur le siège passager. Lorsqu’il fut prêt, il la lui fit signifier et suivant ses indications, elle roula rapidement dans l’espoir qu’ils rattrapent les Harpactognathus.
Montant la garde au portail du pont, Bill Campbell, un quinquagénaire noir de cheveux, costaud, bedonnant et agent de la J-Sec*, faisait les cent pas le long de la passerelle connectant les deux miradors flanquant le dit portail tout en regardant d'un air préoccupé le ciel du nord qui s assombrissait peu a peu ou fur et à mesure que le Sibo crachait cendres et autres éjecta.
De temps a autre, il scrutait les cieux avec des jumelles, recherchant les ailes sinistres des Quetzalcoatlus, et tendait également l'oreille vers la jungle de l'autre côté de la gorge, à l affût d un bruit de sabots.
On lui avait informé plus de vingt minutes plus tôt que deux jeunes touristes, des passagers du camion retrouvé accidenté dans la combe au cœur de la réserve, s'étaient présentés avec l'un des chevaux disparus de la Garde grise aux abords du village safari. Ayant repérés les caméras de surveillance, ils en avaient attiré l'attention avant de déplier devant celles-ci une carte et d'y pointer leur destination : Le Pont de la Gorge.
Ainsi, malgré le puissant séisme survenu entre temps et l'éruption qui s'était amorcée, Campbell attendait ces survivants d une minute a l autre et espérait que rien ne leur fut arrivé en chemin.
Lorsque des barrissements et des mugissements avaient commencer a lui parvenir de la réserve, le factionnaire s'inquiéta un peu pour les deux survivants et pendant de longues minutes, les cris continuèrent au milieu d une jungle réduite au silence.
Ce fut alors que ces derniers se mettaient a perdre en intensité que le bruit d'un animal galopant devint perceptible. Campbell se tourna vers la réserve et porta toute son attention sur ce son.
Il se rendit rapidement compte que c'était celui de sabots martelant la terre battue et quelques secondes plus tard, un cheval a robe bai, chevauché par un jeune homme d’environ dix-huit ans et un autre plus jeune et plus petit, déboula à plein galop du tournant que la piste décrivait peu après le pont.
- C’est eux, Rafael ! Cria Campbell son collègue qui attendait au sol, prêt a faire coulisser le portail. Ouvres la porte !
Rossinante traversa le pont et, toujours au galop, passa le portail ouvert avant d'être arrêtée par Zach.
Tandis que l'agent qui leur avait ouvert le portail refermait derrière eux, celui qui les avait repérés venait vers eux, tout comme le soldat canadien de la Garde qui avait patienté jusque là à côté d'une remorque à chevaux non loin. Zach reconnut le soldat puisqu'il l'avait aperçu la veille a l’Iguanodon Éméché.
En voyant que la jument était saine et sauve, Niall Forrester s approcha des deux garçons descendus de cheval Pour leur serrer la main avec gratitude.
- Merci de l'avoir ramenée. Dit-il.
Puis, avant même que les Mitchell puissent faire leurs adieux a Rossinante, il saisit son licol et mena cette dernière dans la remorque tandis que Campbell indiquait aux garçons de monter à l'arrière d’un buggy noir.
- Je vous emmène à l Avenue. Mademoiselle Young a prévu de venir vous chercher là bas. Les informa-il.
Quelques instants plus tard, alors qu'ils roulaient en direction de Burroughs, la radio du véhicule s'alluma.
- Alerte a toutes les unités, ici Russel ! Les Cigognes de l'Enfer ont atteints la volière de la rivière. Je répète les cigognes de l'Enfer sont a la volière de la rivière ! Dit un agent, l’un de ceux ayant embarqués dans les hélicoptères venus chercher le groupe dans les collines au nord du comptoir de la jungle.
Campbell et ses deux passagers blêmirent. Le premier car il savait qu’il y avait encore des civils dans cette zone de l’île et les seconds car ils apprirent par ce biais l’évasion des Quetzalcoatlus.
L’agent voulut momentanément éteindre la radio pour éviter d’inquiéter plus que nécessaire les Mitchell mais sachant qu’ils avaient du vivre des épreuves terribles dans la jungle, il se ravisa, sans compter le fait que le message était de nature urgente.
- Ils... Ils foncent sur nous... Ajouta Russel, terrifié.
S’ensuivit un mélange de hurlements, de cris mi stridents mi rauques, du vrombissement d'un moteur et le son d’une alarme.
- Ils sont en train de nous abattre ! Cria-il par dessus cette cacophonie. Que quelqu'un nous vienne en aide !
Tournoyant de manière incontrôlée, l'hélicoptère de tourisme JW-001 se rapprocha dangereusement du sommet du dôme et percuta de plein fouet le maillage. Ce dernier céda au niveau du point d'impact et l'hélicoptère, dont la queue s était brisée durant le processus, pénétra dans la volière, tombant droit vers la jungle en contrebas.
Les passagers de l'appareil étaient définitivement condamnés mais ils ne furent pas les seules victimes de l'accident car dans sa chute, l'appareil vint trancher les câbles du téléphérique et les cabines, bloquées sur place suite au séisme et avec des passagers a bord pour certaines, furent entraînées par le mouvement pendulaire du câble se rompant et allèrent s’écraser avec fracas au milieu des arbres, dans la rivière ou pire encore, dans une galerie d observation ou un certain nombre des visiteurs de la volière s'étaient réfugiés.
Les ptérosaures résidents, sur les nerfs suite à l'éruption eux aussi, paniquèrent et abandonnèrent leurs aires et lieux de nourrissage, convergeant tous vers la brèche avant de, une fois dehors, se disperser aux quatre vents, en évitant toute fois le nord ou le ciel s embrasait et le sud, où une partie de leurs cousins gigantesques avaient pris en chasse les deux hélicoptères restants qui volaient vers Burroughs tandis que les autres, eux, étaient déjà aux portes de la Cité, si hauts dans le ciel que les seuls a connaître leur présence à ce niveau étaient Hoskins et les techniciens de la salle de contrôle.
- Je suis idiot ou ils foncent vers nous ? S’était rendit compte Hoskins en voyant sur la carte en temps réel les points correspondant aux premiers ptérosaures échappés progresser rapidement en direction de Burroughs, juste avant que les hélicoptères de tourisme soient attaqués.
Sans perdre un instant, il avait ordonné :
- Emmenez tout le monde à l’intérieur. Aux armes !
Il s’était tourné ensuite vers Harriman :
- Quel est le statut de la garnison ?
- En cours de préparation. Ils seront déployés dans la cité d’ici moins de dix minutes.
Tandis que les techniciens s’exécutaient à transmettre les directives du directeur de la division sécurité, Krill se retourna en direction de l'endroit ou Young s’était assise avec son ordinateur portable pour regarder les images des pièges photographiques. Là où l'ordinateur avait été laissé à même le sol, sa propriétaire avait disparue.
- Où est Zara ? Demanda-elle.
- Les neveux de Claire sont arrivés au pont il y a peu. Elle est partie les retrouver à l'infirmerie des visiteurs. Répondit l'un de ses collègues.
- Je ne l'ai pas entendue partir. Avoua Cruthers avec une pointe de culpabilité. Je lui aurais dit de rester ici en sécurité.
Le regard du technicien en chef fut attiré par les images des caméras de surveillance de Burroughs, montrant la foule de visiteurs, contenue avec difficulté par les employés, s'agiter.
- C'est un tel bordel la dehors... Ajouta-il, inquiet.
FIN PARTIE 1
*J-SEC : Diminutif de Jurassic World Security.
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
Hors ligne
Bonjour à tous,
Voici aujourd'hui la suite du Chapitre XII.
Bonne lecture.
Chapitre XII : Assaut sur Burroughs (partie 2/3)
Menés par Campbell l’agent de sécurité, Zach et Gray marchaient le long du quai à l’est de l’étang. Ils étaient revenus à Burroughs par le nord-est en empruntant sur une partie du trajet les tunnels qui passaient sous le Zoo, permettant d’aller et venir aisément en véhicule entre les Docks de l’Est, l’Administration et Burroughs.
L’ayant quittée alors qu’elle se réveillait, les Mitchell retrouvèrent la Cité dans un état dans lequel elle s’était jamais retrouvée.
Avec le signal sonore à deux tons de la sirène d’alarme qui résonnait partout dans la vallée, les collègues de Campbell accourant éteindre des feux ou secourir des personnes piégées sous des gravats et les visiteurs regroupés pour être emmenés dans des abris souterrains, ils se crurent en plein Blitz. Le message suivant était diffusé via les hauts-parleurs dans plusieurs langues :
— Votre attention chers visiteurs ! Pour des raisons de sécurité, toutes les attractions du parc sont dorénavant fermées jusqu'à nouvel ordre et doivent être évacuées. Tous les visiteurs et employés non-habilités sont priés de se rendre calmement à l’abri le plus proche et d'y rester en attendant que nos équipes règlent la situation. Merci.
Lorsqu’ils arrivèrent au carrefour à l’est de la Promenade, ils trouvèrent l’infirmerie des visiteurs en train d’être évacuée.
— Le séisme a compromis une partie de l'infirmerie et on a feu au niveau -3 sous le Grand Nublarian. D’autres incendies se sont déclarés dans le reste de la Cité. Les gars sont en chemin pour les maîtriser mais il faut qu’ils le soient le plus vite possible si on ne veut pas se retrouver au milieu d’un champ de ruines à l’aube. Répondit l’un des agents de la J-SEC présents sur place lorsque Campbell le questionna sur les raisons de l’évacuation.
Campbell se tourna vers ses escortés.
— Veuillez rejoindre les autres visiteurs s’il vous plaît. Leur dit-il.
— Et Mademoiselle Young ? Elle est censée nous retrouver ici. Lui rappela Zach.
— Elle est aussi priée de s’abriter. Ne vous en faîtes pas pour elle. Allez ! J’ai beaucoup à faire. Leur dit l’agent froidement, les chassant presque.
Les Mitchell se résolurent à aller suivre le flot de visiteurs qui progressait en direction de l'entrée de l'Avenue Richard Owen.
Parmi les derniers à rejoindre la cohue qui avançait lentement, ils se retrouvèrent avec deux gardes montés derrière eux. Contrairement à Rossinante et aux autres chevaux des gardes rencontrés dans la Réserve, ceux de ces cavaliers portaient des guêtres protecteurs aux jambes, une chemise, un protège nuque ainsi qu'une visière, comme ceux de la police lors de manifestations violentes ou d’émeutes.
Dans la zone comprenant l’Avenue Richard Owen et de la Promenade, il existait trois entrées menant aux Profondeurs et les abris qui s’y trouvaient. Semblable en apparence à des entrées de stations de métro, il y en avait une à chaque extrémité de la Promenade tandis que la troisième se trouvait au niveau de la Place de l’Obélisque.
Concernant celle la plus proche du carrefour, elle avait été obstruée par des gravats suite au tremblement de terre et ainsi les visiteurs durent continuer plus loin.
Au niveau de la fontaine aux quatre bustes de Parasaurolophus, deux agents de la J-SEC se chargeaient de séparer le flot arrivant vers eux en deux parties, l’une allant en direction de l’entrée au niveau de la place et l’autre vers l’extrémité ouest de la Promenade.
Alors qu’ils venaient d’entrer dans l’Avenue, une vendeuse de l’Emporium sortit précipitamment de la boutique pour aller à la rencontre de l’agent de sécurité le plus proche.
— D’abord tout le monde dehors, maintenant tout le monde sous terre. Qu’est-ce que c’est que ce binz ? Demanda-elle, confuse et sur les nerfs.
— Les Cigognes de l’Enfer. Lui répondit-il laconiquement après s’être assuré que l’on ne prêtait pas attention à leur échange. Elles doivent être au-dessus de nous à l’instant où nous parlons. Surveilles les cieux, la terre est basse... Ajouta-il gravement en regardant au-dessus de lui.
Non loin, l’un des soigneurs, un géant avec une épaisse barbe noire, regardait avec agacement les hauts parleurs.
— Il faut éteindre ces satanées sirènes ! Les bruits forts leur font péter les plombs ! Beugla-il au milieu de la cacophonie.
A quelques mètres de là, un groupe de visiteurs s’était arrêté au milieu de la chaussée pour observer le ciel. L’un d’eux avait l’index dirigé vers lui, pointant une vague forme de couleur sombre se déplacer rapidement entre les nuages.
— Qu’est-ce que c’est ? Un avion ? Se demanda le premier
— Un oiseau ? Suggéra un deuxième.
— Une chose est sûre ce n’est pas Superman… Ajouta une troisième.
Soudain, les chevaux des gardes montés se mirent à piaffer et l’un d’eux émit un petit hennissement nerveux tandis que les mantellisaures d’un tramway arrêté sur la voirie et toujours attelés cherchèrent à se défaire de leurs harnais, poussant la foule à s’écarter d’eux tandis que le cocher tentait vainement de les calmer.
En relevant les yeux vers les nuages, les visiteurs virent que la forme était descendue plus bas et on pouvait alors distinguer deux grandes ailes grises et un long cou rosâtre.
A l’instant où ils réalisèrent la nature de la forme, il y eut un cri strident dans leur dos.
— Quetzal ! Cria le soigneur à la barbe noire.
Le ptérosaure poussa un autre cri, plus puissant cette fois qui saisit les visiteurs d’effroi.
— A couvert ! Hurla un agent de sécurité.
Les chevaux se mirent à ruer et en sa cabrant, l’un d’eux désarçonna son cavalier avant de prendre la fuite, galopant entre les visiteurs, en reversant plusieurs et en piétinant un, le blessant grièvement. Les mantellisaures redoublèrent de panique et tirèrent de toutes leurs forces sur leurs courroies.
Une ombre passa rapidement au-dessus de la foule et en levant les yeux, elle vit qu’un Quetzalcoatlus la survolait, de très près, presque au ras des toits, volant d’une extrémité de l’Avenue à l’autre du nord au sud avant de braquer vers l’est, passant à un jet de pierre des balcons du Grand Nublarian et décrivant un arc alors qu’il se revenait vers le Centre de la Découverte, près duquel il fut rejoint par deux de ses congénères, arrivant eux aussi du nord.
Les trois reptiles volants passèrent au-dessus du bâtiment puis plongèrent vers la Place et l’Avenue, fondant droit vers la foule et comme chez un troupeau surpris par des prédateurs, une peur panique s’empara d’elle.
Là où les uns cherchèrent à s’engouffrer vers l’entrée des Profondeurs en se bousculant et en se montant dessus, les autres firent demi-tour pour fuir l’Avenue.
Au milieu de ces derniers, Zach prit Gray par la main et l’enjoignit à courir vers la ligne d’arcades sur leur gauche pour s’y mettre à l’abri mais arrivés là, les autres visiteurs fuyants les poussèrent à aller en direction de la fontaine.
En regardant en direction des lagons entre les colonnes des arcades, les Mitchell virent trois autres Quetzalcoatlus, volant au-dessus de la surface de l’eau dans leur direction, aidant leurs congénères à prendre en tenaille les visiteurs.
Les ptérosaures furent sur eux en un rien de temps et quatre d’entre eux atterrirent sur la chaussée au milieu de la foule elle-même, poussant brutalement à terre les gens durant le processus avant de commencer à donner de nombreux coups de becs tout autour d’eux, infligeant rapidement un certain nombre de blessures mortelles.
Leur odeur pestilentielle frappa tous ceux à proximité d’eux, même les Mitchell qui les observaient depuis l’arcade, horrifiés qu’ils étaient par le physique repoussant des ptérosaures avec le sang séché sur leurs pycnofibres, leurs yeux blanchâtres à l’air maladif et leur sac gulaire pourvu de nombreux plis et verruqueux ; le fait qu’ils étaient à la fois agiles, rapides et grands, en faisant des créatures auxquelles il était presque impossible d’échapper si on se trouvait à découvert ; et leur brutalité, n’hésitant pas à éventrer, empaler et écorcher leurs proies vivantes en plus de les malmener parfois dans tous les sens, les saisissant dans leur bec avant de les frapper à répétition contre le sol.
S’éloignant le plus possible de ce carnage, Zach et Gray revinrent à la Promenade mais pourchassant au sol d’autres visiteurs, un des Quetzalcoatlus s’y dirigea aussi et leur barra la route vers l’ouest de la Promenade et l’entrée de l’abri.
Ils entendirent deux hélicoptères se rapprocher de Burroughs mais peu après, les bruits produits par l’un des appareils devinrent irréguliers et Zach crut même l’entendre perdre de l’altitude, comme s’il allait s’écraser. Une explosion retentissant quelques secondes plus tard depuis la place confirma sa supposition. Un autre des ptérosaures vint peu après se poser au milieu de la Promenade Est.
Alors qu’ils cherchaient désemparés un endroit où s’abriter, une agente de sécurité les héla.
— Ne restez pas plantés là ! Leur cria-t-elle au milieu des hurlements.
Mais aussitôt qu’elle eut terminé sa phrase, un bec vint se refermer autour de son torse et lorsqu’elle s’en rendit compte, elle était suspendue à plus de quinze mètres du sol.
Ayant vu que le flot de personnes fuyant le long des arcades est avait considérablement diminué, Zach et Gray s’étaient engouffrés dans un bâtiment pour monter au premier étage. Tout en étant cachés derrière les montants d’une fenêtre, ils observèrent impuissants l’agente être disputée entre deux Quetzalcoatlus. Au beau milieu de leur querelle, elle tomba droit dans l’un des lagons, celui du mosasaure.
Les garçons ignorèrent si elle était déjà morte ou non. Tout ce qu’ils virent c’est l’un des ptérosaures amorcer sa descente pour récupérer le corps.
Mais au moment même où son bec saisit ce dernier, les mâchoires gigantesques et béantes du mosasaure fendirent la surface et se refermèrent sur le bec, le sectionnant puis le broyant net.
Le Quetzalcoatlus, sous le choc de la douleur, cria puis commença à dériver en plein vol, perdant rapidement de la hauteur avant d’aller percuter la baie vitrée d’une boutique et de s’écraser à l’intérieur.
De leur cachette, les garçons perçurent un bruit de bottes, celles des soldats d’un contingent de la Garde Grise, approchant de l’ouest.
Précédant au pas de course les deux marauders du peloton de Brunet, il y avait une trentaine de fantassins, armés de fusils mais aussi de sabres et de lances, dont la pointe n’était non pas constituée du même embout fourchu qui terminaient les armes d’ordinaire utilisés par les hoplomaques mais d’une pointe en fer, à l’instar des lances antiques et médiévales. Un bon nombre des soldats portaient également des boucliers.
Arrivés au niveau de la fontaine, les gardes tournèrent comme pour emprunter l’Avenue et à son entrée, ils se mirent en formation, se déployant selon trois lignes serrées ou ils étaient épaules contre épaules et les marauders stoppèrent, leurs canons braqués vers l’extrémité opposée de l’Avenue.
Se tenant au centre même de la première ligne, Brunet commandait le contingent.
— Mur de boucliers ! Cria-il avant de plaquer un bouclier contre son torse et d’abaisser parfaitement à l’horizontale la lance qu’il tenait dans sa main droite.
Ceux de la même ligne effectuèrent le même geste à l’unisson tandis que la deuxième ligne vint lever ses boucliers à l’horizontale juste au-dessus de leurs têtes et tenir leurs lances de manière oblique.
Une fois le mur de boucliers ainsi formé prêt, Brunet exhorta la formation à s'avancer.
— En avant !
Et les gardes s’avancèrent, poussant régulièrement de concert un seul et même cri, bref, guttural et puissant, presque bestial.
Les Quetzalcoatlus occupés à harceler les visiteurs se retournèrent alors vers la source de ces cris et en regardant l'ensemble constitué par la formation et les deux marauders, ils furent confrontés à une seule et même entité : Un monstre cuirassé large et gigantesque, aux multiples dents longues et proéminentes garnissant un museau aplatit, et doté de deux grands yeux rectangulaires gardés grands ouverts.
En le voyant avancer progressivement vers eux en rampant sur ses pattes innombrables et en grognant, la confusion et l'appréhension les saisit. D'instinct, les ptérosaures reculèrent et la formation gagnait inéxorablement du terrain sans rencontrer de résistance.
Profitant de cela, les visiteurs encore sur l’Avenue fuirent la chaussée et passant par les arcades, contournèrent les gardes ou s’abritèrent dans les bâtiments semblant encore sûrs sur le moment.
Lorsque Brunet estima qu’ils s’étaient suffisamment avancés, il tourna la tête en direction du troisième rang où se trouvait Darbinian. Lorsque cette dernière croisa son regard, il lui adressa un signe de tête et elle sut que c’était à sa ligne d’agir.
— Tireurs, marquez vos cibles ! Ordonna-elle.
Alors que la formation continuait d’avancer lentement, Brunet attendit quelques secondes avant commencer à donner l'ordre de tirer.
— Prêts ! ...
Tous les boucliers s’abaissèrent et les deux premières lignes s’accroupirent tandis que les tireurs constituant la troisième ligne mettaient en joue leurs fusils.
— ... Visez ! ...
Les tireurs braquèrent leurs fusils sur les Quetzalcoatlus les plus proches et s’apprêtèrent à appuyer sur la détente.
— ... Tirez !
Les balles sifflèrent à travers l’Avenue et sur les trois ptérosaures visés, un fut abattu sur place mais les deux autres furent seulement blessés plus ou moins gravement car ils firent preuve d’une plus grande réactivité que celle de leur défunt congénère, se retirant promptement hors de portée ou de vue des soldats.
Parvenus désormais à la moitié de l’Avenue, ces derniers s’enhardirent suite au succès relatif de la première salve. S'ils continuaient comme ça jusqu’à la place, la peur allait gagner les Quetzalcoatlus restants, les poussant à fuir.
Plus que sept... Songea Durant alors qu’elle lancait un regard rapide et nerveux par-dessus son bouclier tandis qu’au sein du mur de boucliers, la chaleur augmentait jusqu’à devenir presque étouffante et que l’air se raréfiait.
Alors que moins d'une trentaine de mètres séparait la formation du bord de la place, l’un des Quetzalcoatlus blessés par la première salve, ayant fuis plus loin avant de revenir se poser au niveau des toits des bâtiments du côté ouest de l’Avenue, regarda le contingent avancer tout en étant en grande partie dissimulé derrière la fumée.
Lorsque la formation dut contourner un tramway et son attelage à l’arrêt et le dépassa, il distingua chacun des hommes la composant. Ce fut comme s’il s’aperçut de la supercherie auxquels ses yeux avaient été soumis et son regard se porta sur l'un des soldats les plus exposés, celui maniant le canon du marauder le plus proche.
Lui et les autres gardes regardant droits devant eux, ils ne le virent pas descendre de son toit en glissant et bondir sur le sommet du tramway, faisant mugir de plus belle les mantellisaures de l’attelage, avant de se précipiter en un éclair vers sa proie, le bec grand ouvert.
Le soldat hurla en étant saisit mais heureusement pour lui, son collègue présent à l’intérieur du marauder et dont le rôle était d’aller recharger le canon entre chaque tir dégaina son pistolet et tira dans les ailes du ptérosaure qui lâcha le garde par réflexe.
Une partie des lanciers se retourna pour lui faire face et crièrent mais énervé, le Quetzalcoatlus se lança en avant pour aller empaler l’un des hommes sur son bec mais au dernier moment, son adversaire brandit son bouclier au-dessus de lui et le bec frappa celui-ci au lieu du cou.
Derrière les lanciers, l’un des gardes équipés d’un fusil à pompe lui tira dans le poitrail à trois reprises et blessé à mort, le reptile volant s’effondra au sol pour y être achevé à coups de lances.
Voyant leurs congénères tomber les uns après les autres, les Quetzalcoatlus finirent par prendre peur et fuirent au galop les gardes, empruntant la voie menant à l’étang d’où ils profitèrent de la pente pour décoller, courant d’abord sur quatre puis deux pattes avant de bondir et de donner quelques battements d’ailes.
Alors qu’ils s’envolaient au loin, les gardes, triomphants malgré la mise en échec de leur leurre visuel, rompirent les rangs et regardèrent, en poussant des cris de victoire et en brandissant haut leurs armes, les cigognes de l’enfer s'éloigner de la Cité.
Derrière eux, une foule considérable s’était rassemblée et regardaient eux aussi la fuite des ptérosaures avec soulagement et espoir. Certains criaient des railleries à l'encontre des ptérosaures tandis que d'autres acclamaient les gardes pour leur bravoure.
— Restez vigilants. Aux dernières nouvelles, les Harpactognathus se dirigent toujours vers nous. Ils seront là bientôt. Préparez- vous ! Dit Brunet, toujours alerte, à ses subordonnés.
Son regard fut attiré par l’hélicoptère brûlant dans la partie est de la place, celui qui avait abattu pendant l’attaque. Il dégageait une épaisse fumée qui, poussée par le vent, agissait comme un écran entre le contingent et le tunnel passant sous l’arête nord-est du Centre
Alors que les employés indiquaient aux visiteurs de se diriger soit vers l’entrée des Profondeurs la plus proche, située juste à côté de l’un des marauders à l’arrêt, soit vers le Centre de la Découverte pour en gagner les salles inférieures dans le calme et le bon ordre, avançant en une longue colonne, les gardes commencèrent à se réorganiser.
A cause des clameurs, Brunet n’entendit pas immédiatement les crachotements de sa radio.
Une fois suffisamment éloigné de la foule, il put les entendre distinctement et reconnut la voix d’Harriman.
— Foutez le camp de la place, merde ! Ils arrivent... Cria-il d’une voix angoissée.
— Qu’est-ce qui...
Un grand fracas au niveau du tunnel menant au Zoo attira l’attention des gardes.
A cause de la fumée noire dégagée par l'hélicoptère, ils ne purent voir ce qui venait d’enfoncer la porte refermée vainement en urgence dans le but d’essayer de stopper ce qui s’apprêtait à débouler du tunnel.
Les instants suivants se déroulèrent comme au ralentit dans l’esprit des gardes.
Leur parvenant comme des échos lointains, il eut d'abord les hurlements des visiteurs en train d’avancer vers les portes du Centre de la Découverte puis ils virent leur colonne se scinder, une partie se précipitant vers le haut des marches et une autre bien plus importante, fuyant de terreur vers l’Avenue en hurlant.
Derrière eux, le contingent vit une ligne de grandes collerettes se dessiner au milieu de la fumée et l'effroi qui s'empara des gardes à cet instant précis fut le même que celui qu’avait ressenti les légionnaires romains la première fois qu’ils furent confrontés à des éléphants sur un champ de bataille, ceux de l’armée du roi des Molosses Pyrrhus 1er, à Héraclée en 280 avant notre ère.
— Rompez la formation ! Ecartez-vous ! Hurla Brunet.
A peine l’eurent ils entendu que cinq pachyrhinosaures émergèrent du nuage de fumee, bramant dans leur avance et galopant droit vers l’Avenue Richard Owen.
Durant le tremblement de terre, un arbre était tombé en travers de la clôture de l'enclos des pachyrhinosaures et interrompu le courant électrique sur une section entière mais de cela, les cératopsiens ne s’en étaient rendus compte que plus tard, lorsque la peur suscitée par deux Quetzalcoatlus volant au-dessus des enclos fut tel qu’ils étaient venus s’agglutiner tout contre la clôture, poussant l’un des individus a toucher les fils auparavant électrifiés et s’apercevoir de l’absence de courant, chose qui le surpris car lorsqu’ils étaient plus jeunes, plus d’une fois ils les avaient touchés et reçus une légère décharge électrique, suffisamment forte pour les empêcher de recommencer.
Ainsi, sous l’emprise de la panique, le pachyrhinosaure avait reculé pour charger l’un des poteaux supportant la clôture Et au terme de plusieurs tentatives, parvenu à le renverser, créant une brèche dans lequel lui et ses congénères s’étaient précipités. Ignorant où aller, ils avaient galopés à travers le Zoo, se frayant un chemin au milieu de la végétation dense ou des allées en proie au chaos où quelques autres animaux échappés courraient entre les derniers employés restés là-bas, avant d’en sortir en empruntant l’allée qui rejoignait la place de l’Obélisque en passant sous l’arête sud-est du Centre de la Découverte.
Pour eux, les gardes et leurs véhicules ne constituèrent qu’un obstacle de plus en travers de leur route et pour mieux le franchir, ce fut alors qu’ils abaissèrent la tête et accélérèrent.
Les gardes rompirent alors les rangs et voulurent s’écarter mais pour certains se trouvant au centre de la formation, il fut trop tard et la charge les balaya comme des fétus de paille. Certains furent projetés en l’air, un encorné, d’autres piétinés et l’un des marauders fut même renversé en travers de l’entrée des profondeurs, la condamnant.
Drekanson, qui était alors au milieu de la formation, fit partie de ceux mis à terre mais par pur miracle, les pattes gigantesques des pachyrhinosaures ne passèrent qu’a quelques centimètres de son visage et il se tint couché et immobile le temps qu’ils passent.
Lorsqu’il se releva, le Norvégien eut l’impression d’avoir été heurté par un train et alors que les cératopsiens avaient atteints la fontaine à l’autre bout de l’Avenue, il tourna la tête vers cette dernière et fut confronté à une vision d’horreur.
L’Avenue Richard Owen n’était plus qu’étals renversés, décorations mises en pièces jonchant la chaussée et les trottoirs, palmiers couchés ou penchés contre les bâtiments et aux feuillages embrasés à cause des braises des braseros projetées ça et là, tramway mis en travers de la chaussée, et, au milieu de tout cela, des corps étendus et désarticulés par douzaines.
L’Avenue résonna rapidement des plaintes de blessés. Les moins graves d’entre eux cherchèrent à regagner les arcades en boitant ou en titubant, tenant pour beaucoup un bras ensanglanté ou la main posée sur le crâne, d’autres traînant une jambe cassée. Les plus graves, eux, agonisaient a même les dalles.
De chaque côté, de la fumée noire s’élevait des bâtiments et un crépitement était perceptible : les incendies mineurs, qui, sans l'attaque des Quetzalcoatlus, auraient été maîtrisés, avaient gagnés en ampleur et menaçaient de consumer toute la zone.
Alors qu’il rejoignait ses collègues, ils se retournèrent soudainement en entendant des croassements dans les cieux dans leur dos.
Le nuage de cendres venait de passer au-dessus de la rivière et chassait toujours vers le sud. D’un instant à l’autre, les ténèbres allaient s’abattre sur la Cité. Mais ce n’était pas le pire car le précédant, il y avait les six Quetzalcoatlus restants ainsi que la nuée d’Harpactognathus.
Lorsque les ptérosaures arrivèrent non loin du Centre de la Découverte, ils descendirent en piqué droit vers la cité en proie aux flammes.
Tels des corbeaux sur un champ de bataille, ils allèrent se poser au milieu des corps et se mettre à dévorer les morts ou les mourants ou pire, gagnés par la frénésie, se mettre à attaquer ceux bien portants. On vit toutefois l’un d’eux entrer dans le Winston’s pour aller piller la cuisine où de la viande continuait de griller.
Les gardes, se remettant à peine de la charge des pachyrhinosaures qui avait mis hors combat un cinquième de leurs effectifs, se regroupèrent et repoussèrent les Harpactognathus jusqu’aux marges de la place. Mais ils ne furent confrontés qu’a une petite dizaine d’individus car lors de son arrivée à Burroughs, la nuée s’était éparpillée en formations dans tout le nord de la Cité et Brunet décida alors de disperser les hommes pour protéger les civils des animaux déchaînés, aider la J-SEC à conduire les premiers à l’abri et les soigneurs à neutraliser les seconds.
— Darbinian, Prenez des tireurs avec vous et gagnez les toits. Temba, que vous et la moitié des hommes restants tenez la place. Dit-il à l’un des cavaliers, un Sud-africain. L’autre moitié avec moi et Leif, nous devons sauver ceux qui peuvent encore l’être. Durant, Velasquez, allez défendre la porte !
Les deux recrues acquiescèrent et partir se positionner juste devant les portes de bronze du Centre de la Découverte, y aidant les agents de la J-SEC à emmener les civils à l’intérieur. Tandis que Darbinian et quatre autres tireurs commençaient déjà à escalader les murs pour gagner les toits et les tours et que Temba et ceux chargés de la défense de la place mettaient en place un périmètre de sécurité, le reste des gardes encore en état de se battre, un peu moins d’une quinzaine, se scindèrent en deux groupes : L’un, mené par Brunet et Cole partit vers l’Avenue, et l’autre, dirigé par Drekanson et Maathai, se hâta de rallier les quais bordant l’étang du spectacle nocturne.
En chemin, les deux groupes virent que les pachyrhinosaures ne courraient plus mais que perdus et que suite à l’arrivée des ptérosaures, leur panique s’était mué en une folie destructrice et qu’ils attaquaient tout ce qui bougeait à leur portée, humains, reptiles volants mais aussi chevaux et mantellisaures.
Lorsqu’il eut aperçu à portée de voix Darbinian et les tireurs courant sur les toits pour gagner des positions de tirs, Brunet leur cria :
— Les pachys ! Tuez les pachys !
Tuer un pachyrhinosaure adulte dans un tel contexte n’était pas une tâche aisée, la plupart se seraient même mis d’accord pour dire que sans les canons des marauders et les grandes flèches d’acier, ça aurait été presque impossible.
Leur peau dure rendait relativement inefficace les flèches et beaucoup de types de balles, les seuls pouvant causer des dégâts notables étant ceux d’un calibre voisin ou supérieur à celui d’un fusil à éléphant, tandis que les chevaux en avaient si peur que même les cavaliers les plus habiles n’auraient pas pu s’approcher suffisamment pour leur porter des coups ou des tirs fatals.
Sans armes lourdes, la seule façon envisageable pour tuer un pachyrhinosaure était de tirer dans les yeux pour atteindre le cerveau, ce qui signifiait pour le tireur de rester devant lui alors que l’animal le chargeait
En voyant certains des membres de son groupe gâcher leurs munitions sur les cératopsiens qui ne cessaient de bouger, Darbinian les ordonna plutôt de viser les ptérosaures et Brunet demanda dans son micro au marauder encore debout de venir dans l’Avenue pour s’occuper des pachyrhinosaures.
Pendant ce temps, Velasquez et Durant, aidaient les civils et les blessés à parvenir dans la sécurité de l’intérieur du Centre. Malgré le désespoir de la situation et le traumatisme vécu plus tôt suite à l’embuscade de l’Indominus, Durant tenait bon et restait concentrée car son sens du devoir était plus fort et lui exigeait de faire preuve de courage devant ces gens sans défense. Elle devait être forte pour eux.
Au milieu des fuyards arrivants, ils aperçurent une figure familière, boitant dans sa course : Lambert Ross.
Comme tous les autres employés non habilités, il lui avait été demandé d’évacuer son lieu de travail et de gagner l’un des abris aux côtés des visiteurs mais la première attaque des Quetzalcoatlus suivie de la charge des pachyrhinosaures avaient réduits à néant les efforts pour organiser une évacuation en bon et due forme et parmi les fuyards, on trouvait même quelque uns des agents de sécurité chargés de la supervision de la dite évacuation.
Alors qu’ils étaient arrivés à mi-chemin entre l’obélisque et les marches, certains du groupe de visiteurs l’ayant devancés s’arrêtèrent soudainement pour pointer quelque chose bien au-dessus des portes du Centre.
— Là-haut ! Attention ! S’écria l’un d’eux.
Durant et Velasquez levèrent la tête et au milieu de la ligne de statues de ptérosaures ornant le haut de la façade d’entrée, ils virent trois Harpactognathus, regardant avec un vif intérêt les fuyards converger vers le bâtiment. En raison de leur ressemblance avec les statues et de la lumière déclinante à cause du nuage passant au-dessus de la Cité, si épais qu’il bloquait les rayons du Soleil, personne ne les avait vus plus tôt et rapidement leur regard se braqua sur l’individu le plus lent et en apparence le plus faible du groupe : Ross.
Ils se jetèrent dans le vide et foncèrent vers le tavernier. Ce dernier, ayant aperçu la menace, se saisit d’une poussette renversée à ses pieds et la brandit des deux mains, prêt à faire face à ses assaillants.
S’en servant pour les frapper, il se défendit vaillamment pendant un instant avant qu’une morsure au bras ne le fasse presque vaciller. C’est alors que Durant tira son sabre et se précipita au secours du propriétaire de L’Iguanodon Éméché.
Elle asséna un coup fatal à l’Harpactognathus qui se détourna de Rosse en premier pour l’attaquer elle a la place, trancha l’aile d’un autre et enfin, vint a bout du troisième en lui portant un coup d’estoc en travers de la gorge, faisant gicler du sang droit vers son visage.
Lorsqu’il s’affaissa contre elle, Durant repoussa le corps et se tint là un instant d’un air hébété, haletante et les membres tressaillants alors que l’adrénaline continuait d’affluer à travers son organisme. Ross lui adressa un regard reconnaissant.
Durant reprit ses esprits et regarda en direction des portes du Centre vers où les civils continuaient d’affluer.
— Vite, montez ! Dit-elle au tavernier.
Elle essuya d’un revers de la main le sang sur sa bouche et suivant à reculons le tavernier, la garde revint vers les marches.
Ce n’était que de justesse que Zach et Gray avaient évités de figurer parmi les victimes de la charge des pachyrhinosaures. Au dernier moment, ils s’étaient abrités avec d’autres derrière le même tramway sur lequel le Quetzalcoatlus ayant pris à revers le contingent de la Garde avait bondit et dont l’attelage avait réussi à s’enfuir juste avant la charge en elle-même en déraillant légèrement le véhicule.
Le premier des animaux à emprunter l’Avenue, renversant les personnes sur son passage tel une boule de bowling mettant à bas des rangées de quilles et s’étant dirigé alors vers le trottoir ouest, avait percuté par inattention le tramway de plein fouet, le faisant pivoter de manière à être oblique par rapport à l’axe de l’Avenue mais le second, dont la vue avait été gênée par la foule en mouvement devant lui, était rentré également de ce fait en plein dans le véhicule, le faisant davantage pivoter et ce dernier avait fini par se retrouver perpendiculaire à l’Avenue avec sa moitié antérieure reposant sur le trottoir, poussant tout du long Zach, Gray et leurs compagnons d’infortune à suivre les mouvements du véhicule s’ils ne voulaient pas finir écrasés. Ainsi, les autres pachyrhinosaure, ne pouvant pas passer par l’espace laissé entre le tramway et l’arcade ouest, furent contraints de passer soit au milieu de cette dernière soit du côté est de l’Avenue. Le tramway ayant été quelque peu instable du fait de sa position, il s’était renversé suite au heurt suivant et les Mitchell s’étaient retrouvés dos au toit.
Au moment où ils avaient voulus quitter leur abri après que les pachyrhinosaures eussent braqués à l’est au bout de l’Avenue, les Quetzalcoatlus étaient revenus mais cette fois-ci accompagnés par leurs anciens colocataires de volière. Leur arrivée avait poussé le petit groupe à aller se réfugier dans le bâtiment le plus proche, un restaurant où ils s’étaient cachés au milieu des box.
Une minute ou deux s’écoulèrent au cours desquelles ils restèrent ainsi, jusqu’à ce que des Harpactognathus n’entrent dans le restaurant par une fenêtre brisée et attirés par la nourriture abandonnée dans les assiettes, ne commencent à marcher dans les allées, bondissant sur les tables de temps à autre pour aller se nourrir d’une saucisse ou d’un morceau de steak en renversant parfois le couvert, faisant sursauter les humains cachés à quelques mètres d’eux.
Sur les nerfs, certains se mirent à sangloter, ce qui attira les ptérosaures à face noire qui les débusquèrent. Dans le tohu-bohu qui suivit au cours duquel des tables furent renversées, le reste du mobilier ravagé et où des assiettes pleines de nourriture et des couteaux fusèrent en direction des Harpactognathus, Zach et Gray furent séparés des autres et lorsqu’ils sortirent du restaurant par où ils étaient entrés, ils furent surpris de se retrouver entre deux pachyrhinosaures à leur retour dehors.
Ils étaient devenus comme enragés et celui sur leur droite ne cessait de bramer alors qu’il essayait de charger entre les colonnes de l’arcade pour atteindre des visiteurs recroquevillés contre un mur. A un moment donné, il abandonna et disparut derrière l’Emporium. De son côté, l’autre était en pleine confrontation avec des gardes.
Alors qu’ils passaient rapidement derrière le cératopsien, Gray vit ce qui se trouvait derrière les soldats.
— Zach ! Cria-il soudainement pour l'avertir d'un danger.
Avant que l’aîné ne puisse apercevoir ce qui le menaçait, son frère le tira par le bras sur le coté et au même moment, le pachyrhinosaure s’écarta sur la droite, révélant au jeune homme le marauder qui se tenait à l’autre bout de l’Avenue, son canon braqué droit dans leur direction. Il entendit un objet passer tout prêt de lui et si rapidement qu’il siffla dans son oreille. D’un coup, Zach ressentit alors une sensation vive et brûlante au niveau de la joue gauche qui lui fit geignir de douleur. Par réflexe, il porta une main au niveau de cette derniere et sentit alors du sang s’écouler le long d’une entaille longue d’une demi-douzaine de centimètres.
Son frère venait de le sauver d’une flèche d’acier, flèche dont les barbillons de la pointe venaient d’érafler la joue du jeune homme. Le projectile quant à lui, avait continué sa trajectoire pour aller se ficher au milieu de la barrière récifale séparant le Lagon du mosasaure de celui de l’Aquarium de l’Enfer.
Alors qu’ils se tenaient debout au milieu de la chaussée encore à réaliser le fait que Zach avait failli été tué par mégarde, un des Quetzalcoatlus encore dans les airs les repéra au milieu de la confusion environnante et les prit en chasse.
En apercevant une grande ombre derrière la fumée descendre vers eux depuis le nord de l’Avenue, Zach et Gray détalèrent une nouvelle fois vers la Promenade. Le reptile volant émergea rapidement de la fumée, et commença à voler en rase-mottes, les rattrapant à une vitesse folle et ne se préoccupant guère de tous ceux sous sa trajectoire qui durent s’accroupir. Cela donna une idée aux garçons.
Au moment où le ptérosaure ouvrit le bec pour attraper Gray, lui et son frère se jetèrent sur le côté.
Le reptile volant, gêné par sa propre taille et n’étant pas doté des mêmes capacités de manœuvre dans les airs qu’un oiseau, n’eut pas d’autre choix que de continuer tout droit et de reprendre de l’altitude avant de tourner pour amorcer une nouvelle tentative.
Mais à l’instant où il se préparait à replonger, deux flèches vinrent se ficher dans sa poitrine dont l’une droit au cœur.
Zach regarda en direction du sommet de l’un des toits voisins et y vit l’un des gardes, une femme svelte assez grande, arc en main orienté vers le ptérosaure.
Le Quetzalcoatlus recula en battant des ailes puis, quand il fut haut au-dessus de l’Avenue, il commença à perdre progressivement le contrôle de ses fonctions motrices. Lorsqu’il n’arriva plus à voler, le ptérosaure lâcha alors un cri désespéré qui se tut dans un râle étouffe. Puis, son corps chuta et alla droit s’écraser dans le toit de chaume d’une tour à l’est de l’Avenue.
Darbinian regarda le ptérosaure glisser et tomber jusqu’à la chaussée avant d’être surprise par un bruit de pales tournants et de moteur rugissant.
En regardant le ciel, elle vit le dernier hélicoptère de tourisme perdre rapidement de l’altitude en tournoyant. Les ptérosaures étaient également venus à bout de cet appareil et ce dernier se dirigeait vers la surface de l un des lagons.
Aussitôt que l’hélicoptère percuta la surface et commença à lentement sombrer, l’attention de Darbinian fut attirée par un ensemble de cris, humains, provenant de la Promenade.
Voulant savoir ce que était, elle s'avança de quelques mètres et vit un pachyrhinosaure sur le point de faire tomber l’un des tramways, stoppé juste à côté du lagon de l’Aquarium de l’Enfer. L’attelage avait été libéré plus tôt par des soigneurs mais le tramway lui-même était remplit de passagers effrayés, n’osant sortir de peur d’être tué par le cératopsien fou.
La Russe aurait bien voulu se précipiter au secours de ces derniers et hurler à ses collègues de tirer sur le pachyrhinosaure mais elle savait qu’il était trop tard car le véhicule bascula un instant plus tard. Détournant le regard de cette scène accablante parmi tant d’autres, elle se décida plutôt à aller sauver ceux qu’elle pouvait.
Alors que le tramway coulait rapidement en raison de son poids, ceux qui étaient à l’intérieur se dépêchèrent de nager en dehors mais dès qu’ils sortirent la tête hors de l’eau, une formation d’Harpactognathus vint les harceler, mordant et griffant, tentant à plusieurs de saisir un visiteur ou deux et les emporter hors du lagon non sans peine.
Tandis que le tumulte que cela provoqua attirait l’attention des habitants du bassin, ceux que les Harpactognathus ne harcelèrent pas se mirent alors à chercher une issue.
Ne voyant aucune échelle de là où ils étaient, le désespoir les gagna et poussa certains à crier à l’aide.
Des ombres longilignes, celles des petits Mosasauridae et des poissons prédateurs vivant là, passèrent à quelques mètres sous eux, et remontèrent doucement. Certains ressentirent même quelque chose leur frôler les pieds ou le mollet. Non loin, le sommet d’ailerons ou de nageoires caudales commencèrent à fendre la surface de l’eau.
Soudain, l’un des touristes ouvrit la bouche en grand comme s’il voulait hurler mais avant qu’il n’eut l’occasion de faire ceci, il disparut sous la surface de l’eau. N’étant alors dans le champ de vision de personne, on ne remarqua sa disparition que trop tard et ce ne fut que lorsqu’un petit mosasaure de la taille d’un gros crocodile et au corps gris clair rayé de noir, un Platecarpus, fit surface pour aller saisir à la gorge l’un des passagers qu’ils réalisèrent le piège mortel dans lequel ils avaient été poussés.
Excités par l’odeur du sang, les prédateurs se jetèrent avec davantage de férocité sur les visiteurs et au lieu de se les partager, chacun s’empara d’une proie et l’emporta sous l’eau.
Seule une jeune femme parvint à atteindre la barrière récifale. Elle tenta de s’agripper aux faux coraux pour grimper mais en vain, la structure étant trop glissante. L’un des Harpactognathus vit son désespoir et vola vers elle mais juste après qu’il ait commencé à lui mordre le bras droit, un Platecarpus subadulte vint refermer ses mâchoires sur sa jambe. En tirant dessus, il entraîna la jeune femme sous l’eau alors qu’elle tenait son bras droit écorché levé, la main grande ouverte vers le ciel et qu’elle criait à l’aide tout en buvant à moitié la tasse.
Depuis la sécurité du tunnel courant au sein de la barrière récifale entre ce lagon et celui du mosasaure, d’autres touristes fuyant vers le Mont Thétis ne purent s’empêcher de contempler épouvantés cette curée au milieu d’un nuage de sang ne faisant que grossir jusqu’à masquer la scène.
De l’autre côté de la barrière récifale, l’hélicoptère continuait de couler vers les profondeurs alors que la lumière baissait rapidement sous et au-dessus de l'eau.
A l’intérieur, l’eau s’était infiltrée et avait submergé l’habitacle à la moitié déjà, menaçant de noyade les passagers et le pilote s’ils ne sortaient pas.
Dans un premier temps, ils parvinrent à s’accorder tant bien que mal, certains craignant ce qui se trouvait dans ce lagon même s’ils ne savaient plus exactement dans lequel ils étaient tombés, sur la décision d’ouvrir la porte de l’habitacle et de nager jusqu’à la surface mais au moment même où ils allèrent faire coulisser la porte, celui ayant la main sur la poignée se figea de terreur.
Au travers du hublot, il vit le mosasaure se détacher du fond du lagon pour remonter lentement vers eux.
Sous l’eau, personne ne les entendit crier.
Le mosasaure commença par nager autour de l’hélicoptère, décrivant des cercles de plus en plus resserrés, puis s’étant assuré ainsi que cette entité n’était pas agressive, il approcha sa tête pour inspecter l’appareil avec beaucoup de curiosité.
Lorsque son énorme pupille ronde et sombre croisa le regard de chacun des passagers, l’horreur les saisit.
Le mosasaure devait croire qu’elle était confrontée à une nouvelle forme d’enrichissement du milieu et qu’on attendait d’elle à ce, qu’à la manière d’une loutre devant trouver le moyen d’atteindre un morceau de nourriture contenu dans un petit bloc de glace, qu’elle trouve le moyen d’ouvrir l’hélicoptère afin d’accéder à la « récompense » qu’ils étaient.
Ainsi, il commença par toucher l’appareil du bout du museau avant de le mordre, arrachant des morceaux de tôle pour les recracher ensuite.
Voyant que cela allait vite devenir laborieux, le mosasaure cessa cela et changea de stratégie. Il s’éloigna jusqu’à l’autre bout du lagon avant de revenir en nageant à toute vitesse et de venir heurter de flanc l’hélicoptère. Voyant que cela n’eut pour effet que de le faire couler plus rapidement, le reptile opta pour une autre technique.
Poussant l’appareil à coups de museau, il l’emmena droit vers la barrière récifale contre laquelle il alla fracasser l’hélicoptère.
La barrière étant en vérité constituée de béton, le choc déchira les tôles et fit sauter les rivets, laissant l’eau entrer en masse à l’intérieur de l’hélicoptère et finir de submerger l’habitacle.
Dans sa tentative d’ouvrir l’appareil, le squamate racla celui-ci jusqu’à la baie vitrée la plus proche.
Bien que conçue de manière à pouvoir retenir un volume important d’eau, elle fut mise à rude épreuve par les assauts répétés du reptile sur l’hélicoptère qui se répercutaient contre elles et à un moment, des fissures, de petite taille dans un premier temps, commencèrent à apparaître, laissant quelques gouttes pénétrer dans le tunnel.
Mais plus le mosasaure s’acharnait sur l’hélicoptère, remuant son museau dans l’habitacle déformé, plus les fissures s’agrandirent sous le regard horrifié des personnes présentes dans le tunnel, laissant d’abord l’eau s'y infiltrer par minces filets puis par petites cascades et enfin par jets entiers. Puis arriva le moment où la vitre céda et ce fut un véritable torrent rugissant d’eau salée qui passa dans le tunnel.
En l’espace de quelques instants, son entièreté fut submergée et nombre de ceux qui s’y trouvaient furent entraînés avec violence jusque dans les galeries voisines, menacées de submersion à leur tour. Si les flots n’étaient pas stoppés, c’était une grande partie des profondeurs, dont les salles du Mont Thétis, qui allait être englouties et des centaines de personnes condamnées à la noyade.
Bien que ce genre de situation ait été considérée jusque-là comme ayant peu de chances d’arriver, les ingénieurs de Jurassic World avaient tout de même envisagés sa possibilité et intégrer aux systèmes du parc un protocole de sécurité visant à isoler une pièce ou un tunnel compromis au moyen de lourdes portes se fermant automatiquement en cas d’inondation. Malgré leur prévoyance à ce sujet, ils avaient sous-estimés l’un des paramètres qu’était la vitesse d’évacuation.
Ainsi, lorsque les portes s’activèrent au bout d’un certain temps renseigné dans le programme, elles se refermèrent alors que des visiteurs continuaient d'affluer hors du tunnel, plongé désormais dans une lumière tamisée rougeâtre oppressante et non plus dans la pénombre bleutée apaisante des fonds marins.
Pris au piège, ils se mirent à tambouriner contre les portes, regardant désespérément au travers du hublot de ces dernières, tentant de se faire repérer par les caméras de surveillance des pièces voisines.
— Des gens se noient dans le tunnel TN. Déclara l’un des techniciens sur un ton alarmé. Je vais tenter de contourner le système afin de déverrouiller les portes. Ajouta-il alors qu’il pianotait frénétiquement sur son clavier, commençant à rentrer des mots de passe et écrire des requêtes.
— Fais-ça et l’eau va se répandre à travers les salles et tunnels voisins, la situation quant aux brèches dans les parois du Mont Thétis empirera. Le dissuada l’un de ses collègues, lui rappelant les dégâts infligés par le séisme à la fausse montagne sous-marine. Maintenant Il y a plus de cinq cent personnes là bas et presque deux mille dans le reste des Profondeurs.
Les deux se mirent à débattre avec virulence, le premier faisant appel à la compassion et le second au pragmatisme en montrant de multiples rapports d’anomalies de pressurisation et de diagrammes montrant certaines salles des profondeurs clignoter en rouge.
Regardant impuissant les images provenant des rues de Burroughs ou des lagons et montrant les créatures du parc répandre la mort et la désolation, Masrani était complètement épouvanté et cachait sous sa main les larmes coulant en abondance sur son visage.
A quelque pas de lui, Cruthers fut soudain attiré par l’une des retransmissions vidéos affichée sur l’écran de son poste, montrant l’atrium du bâtiment administratif et quelques créatures ailées y avançant par bonds ou en marchants telles des chauve-souris au sol.
— On a des Harpactognathus dans l’Atrium ! Avertit-il tout le monde.
Hoskins se tourna immédiatement vers lui.
— Envoyez-y des agents !
Le directeur de la division sécurité bondit ensuite derrière le poste de Cruthers.
— Par où sont-ils entrés ? Demanda-il.
Le technicien en chef lui fit part de sa supposition que les ptérosaures aient pénétrés à l’intérieur de l’Administration via les brèches béantes laissées suite au séisme dans les salles les plus proches de l’extrémité du promontoire.
— Tous les agents sont occupés ailleurs. Lança Harriman. Du moins, tous sauf Oraka et Bailey. Précisa-il en regardant les deux agents postés devant la porte de la salle.
Hoskins réfléchit un court instant puis un air résolu se dessina sur son visage grave.
— Messieurs Cruthers et Harriman. Je vous laisse le commandement le temps que j’aille régler la situation.
Avant de partir, il se pencha vers Cruthers et Krill.
— Veillez sur lui. Leur souffla-il à voix basse, parlant de Masrani.
Il quitta la salle de contrôle et lança aux deux agents :
— Avec moi !
L’un d’eux passa une arme de poing à Hoskins et ils s’élancèrent dans les couloirs en courant, se dirigeant vers l’Atrium d’où des cris leur parvenaient.
Fin partie 2
Dernière modification par The Geeky Zoologist (30-08-2018 15:49:25)
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
Hors ligne
Suite et fin, après un peu de retard je le concède, du Chapitre XII
Bonne lecture.
Chapitre XII : Assaut sur Burroughs (partie 3/3)
Distancés par les Harpactognathus quelque part au milieu des Champs Centraux, Dearing et Grady avaient malgré tout continuer à rouler en direction de Burroughs, tournant d’abord vers l’Est, sortant de la Réserve non loin de la volière de la rivière avant d’emprunter dans un premier temps la route descendant les falaises à ce niveau, puis le pont franchissant la rivière plus au sud et enfin le réseau de voies souterraines courant sous le Zoo. Ils sortirent du dit réseau au niveau d’un petit parking au nord des gradins du spectacle nocturne et y garèrent leur jeep avant de sortir prudemment du véhicule et de se mettre à suivre l’allée allant en direction de l’étang alors que des cris leur parvenaient de Burroughs.
Ils n’atteignirent même pas l’extrémité de l’allée que leur route croisa celle d’un Mantellisaurus. L’animal, portant toujours son harnais, ne leur prêta pas attention et disparut aussitôt dans la végétation dense, se contentant de continuer à s’éloigner en courant le plus loin possible de la Cité.
Atteignant le pied des gradins, ils se mirent à trotter en direction du carrefour où se trouvait l’infirmerie des visiteurs, rencontrant en chemin quelques visiteurs ou employés fuyant aussi la Cité. Alors qu’ils avaient dépassés les deux tiers des gradins, un groupe de visiteurs se mit à sortir précipitamment du Multiplexe cinématographique et comme les chassant du bâtiment, un pachyrhinosaure sortit à son tour, par la grande brèche qu’il avait créé en chargeant la grande baie vitrée du hall d’entrée. Le groupe se dirigea alors vers le pied des gradins et les poursuivant, le cératopsien se retrouva alors à charger en direction de Dearing et de Grady.
— Par les gradins ! Vite ! Siffla le soigneur à sa compagne.
L’herbivore franchit les cent cinquante mètres les séparant d’eux en l’espace de moins de dix secondes, poussant sur sa route certains des fuyards à plonger dans l’étang. Ainsi à peine Dearing et Grady eurent-ils atteints la troisième rangée de strapontins que le pachyrhinosaure chargea de plein fouet les deux premières rangées, envoyant voler des dossiers de strapontins tout autour. Dans son agressivité, il tenta d’atteindre les deux compagnons mais les gradins gênant considérablement sa progression, il abandonna.
Le pachyrhinosaure les empêchant d’atteindre l’infirmerie par le quai, Dearing et Grady entreprirent de l’atteindre en passant par les jardins suspendus du Grand Nublarian.
Après avoir progressé au milieu de ces derniers pendant un temps tout en se cachant au milieu des buissons ou des bosquets denses à chaque fois que des ptérosaures les survolaient, ils atteignirent une sorte de petit belvédère donnant sur l’Ouest.
De là, ils avaient vue sur la Promenade, l’Avenue Richard Owen et la Place de l’Obélisque ainsi que sur le chaos qui s’était emparé de la Cité. La vallée entière résonnait de cris. Là où l’on riait, on pleura ; là où l’on jouait, on se battit pour sa vie ; là où l’on mangeait, on fut mangé…
Dans le ciel, une partie des Quetzalcoatlus écumaient les cieux tout en regardant en direction du sol à la recherche de proies faciles, évitant parfois les tirs des canons de marauders qui avait déjà emporté l’un d’eux, atteint en plein poitrail et dont le corps était parti s’écraser dans l’une des maisons du Quartier Résidentiel Ouest. Dearing et Grady virent à un moment l’une des cigognes de l’Enfer monter à la verticale vers les cieux, un garde dans son bec, et une fois qu’il fut suffisamment haut, le ptérosaure lâcha sa proie à leur surprise. Le garde tomba dans le vide pendant de longues secondes avant qu’un autre Quetzalcoatlus ne surgisse pour l’empaler en pleine chute sur le bout de son bec. Le ptérosaure se dirigea alors vers le congénère qui avait lâché le soldat, décrivit un arc de cercle au-dessus de lui et fit glisser sa victime du bout de son bec, la laissant tomber. Elle fut rattrapée une fois encore et le garde fit ainsi l’objet d’un jeu macabre entre les deux ptérosaures géants pendant de longs instants mais plus il observait la scène, plus Grady trouvait que cela rassemblait en vérité à une forme de parade nuptiale. Une forme assez glauque en convint-il. Au bout d’un certain temps, les deux animaux abandonnèrent leur victime, laissant son corps déchiqueté tomber droit vers les tuiles de l’une des résidences du Quartier Résidentiel Ouest.
Dans le nord, le Sibo grondait toujours et on ressentit parfois les répliques engendrées par le séisme.
Au-delà du sommet du Plateau Méridional, on parvenait à distinguer la lumière déclinante du jour puisque le nuage émit par le Sibo étant surtout poussé vers le sud et l’est, l’ouest de l’île n’était pas passé dans son ombre et le Soleil l’illuminait toujours là où les ténèbres s’étaient abattues sur Burroughs.
Le regard de Dearing se porta sur l’infirmerie des visiteurs, alors en proie aux flammes.
— L’infirmerie. Pointa-elle. Qu’ils aient été évacués je vous en supplie.
— Claire !
Grady lui montra une petite formation d’Harpactognathus en train de voler droit dans leur direction depuis le sud. Ils avaient été repérés.
— Le Chicxulub ! S’écria-elle, parlant de leur voie de secours la plus proche.
La terrasse de toit de la boite de nuit se trouvait à une douzaine de mètres du belvédère, en contrebas d’un mur en pierre recouvert de lianes.
Ils s’élancèrent alors dans cette direction, sautant du haut du mur avant de foncer vers l’escalier menant à la salle principale de la discothèque, le dévalant en vitesse alors que les ptérosaures se posaient en haut des marches.
Une fois arrivés en bas, ils fermèrent la porte au museau des Harpactognathus qui avaient bondit dans l’espoir de les rattraper. On les entendit percuter le battant et n’attendant pas qu’ils trouvent un moyen d’ouvrir la porte, Dearing partit chercher une petite table pour la mettre derrière le battant tandis que Grady était collé contre ce dernier, l’empêchant de bouger.
Une fois la table positionnée de manière à bloquer l’ouverture du battant, les deux se retournèrent vers le cœur de la grande salle, caractérisée par la présence d’un plafond-écran sur lequel des petits astéroïdes fendaient en continu un ciel nocturne étoilé, précédant un plus gros se rapprochant inexorablement tandis que les murs étaient peints de manière à évoquer une forêt du Crétacé, donnant l’impression aux clients de faire la fête à la veille de l’Apocalypse qui fit éteindre les dinosaures non-aviens il y a plus de soixante-cinq millions d’années.
Lors des soirées, des brumisateurs disséminés dans la salle diffusaient une brume donnant au lieu un côté inquiétant, côté renforcé par les ossements de dinosaures et les épaisses fougères faisant partie de la décoration.
Pour rejoindre la porte d’entrée, ils devaient d’abord descendre quelques marches jusqu’à la piste de danse, traverser celle-ci puis remonter vers la plateforme à l’opposé d’eux et par où on accédait à l’établissement depuis le quai.
Alors que les seuls bruits perceptibles jusque-là étaient ceux de leur pas sur la piste de dance, ils entendirent des pieds de chaises racler sur le sol au niveau de l’une des plateformes les surplombant. Quelque chose les avait déplacés mais la pénombre régnante les empêchait de voir ce dont il s’agissait. Ils n’étaient pas seuls dans le Chicxulub.
Peu importe ce que c’était, ils n’avaient aucune raison de s’attarder là et Grady enjoignit Dearing à presser le pas.
La laissant le distancer de quelque pas, il jeta un dernier coup d’œil en direction de la plateforme où les chaises avaient bougés. Il ne vit rien.
Mais où moment où il ramena le regard en direction de Dearing, son ouïe perçut un bruit peu audible mais distinct, celui de griffes raclant le sol. Se rendant compte que l’animal à lequel elles appartenaient était en train de se déplacer rapidement, il pivota sur lui-même, juste à temps pour voir un Harpactognathus planant droit sur lui mais avant qu’il ne puisse réagir, le ptérosaure le renversa et se posa au-dessus de lui.
Pris par surprise, Grady avait lâché sa carabine pendant l’attaque et il ne pouvait pas atteindre non plus son poignard car le reptile claquait des mâchoires en direction de son visage, poussant le soigneur à maintenir la tête de l’Harpactognathus à distance à l’aide de ses deux mains.
— Arrière, pédé ! Rugit Grady tout en étranglant le reptile.
Mais c’est alors que Dearing s’empara de la carabine et frappa le crâne du ptérosaure d’un puissant coup de crosse, l’assommant presque et alors qu’il se remettait de ce coup et jappait, la directrice se dépêcha de le mettre en joue. Au moment même où le reptile allait répliquer, elle lui tira dessus en plein poitrail à trois reprises. Bien que le premier tir fut fatal, elle craignait de n’avoir pas fait mouche et de manière presque mécanique, elle avait tout de suite appuyé sur la détente.
Lorsque le ptérosaure eut émis son dernier souffle, Dearing se détendit et eut l’envie soudaine de lâcher un rire nerveux dans le feu de l’action. Malgré les années passées, elle savait toujours manier la carabine.
— D’enfer… Ne put s’empêcher de lâcher Grady.
Le regard de Dearing croisa le sien et elle vit qu’il la regardait avec une certaine admiration non dissimulée. Elle tendit la main et l’aida à se relever.
— Merci. Dit-il.
Ils échangèrent un regard intense et si la situation n’était pas aussi urgente, il était certain qu’il l’aurait embrassée sur le champ. Les cris à l’extérieur leur rappelèrent l’urgence de la situation et ils sortirent alors de la boîte de nuit.
Sous le porche du Casino, ils retrouvèrent l’un des gardes, protégeant le groupe de civils qui s’était massé derrière lui. Il leur faisait signe de venir vers lui et ils le rejoignirent.
— Où sont les patients de l’infirmerie ? S’empressa de lui demander Dearing.
— La J-SEC les a évacués suite au séisme. Ils devaient être parmi la foule dans l’Avenue lorsque les Cigognes de l’Enfer ont commencées leur attaque. Puis ça été un tel chaos… Vos neveux peuvent être n’importe où maintenant. J’espère pour eux et pour vous qu’ils ne sont pas restés à l’Avenue. C’est devenu une véritable zone de guerre…
— Je crains fortement qu’ils y soient toujours. Dit Grady. Merci. Tenez-bon !
Avant que le soldat n’ait eu le temps de les dissuader de se rendre là-bas, Dearing et Grady s’élancèrent vers le quai sur la rive sud de l’étang, longeant en courant la devanture des boutiques s’y trouvant alors qu’au-dessus, un pachyrhinosaure ravageait les jardins des terrasses et que les flammes se propageaient en direction du nord de l’Avenue Richard Owen.
Réfugiés dans une boutique dont l’entrée était à vingt mètres de l’extrémité nord de l’Avenue avec d’autres visiteurs, Zach et Gray observaient le chaos faisant rage dehors.
Devant la devanture, un garde armé d’un sabre et muni d’un bouclier faisait face à deux Harpactognathus et le combat empêchait les survivants de quitter le bâtiment. Alors que son issue semblait incertaine, on commença à tousser à cause de la fumée d’un feu voisin qui commençait à arriver en abondance.
— L’incendie se rapproche. Dit l’un des survivants entre deux quintes de toux. Nous allons finir asphyxiés sinon grillés si on ne sort pas d’ici…
Alors que l’oxygène se raréfiait dans la boutique, le groupe regarda les protagonistes poursuivre leur lutte.
Au moment où le garde triompha des ptérosaures, quelqu’un cria :
— Maintenant !
Et ils sortirent de la boutique, courbés par les toussotements dont ils étaient victimes, passèrent derrière le garde et tournèrent sur leur droite, courant à toutes jambes au milieu de l’arcade.
En se retournant, l’un des survivants s’aperçut que les gardes étaient en train de perdre du terrain mais au niveau de la Place de l’Obélisque la situation n’était guère mieux.
Un pachyrhinosaure avait enfoncé le périmètre défensif et luttait désormais contre un groupe de fantassins. Là où des lanciers le maintenaient à distance, les tireurs se démenaient pour trouver un angle de tir favorable. Non loin, un cavalier était aux prises avec un Quetzalcoatlus, piquant de sa lance le bec du ptérosaure à chaque fois que ce dernier tentait de l’empaler lui ou sa monture.
Mais les portes du Centre de la Découverte, au travers desquelles s’engouffraient en continu des fuyards, étaient en vue et tant qu’elles étaient défendues, ils devaient tenter leur chance et traverser la Place.
Un puissant mugissement augmenta le sentiment de détresse dont ils étaient pris.
Le pachyrhinosaure s’était dressé sur ses deux pattes arrière et après avoir poussé son cri, il fit quelques pas vers les lanciers et abattit ses pattes antérieures sur les boucliers de ceux juste devant lui, les aplatissant au sol. Avant que le reste de ses adversaires n’ait eu le temps de reculer, le cératopsien les renversa violemment d’un coup de collerette et s’avança vers l’un des tireurs le bec grand ouvert. Il le referma sur le bras de ce dernier et tandis que le malheureux hurlait de douleur tout en donnant des coups de poignards en direction des yeux, le pachyrhinosaure le secoua dans tous les sens, tordant et déboîtant le bras durant le processus avant de le briser en deux mais soudain, l’herbivore relâcha sa victime, émit un jappement et s’écarta brusquement : Avant de tomber inconscient, le garde avait réussi à lui poignarder l’œil droit.
Alors que la douleur paralysait sur place le pachyrhinosaure, les survivants profitèrent de l’occasion pour foncer vers les portes mais dans leur course, ils ne virent que trop tard le même Quetzalcoatlus affronté par le cavalier fuir vers l’Avenue, passant au milieu du groupe au passage et saisissant au passage celui qui était devant Gray alors que le garde monté s’était lancé à sa poursuite. Lorsqu’il menaça de percuter le groupe, le cavalier tira fermement sur les rennes de son cheval et ce dernier se cabra un peu avant de tourner bride pour les contourner.
Lorsqu’ils reportèrent leur regard vers les portes, ils virent leur voie de salut bloquée par le pachyrhinosaure borgne. Sa blessure l’avait rendu encore plus fou qu’il ne l’était davantage et entretemps, il s’était frayé un chemin parmi les fuyards en empruntant l’une des rampes jusqu’au sommet de la plateforme.
Les deux gardes qui défendaient les portes avaient été pris de court et là où l’un, une américaine, avait pu se réfugier dans le vestibule, l’autre, un costaricain, s’était retrouvé piégé dehors entre le pachyrhinosaure et les fuyards.
Le groupe de Zach et Gray balaya du regard le reste de la façade du bâtiment. Ils ne pouvaient pas non plus passer par les portes vitrées menant à la file d’attente du dôme IMAX et à la boutique du centre car là où un tas de gravats obstruait la deuxième, le système d’ouverture de la première s’était endommagé et la porte n’avait pu s’ouvrir que de quelques centimètres avant de se bloquer. Bien que leurs tentatives n’aient eu pas encore donné de résultat probant, des visiteurs et des employés tentaient de casser les vitres à l’aide de pierres.
En haut des marches, le pachyrhinosaure mugit et se dressa sur ses pattes arrières comme pour se préparer à piétiner le garde impuissant qui se tenait devant lui mais c’est alors qu’il se tut soudainement lorsqu’une grande flèche d’acier, tirée par le marauder qui était revenu entretemps au niveau de la Place, vint percuter son thorax, s’enfonçant droit dans les organes vitaux.
Tandis qu’on rechargeait le canon du marauder, le garde dit aux fuyards de s’écarter sur le côté mais le cératopsien, encore vivant, se remit sur ses quatre pattes et la respiration sifflante, s’avança de quelques pieds en direction des marches et émit un autre mugissement, cette fois-ci davantage plaintif que menaçant, avant de recevoir un autre trait entre les côtes. L’animal vacilla, s’effondrant sur son flanc droit puis, entraîné par un mouvement de glissade, dévala l’escalier. Là, un garde se précipita aussitôt vers lui pour abréger ses souffrances au moyen d’un tir de fusil à gros calibre dans l’œil, atteignant directement le cerveau. Juste avant qu’il n’appuie sur la détente, on prit soin de détourner le regard des enfants présents à proximité ou de leur couvrir les yeux mais les seuls sons de la créature rendant son dernier souffle et de la détonation suffirent à les épouvanter.
Malgré ce que le pachyrhinosaure avait fait, rare étaient ceux qui ne furent pas accablés par sa mort car la scène résumait toute la tragédie des événements qui frappèrent Jurassic World.
En glissant parmi les marches, le corps du pachyrhinosaure s’était mit en travers d’une grande partie de l’escalier et ceux qui comptaient rejoindre les portes depuis le bas des marches devaient dorénavant grimper par-dessus ce nouvel obstacle, ce corps de plus sur lequel on trébuchait dans sa fuite.
La voie enfin sécurisée, le groupe s’élança en direction des portes alors que les gardes chargés de la défense de la Place se réorganisaient tant bien que mal et le cavalier qui avait pourchassé le Quetzalcoatlus envoya l’un d’eux, un Français d’une trentaine années et élancé, dans l’Avenue pour informer leurs collègues de l’évolution de la situation à ce niveau.
Après avoir escaladé en vitesse le corps du pachyrhinosaure et être passés entre les deux gardes tenant fermement leur position sur la plateforme, les Mitchell et leur groupe franchirent enfin le seuil des portes et s’engouffrèrent à l’intérieur de la bâtisse, suivant les autres fuyards en direction de la rotonde.
Là, un agent de sécurité pointait la direction à suivre et leur criait :
— Aux niveaux inférieurs ! Allez aux niveaux inférieurs !
Alors qu’ils suivaient la direction des escaliers, ils virent un gradé de la J-SEC en train d’invectiver deux subalternes qui avaient abandonné leur poste. Les deux présentaient une trace de coup sur le visage.
— Retournez à votre poste espèces de sacs à foutre ! Si je vous retrouve à vous terrer, je vous jure que c’est avec deux balles dans le dos que vous allez quitter l’île espèces de sales rats !
On entendit un bruit de verre brisé.
— Les ptérosaures sont dans le bâtiment ! Hurla l’agent dans la Rotonde.
Des cris d’Harpactognathus résonnèrent dans les couloirs et les halls.
Courant au milieu de l’arcade ouest afin d’éviter d’avancer à découvert, le caporal Vincent Chapuy se dirigeait vers l’extrémité sud de l’Avenue. Envoyé par Temba après la mort du pachyrhinosaure, il cherchait avec insistance le lieutenant Brunet.
Durant sa progression, il regarda à l’intérieur de chacun des bâtiments qu’il longea. Certains, ceux qui offraient généralement le moins de cachettes, étaient vides et dans d’autres, à l’inverse très meublés, il y avait encore nombre de touristes et d’employés terrorisés n’osant pas sortir malgré la menace des incendies voisins.
— Sortez ! Sortez tant qu’il en est encore temps ! Leur cria-il.
Là où certains s’exécutèrent, d’autres décidèrent malgré tout de rester. Mais Chapuy devait retrouver Brunet au plus vite et n’insistant pas à contrecœur, il poursuivit sa route.
Après avoir descendu les deux tiers de l’Avenue, il revit enfin Brunet. Ce dernier se tenait sur le seuil d’un fast-food, prêt à donner l’ordre à une partie de son équipe d’escorter le groupe de civils, au nombre d’une cinquantaine, qu’ils avaient rassemblés dans la salle de repas principal.
L’établissement était l’un des bâtiments de cette partie de l’Avenue qui résistait le mieux aux incendies. Ainsi là où les flammes commençaient à peine à lécher le mobilier de l’étage supérieur, les constructions voisines n’étaient plus que des brasiers en devenir.
Chapuy héla son officier supérieur en français :
— Lieutenant !
— Oui, caporal Chapuy.
— La place est compromise. Le pachy a neutralisé une trop grande partie de notre équipe. Ce qui reste ne pourra plus tenir encore très longtemps.
— Bon sang ! Drekanson et Maathai sont occupés à défendre ceux dans le casino et nous menaçons d’être à court de munitions de notre côté.
Brunet tourna la tête en direction de la chaussée et tandis que quelques soldats tenaient les animaux à distance, il balaya la traînée de corps sans vie jonchant la voirie et son regard se porta plus particulièrement sur ceux des gardes et des agents de la J-SEC tombés durant les combats. Des cris attirèrent son attention : Les Harpactognathus s’étaient regroupés en nombre suffisant et menaçaient de submerger les gardes supposés les couvrir pendant l’évacuation du groupe de civils.
— Nous sommes en train de perdre les rues… Ajouta-il
D’autres cris retentirent plus bas dans l’Avenue, des cris de terreur, poussés par les visiteurs piégés dans un bâtiment en train d’être consumé par les flammes, celui situé juste en face de l’Emporium, et à quelques mètres duquel deux Quetzalcoatlus attendaient avec une tranquillité déroutante, comme si la fumée ne les incommodait pas le moins du monde et qu’ils comptaient laisser les humains brûler vifs pour ne se repaître de leur chair grillée que plus tard, lorsque le bâtiment se sera effondré sur lui-même et que l’incendie aura considérablement perdu en intensité.
— Préparez-vous à faire sonner la retraite. Ordonna Brunet à Chapuy en anglais.
Chapuy lui lança un bref regard incertain puis saisit le cor qu’il portait en bandoulière, s’apprêtant à souffler dedans. Une main énorme vint saisir son poignet, l’arrêtant dans son mouvement, et le caporal vit soudainement Maleko Cole se dresser devant lui, la tête découverte suite à la perte de son casque pendant les événements, pour lui lancer un regard insistant.
— Et à propos de ces gens ? Demanda l’Hawaiien en se tournant vers Brunet, en parlant des cris dans le bâtiment en flammes.
— Les hommes sont en train de faiblir. Si on ne se replie pas, ils vont entrer en déroute et ce sera en vain que nous aurons lutté car il n’y aura plus personne pour défendre la Cité ou ce qu’il en restera après cela ! Répondit Brunet sèchement.
Il attrapa brusquement le bras de Cole, le faisant relâcher Chapuy et le regarder droit dans les yeux.
— Nous ne pouvons sauver tout le monde. Lui dit-il d’une voix sévère mais qui n’arrivait pas à dissimuler les traces de remords.
Toujours en maintenant Cole par le bras, Brunet fit un signe de tête à Chapuy et alors que ce dernier soufflait de manière répétée dans le cor, il revint à l’intérieur du fast-food :
— On se replie ! Cria-il à ses hommes.
Tandis que les uns escortaient le groupe de civils comme prévu à l’origine, les autres couvrirent cette retraite, tirant en direction des Harpactognathus les poursuivants pour les maintenir à distance. En chemin, ils furent rejoints par Darbinian et les tireurs qui étaient montés sur les toits. Deux d’entre eux avaient péris, l’un poussé du toit par une attaque de ptérosaure, et l’autre était la victime avec laquelle les deux Quetzalcoatlus aperçus par Dearing et Grady avaient joué.
Ainsi, l’équipe de Brunet et les tireurs emmenés par Darbinian parvinrent à rejoindre les restes de celle de Temba à l’Obélisque. Là, Brunet vit qu’il ne restait plus que quatorze hommes en état de se battre de leur côté, lui compris, et il se doutait qu’il devait en rester d’autres du côté de l’équipe de Drekanson mais qu’ayant entendu le cor sonner le retraite, elle ait toutefois préférer se retrancher dans le Grand Nublarian en attendant l’arrivée des renforts et en entendant un grondement lourd et continu provenir de l’Avenue, il se dit qu’ils avaient pris la décision la plus judicieuse car une foule énorme s’était constituée et convergeait vers la porte.
En voyant les gardes se replier et craignant d’être laissés dehors, les survivants encore massés dans les bâtiments étaient sortis dehors pour s’élancer vers les portes avant leur fermeture. En très peu de temps, ils furent des centaines à recouvrir l’Avenue et à courir en direction des marches, chargeant tel un troupeau et trébuchant pour certains sur les corps étendus en travers de leur route tandis que les ptérosaures harcelaient les retardataires. La foule était si paniquée que les gardes n’avaient plus aucun espoir de la maîtriser sans avoir recours à la force et ils eurent tôt fait d’observer que nombre de fuyards avaient délaissé toute notion de civisme, ne se préoccupant que de leur propre peau et abandonnant leurs prochains à leur sort.
Ceux qui eurent le malheur de tomber furent piétinés par ceux qui les suivirent dans la plus grande indifférence et désirant à tout prix se cacher le plus vite possible, un groupe prit d’assaut le marauder.
Le garde aux commandes du canon eut beau leur crier de reculer, leur acharnement ne diminua pas le moins du monde et au moment où il se décida à dégainer son pistolet pour les menacer alors qu’il était submergé, des bras le saisirent et le jetèrent du toit du véhicule.
Etant séparés de leur collègue par la foule, les gardes avaient dû assister impuissants à cette scène. Ils considéraient à présent la foule comme une menace et Brunet fit rapidement aligner des soldats devant l’obélisque afin d’interrompre la charge des fuyards et les forcer à se séparer à leur niveau. Certains des gardes avaient une main proche de leur ceinture, prêt à jeter des grenades fumigènes sur ordre de Brunet. Ce dernier envisageait sérieusement même d’ordonner à ses Hommes de tirer en l’air dans un but de dissuasion et dans un coin de son esprit, il songea même pendant un instant à en venir de donner l’ordre de tirer sur la foule elle-même mais cela n’était qu’une solution qu’il comptait aborder qu’en ultime recours.
Derrière les corps paniqués et en mouvement, Cole aperçut une petite figure se tenant dans l’ombre de l’arcade ouest, cachée derrière une colonne, loin derrière la foule. En plissant des yeux, il s’aperçut qu’il s’agissait d’une petite fille. Il vit également des Harpactognathus courir sur les toits et grimper le long des façades avoisinantes.
Ils vont la trouver.
Sans crier gare, l’Hawaiien se jeta dans la foule et se fraya un chemin à travers elle en direction de l’Avenue.
— Cole, revenez ! C’est un ordre !
Mais ce fut en vain que Brunet hurla, non seulement car la cacophonie ambiante masquait le son de sa voix pourtant forte et aussi car la foule était si dense qu’ils ne pouvaient pas rattraper Cole. Il était seul désormais.
Cole parvint à remonter la foule et lorsqu’il en émergea, ce fut au même endroit où la formation s’était tenue au moment de la charge des pachyrhinosaures. Les Harpactognathus ayant harcelés l’arrière de la foule avait disparu et la petite fille, quant à elle, n’avait pas bougé de sa colonne. Cole se précipita vers elle mais à peine eut-il franchit la moitié de la distance la séparant d’elle qu’une meute d’Harpactognathus surgit des bâtiments enfumés. Avant qu’ils ne l’encerclent, l’Hawaiien dégaina son fusil à pompe et abattit deux des ptérosaures avant de venir à court de munitions. Alors qu’il dégainait son poignard, un Harpactognathus se précipita sur son bras et le mordit. Tandis que Cole tentait de s’en débarrasser, les autres se jetèrent sur lui et la vue du haut de son corps fut masquée par celles des ailes battant autour de lui.
Suite à la retraite de leurs collègues, Velasquez avait conservé sa position au sommet de la plateforme et Durant avait descendu les marches. Elle se trouvait désormais à une douzaine de mètres devant le pachyrhinosaure et tentait de canaliser la foule convergeant en courant vers les portes.
Mais les fuyards ignorèrent ses directives et rapidement, l’ignorèrent elle aussi, la bousculant de plus en plus jusqu’à la faire tomber. Durant tenta tout de suite de se relever mais ceux arrivants ne la virent pas et la piétinèrent.
La vue de sa collègue disparaissant sous la marée humaine saisit d’angoisse Velasquez.
— Tamara ! S’écria-il.
Il quitta alors son poste, descendant rapidement les marches, escaladant en deux ou trois mouvements le corps du pachyrhinosaure avant de, une fois sur le dos, bondir en avant et de foncer vers l’endroit où sa collègue était tombée.
Malgré les nombreuses blessures que les ptérosaures lui infligèrent, Cole luttait avec toute l’énergie qu’il pouvait rassembler et dans sa lutte, il infligea des coups mortels à plusieurs de ses assaillants, les poussant à le relâcher.
A un moment, il bloqua dans une main la mâchoire de l’Harpactognathus devant lui et serra l’autre autour de son cou avant de plonger la tête en avant et de mordre le reptile à la jugulaire en représailles à une morsure de ce dernier qui lui avait arraché un morceau de la joue gauche.
La meute ayant laissé trop de ses membres dans l’attaque contre le colosse, elle abandonna, laissant Cole au milieu de la voirie.
Poussant sur le côté ceux en travers de sa route, Velasquez couvrait les quelques mètres la séparant de Durant. Lorsqu’il fut en vue de son corps et qu’il la vit être piétinée sans vergogne par les touristes, il fut en proie à une telle colère que les quelques instants suivants se déroulèrent comme dans un songe. Perdant momentanément le contrôle de lui-même, il se montra davantage brutal, chargeant tel un taureau et saisissant ceux sur sa route par l’épaule pour les repousser violemment. Lorsqu’il reprit ses esprits, il tenait dans son poing un col de chemise, celui du touriste au visage surpris, effrayé et implorant qui était devant lui. Son autre poing s’était quant à lui arrêté in extremis dans l’air, au milieu de la trajectoire le conduisant vers le nez du touriste. Avant de le saisir, Velasquez l’avait vu marcher sur la tête de Durant, qui était étendue sur le dos juste derrière et inerte.
Après un grognement, il lâcha le touriste et le laissa partir, allant s’accroupir au chevet de Durant.
Son visage était désormais violacé, comme si elle avait été rouée de maints coups, sa respiration était sifflante et elle avait perdu connaissance entretemps.
— A l’aide ! Cria-il la voix pleine de désespoir.
Un autre garde accourra peu après et vint l’aider à la relever, passant chacun l’un de ses bras par-dessus leur cou. Peut-être qu’ils aggravèrent ses blessures en faisant cela mais ils n’eurent pas d’autre choix. Ils ne pouvaient pas la laisser là au milieu de tout ce chaos.
En se retournant vers la plateforme devant la porte du Centre, ils virent les fuyards grimper en masse par-dessus le pachyrhinosaure puis monter les marches à moitié en rampant avant de venir se bousculer au niveau du seuil tel un troupeau effrayé passant un goulot d’étranglement, allant jusqu’à pour certains se monter les uns sur les autres.
Les deux gardes décidèrent de passer par la rampe ouest. Ils la remontèrent, parvinrent à l’intérieur du Centre mais au moment où ils allaient entrer dans la Rotonde, Velasquez et son collègue virent que des agents de la J-SEC tentaient de repousser une incursion d’Harpactognathus. La Rotonde n’étant plus sûre, le collègue de Velasquez pointa du regard un couloir sur leur gauche.
— Par ici !
Cole se remit en route vers l’enfant, qui malgré le fait qu’elle savait qu’il venait pour la sauver, était un peu effrayée par l’image d’un géant couvert du sang qu’il donnait. De là où il était, il vit qu’elle tenait fermement dans ses bras une peluche, un Giraffatitan gris barrissant et dressé sur ses pattes de derrière.
Ses blessures gênaient ses mouvements et l’épuisement le gagnait peu à peu, amenuisant ses sens et le poussant parfois à trébucher à moitié sur les corps sur son chemin. Soudain, la petite fille écarquilla les yeux de terreur et cria.
Cole se figea d’un coup dans sa progression, alors que son abdomen était envahi par une sensation étrange. Il abaissa les yeux et vit une grande pointe blanche ensanglantée émerger de son ventre : Un Quetzal venait de l’empaler.
L’Hawaiien grogna et s’avança envers et contre tout, sentant le bec sortir de son dos. La douleur le fit tituber et il menaça de tomber sur ses genoux quelques pas plus loin. Il avait en vue une lance traînant sur le sol mais avant qu’il ne la saisisse et ne s’en serve dans une tentative désespérée de vaincre le Quetzalcoatlus avant de succomber, ce dernier arqua la tête en arrière et donna un puissant coup de bec dans le dos du garde, l’embrochant sur son bec.
Brunet et Darbinian, ayant observé toute la scène, virent Cole tenir debout plusieurs secondes avant de trépasser et de tomber à genoux, son corps glissant sur le long bec du ptérosaure.
Cette perte s’ajouta au lot de chagrin qui les accablait, eux et leurs collègues. Tant de gardes étaient tombés au cours de la bataille et parmi les blessés, ils surent pertinemment que certains n’allaient pas passer la nuit.
Brunet regarda derrière lui. Les civils continuaient à affluer à travers la porte mais il y en avait toujours un très grand nombre sur la plateforme, l’escalier, les rampes et sur le trottoir derrière eux mais plus personne n’arrivait de l’Avenue ou du secteur de l’étang. Encore une minute ou deux et ils seraient tous à l’intérieur.
Il ne le remarqua pas tout de suite mais Dearing et Grady avaient rejoints la foule entretemps. Lorsqu’il les remarqua à quelque pas derrière lui, il ne put s’empêcher d’être surpris par le fait qu’ils étaient encore de ce monde alors qu’il avait abandonné tout espoir à ce qu’ils le soient.
Le regard de la directrice du parc fut tout à coup attiré vers l’Avenue.
Alors que les bâtiments le long de cette dernière brûlaient de plus belle et que les derniers cris provenant de là-bas s’évanouissaient, la fille que voulait sauver Cole s’avança sur la voirie ravagée et déserte, tenant toujours sa peluche fermement contre elle.
Tandis que le Quetzalcoatlus ayant tué Cole était occupé à se repaître de sa dépouille, elle regarda tout autour d’elle, comme si elle cherchait vainement une voie de salut au milieu de l’enfer qui l’environnait.
Grady qui se tenait aux côtés de Dearing, l’entendit laisser échapper un cri à peine audible lorsqu’elle vit une grande ombre se dessiner au milieu de l’épaisse fumée se trouvant derrière l’enfant.
Alors qu’elle avait le regard tourné vers la place, la petite fille vit une ombre menaçante se projeter au-dessus d’elle et en se retournant, vit une grande figure sinistre s’avancer lentement vers elle.
La tête énorme et le cou long d’un Quetzalcoatlus émergèrent de la fumée et le regard du ptérosaure croisa celui de la petite fille paralysée par la terreur, n’osant ni bouger ni crier, et comme si elle était sous hypnose, elle laissa tomber sa peluche. Le ptérosaure marcha davantage en direction d’elle, faisant sortir la moitié de son corps de la fumée, vint poser ses griffes sur le tronc couché du palmier qui la séparait d’elle, abaissa un peu la tête et la pencha sur le côté comme pour mieux observer sa proie tandis que les claquements qu’il produisait en entrechoquant rapidement ses deux mandibules résonnaient dans toute l’Avenue.
Enfin, au moment où la fumée fut poussée dans leur direction, les engloutissant progressivement, il abaissa son bec vers elle et la saisit tandis que des braises atterrissaient sur la peluche, y mettant le feu.
Des larmes coulèrent sur le visage frappé d’horreur de Dearing et lorsque le Quetzalcoatlus jusque-là penché au-dessus de Cole se précipita vers son congénère pour lui disputer le corps de la petite fille, elle détourna le regard.
Grady l’enjoignit alors à se diriger vers la porte du Centre. Ils n’étaient plus qu’un peu plus de trois cents dehors et il ne restait au deux plus qu’à franchir le pachyrhinosaure mort, monter les marches et parcourir les quelques mètres restants jusqu’au seuil.
Mais alors qu’ils commençaient à prendre appui sur les jambes du cératopsien, une ombre les survola et on cria tout autour d’eux tandis que ceux les précédant reculèrent vivement, repassant au-dessus du gigantesque corps de l’herbivore, poussant Dearing et Grady à reculer à leur tour s’ils ne voulaient pas quelqu’un ne leur saute dessus dans sa fuite.
En allant à reculons vers les gardes, ils virent qu’un Quetzalcoatlus se tenait désormais au sommet de la plateforme, les regardant du haut de ses six mètres et barrant leur retraite, et venant dans son dos, arriva de la pénombre du Centre en galopant une petite demi-douzaine d’Harpactognathus.
Au lieu de vouloir gagner l’intérieur du Centre, on tenta alors de se lancer dans une fuite éperdue vers les voies menant au Zoo, au Royaume du Tyrannosaure ou au Quartier Résidentiel Ouest, mais des ptérosaures vinrent eux aussi se poser devant tous ceux s’y dirigeant dans le plus grand des désordres : Ils étaient encerclés.
— Restez groupés ! Cria à tous Brunet à plein poumons.
Les civils vinrent s’agglutiner tous ensemble derrière les gardes juste devant le pachyrhinosaure. Ces derniers, plus qu’au nombre de neuf, tirèrent leurs dernières balles et abattirent quelques Harpactognathus mais à court de munitions, ils se saisirent de lances ou, à défaut, dégainèrent leurs sabres et se dispersèrent tout autour des civils, prêts à faire face aux quatre Quetzalcoatlus, incluant les deux de l’Avenue, et aux deux douzaines d’Harpactognathus qui les tenaillaient.
De longs instants s’écoulèrent ensuite où les ptérosaures se rapprochèrent petit à petit du groupe et le regardèrent avec un vif intérêt, cherchant des failles dans la défense organisée par les gardes.
Certains Harpactognathus s’élancèrent subitement sur le flanc gauche, galopant sur quelques mètres avant de bondir en l’air sus aux humains mais les gardes à ce niveau répliquèrent à temps et les ptérosaures à face noire percutèrent de plein fouet les boucliers dressés en travers de leur trajectoire avant d’être repoussés. Les gardes campant fermement sur leurs positions afin d’éviter le risque de créer une brèche dans leur défense, ils n’allèrent pas achever les Harpactognathus au sol et ceux-ci leur feulèrent dessus avant de revenir à leur position initiale.
Il eut un assaut similaire sur le flanc droit et lui aussi fut contrecarré de la même manière mais aussitôt repoussés, les Harpactognathus revinrent directement à la charge, sur toute la ligne de défense cette fois-ci et profitant du fait que les gardes étaient occupés avec eux, les Quetzalcoatlus s’avancèrent tous en même temps, y compris celui au sommet de la plateforme, et abattirent leurs becs au milieu de la foule, ce de manière répétée, faisant de nombreuses victimes. Certaines des Cigognes de l’Enfer emportèrent même hors de la mêlée des victimes dans leur bec et les Harpactognathus restés en arrière vinrent les harceler afin d’avoir un morceau de leur pitance, s’élançant dans les airs pour mordre un bras ou une jambe dépassant du bec de leurs lointains cousins géants et ces derniers n’en eurent cure et mirent en sécurité leurs proies en les avalant d’une traite, ce que leur cou long et extensible permettait. Les Harpactognathus en question se résignèrent alors et vinrent aider leurs congénères dans l’attaque du groupe.
Parmi la mêlée, le caporal Chapuy eut soudain l’idée qui permit de repousser cet assaut. Il savait que les ptérosaures détestait les sons forts or il était en possession d’un cor. Il attendit d’avoir un court instant de répit pour saisir l’instrument et souffla dedans. Un unique coup, bref mais puissant, retentit contre les parois du Centre de la Découverte et tous les ptérosaures, surpris, reculèrent instinctivement, laissant les gardes se réorganiser.
Mais le répit fut de courte idée car aussitôt que les échos du coup de cor se perdirent au loin, les reptiles volant se ressaisirent et lancèrent tous ensemble un nouvel assaut. On tenta bien de tenir les Quetzalcoatlus à distance avec les lances mais tandis que l’un était retenu, les autres avaient le champ libre et l’assaut simultané de tous les ptérosaures éprouva grandement la résistance des gardes.
Voyant cela, la foule paniqua de plus belle et nombreux furent ceux qui se mirent à escalader le corps du pachyrhinosaure pour gagner l’intérieur du Centre malgré la présence d’un Quetzalcoatlus juché sur le corps, pensant que ce dernier était trop occupé avec le garde qui lui faisait face avec sa lance. Alors que certains passaient même sous ses ailes, il se désintéressa du garde et donna des coups de becs çà et là à ses pieds, attrapant finalement l’un des fuyards par l’abdomen avant de jeter son corps éventré en direction du garde au milieu de la cohue. Excité par les cris de ceux derrière lui, le ptérosaure se retourna pour les poursuivre, libérant le sommet du cadavre du cératopsien.
Perdant du terrain, la masse regroupant les gardes et les civils fut contrainte de reculer jusqu’au pachyrhinosaure et ce dernier disparut progressivement au fur et à mesure que la foule le gravissait.
Tandis que des Harpactognathus plongeaient en piqué sur les visiteurs, faisant même tomber ceux debout sur le pachyrhinosaure, Brunet et Darbinian se retrouvèrent séparés du reste du groupe. Entre eux et ce dernier, trois des ptérosaures tachetés s’étaient tournés vers eux, prêts à bondir, et de l’autre côté, un Quetzalcoatlus était en train de s’avancer.
Les deux soldats, dos à dos, refermèrent leur poigne sur le manche de leurs sabres échangèrent un bref regard avant de se tourner vers leurs adversaires. Ne quittant pas le trio d’Harpactognathus des yeux, Darbinian tira également avec sa main libre le long couteau à lame courbe rangée dans son dos et faisant office d’arme secondaire des rôdeurs. L’ayant utilisé plus tôt, il était encore tâché de sang et elle fit jouer l’arme dans sa main, l’exhibant aux ptérosaures tout en esquissant un rictus, comme pour les mettre en garde.
Alors qu’il réfléchissait de son côté à la tactique qu’il comptait adopter pour vaincre le Quetzalcoatlus, Brunet vit une figure tout vêtue de noir émerger de la fumée dans l’Avenue en courant.
D’autres la virent aussi et on s’aperçut rapidement qu’il ne s’agissait pas d’un garde gris, ce qui souleva bien des interrogations, et dans sa course, l’individu dégaina à la surprise de beaucoup une épée rangée dans son dos et se précipita vers le Quetzalcoatlus qui comptait attaquer Brunet et Darbinian. Alors que l’animal arquait la tête en arrière pour abattre son bec sur Brunet, l’une de ses pattes fut tranchée par un coup d’épée.
Surpris, le ptérosaure s’éloigna en se traînant sur les dalles et voulut s’envoler tant bien que mal mais le soldat mystérieux bondit sur son dos, le plaquant contre le sol. Le reptile volant pivota sa tête dans le but de donner un coup de bec à l’attaquant mais avant même de porter la moindre réplique, le soldat asséna deux puissants coups d’épée dans son cou, tranchant la tête. Alors que le corps du Quetzalcoatlus s’affaissait sous lui, le soldat apparut clairement aux yeux du groupe et des autres ptérosaures, alertés par les cris de douleur poussés par le reptile et regardant l’individu avec surprise.
A première vue, on aurait pu croire qu’il s’agissait d’un membre d’une quelconque force spéciale à cause de la panoplie d’équipements de protection en kevlar qu’il portait et dans un sens, l’Homme en question l’était mais tout comme dans le cas des gardes gris, certains éléments de son équipement évoquaient davantage le Moyen-Age ou une version fantaisiste de celui-ci que le début du XXIème siècle.
Comme ils l’avaient vu, son arme principale était une longue épée à une main, dotée d’une poignée suffisamment longue pour que l’arme puisse être aussi saisie fermement à deux mains, d’une garde cruciforme aux extrémités aiguisées, et d’une lame droite, longue de quatre-vingt-dix centimètres et aux deux bords tranchants et crénelés.
Il portait également non pas des gants mais de véritables gantelets dont les doigts présentaient à leur surface des structures semblables et des écailles, conférant aux mains des apparences de serres.
Mais l’élément le plus notable de son attirail était le masque facial mobile attaché à son casque. D’un aspect métallique et sinistre, il n’était pourvu que de deux trous pour les yeux ainsi que d’une série de fentes au niveau de la bouche, semblant imiter d’un certain point de vue une rangée de dents acérées, déshumanisant son porteur et lui conférant une aura inquiétante et menaçante qui insufflait la peur aussi bien dans le cœur des Hommes que celui des bêtes. C’était comme si on avait voulu faire ressembler le soldat à un prédateur.
Le regard du soldat masqué croisa celui du groupe et ses yeux bleus perçants les balayèrent, contemplant leurs expressions mi soulagées mi intimidées tandis que les ptérosaures, s’étant écartés un peu suite à l’arrivée de ce sauveur inespéré, se remettaient de son arrivée surprise. Mais avant qu’ils ne se jettent sur lui, quelques soldats équipés comme lui émergèrent à leur tour de la fumée autour de la place pour porter assistance à leur compagnon et ce dernier, alors qu’il avait toujours son épée en main, dégaina un pistolet de sa main libre et abattit l’Harpactognathus le plus proche, soulevant des jappements de la part de ses congénères qui s’écartèrent du groupe.
Au milieu du chaos qui s’ensuivit sur la place, on aperçut qu’une partie non négligeable des soldats avaient chacun une arme principale unique, et donc une façon propre d’affronter les ptérosaures.
Venant de la voie menant à l’étang, vint un individu grand et svelte qui chargea les Harpactoganthus lui tournant le dos et tout comme son compagnon, il portait une arme d’inspiration médiévale, une sorte de hampe dotée à chaque extrémité de lames courbées et tranchantes dont il se servit pour trancher net les têtes et taillader les corps et ailes à portée, tout en étant sans cesse en mouvement et esquivant les quelques attaques lui étant portées avec agilité et ce qui ressemblant à de la grâce dans cette sorte de danse macabre.
L’utilisation d’armes blanches dans le cadre de la lutte contre des animaux préhistoriques avait de quoi étonner certains mais à la fois les gardes gris et les soldats masqués s’étaient rendus compte qu’elles étaient davantage craintes par les animaux que les armes à feu, probablement du fait que les premières devaient leur évoquer cornes, piquants ou mêmes certains types de dents rencontrés fréquemment au sein du Règne Animal, leur inspirant ainsi une crainte naturelle tandis que les armes à feu ne représentaient rien de connu et qu’il fallait que les individus y soient confrontés une fois pour qu’ils apprennent à les craindre également.
Comme l’avait déclaré un mercenaire engagé par InGen lors des conflits avec les dinosaures sauvages pendant la construction de Jurassic World : « Parfois, je me demande si on aurait pas meilleur temps de les combattre avec des lances et des épées ? C’est vrai quoi. Ces saletés sont sur vous avant même que vous n’ayez le temps de crier Chimichangas et résultat, ils sont en train de vous lacérer le visage où vous éventrer alors que vous essayez désespérément d’atteindre la détente de votre flingue alors qu’un coup d’épée dans le bide et Hop ! L’affaire de votre saurien est réglée…»
Ainsi, pour faire face à un adversaire primitif dépourvu de moyens technologiques mais néanmoins redoutable car dotés d’armes naturelles et combattant toujours au corps à corps, les gardes gris et une fraction des forces de sécurité d’InGen s’adaptèrent et s’inspirèrent de tactiques de combat et de technologies antérieures à l’utilisation en masse des armes à feu, expliquant l’étrange mélange entre d’un côté la modernité technologique du XXIème siècle et de l’autre, quelque chose rappelant les guerriers du Moyen-Age ou de l’Antiquité, mélange que l’on retrouvait chez les gardes gris ainsi que chez le groupe de soldats ayant fait irruption dans Burroughs et qui reposait sur la combinaison du meilleur des différentes époques.
Une bonne partie de ces derniers était équipée d’armes tout à fait contemporaines tels que des pistolets ou des fusils mitrailleurs bien qu’encore une fois, rares étaient ceux armés de la même façon. Vers l’Obélisque, on vit même un homme passer les Harpactognathus devant lui au lance-flammes, ne laissant que leurs corps calcinés dans son sillage.
Alors que Brunet et quelques autres gardes s’apprêtaient à aller, après un moment d’hésitation, aider les soldats à repousser les ptérosaures hors de la Cité, l’un des arrivants leur cria dans sa voix déformée par le masque :
— Bouchez-vous les oreilles !
L’un des compagnons de ce dernier activa un boîtier accroché à sa ceinture et un son aigu et strident, croissant en intensité, similaire à un cri d’outre-tombe emplit l’air. Il était si effrayant et désagréable que tous à proximité, animaux comme humains, furent grandement incommodés. Les ptérosaures secouèrent vivement de la tête et commencèrent à pousser des cris de douleur tout en reculant.
Même en se bouchant les oreilles, les membres du groupe entendaient toujours le son et pour un touriste ne s’étant pas bouché les oreilles à temps, l’écoute fut si douloureuse qu’il se prostra sur place en geignant
Les gardes, ayant dus plaquer leurs mains contre leurs oreilles, n’était plus en mesure d’aller porter assistance aux soldats masqués qui eux à l’inverse, ne semblaient être nullement incommodés par le bruit et s’empressaient d’aller massacrer les ptérosaures qui restaient encore sur place et ce, au milieu des corps jonchant la Place et l’entrée de l’Avenue, souillant de sang les corps des victimes, le tout devant les yeux du groupe encore massé devant le corps du pachyrhinosaure et les civils virent que le regard que portaient les gardes à leurs sauveurs était empreint de tout sauf de bienveillance.
Défaits, les derniers ptérosaures s’élancèrent pour décoller du sol mais à peine s’eurent-ils mis hors de portée de tir des soldats qu’un hélicoptère noir apparut. On entendit une mitrailleuse faire feu et dans leur fuite, une partie non-négligeable des animaux en fuite fut abattu et les rares qui parvinrent à réchapper de la Cité gagnèrent soit les Monts Brumeux, soit la Cordillère Occidentale.
Lorsque l’appareil revint quelques instants plus tard survoler les rues, le groupe vit qu’il arborait non seulement le logo d’InGen mais aussi un emblème, représentant Saint Georges de Lydda terrassant le dragon.
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
Hors ligne
Bonjour à tous,
J'ai le plaisir aujourd'hui de vous dévoiler la première partie du Chapitre XIII intitulé Le Conseil, un chapitre qui devrait être plus court que les précédents et qui a pour visée à laisser souffler le lecteur après la tension et l'intensité des derniers chapitres.
Les deux autres parties arriveront courant novembre voir décembre.
En vous souhaitant une bonne lecture et un bon dimanche.
Chapitre XIII : Le Conseil (Partie 1/3)
— Je croyais que l’I.rex vous avait boulotté. Déclara Brunet à Dearing et Grady. Vous avez de la chance d’être en vie.
— Il s’en est fallu de peu. Répondit Grady.
Ils se tenaient en haut des marches, prêts à entrer dans le Centre de la Découverte mais avant que Dearing et Grady franchissent le seuil, Brunet vint s’interposer devant eux et les fixa sévèrement droit dans leurs yeux, les intimidant par son seul regard.
— Lorsque nous sommes passés au Centre, nous avons trouvé Hamada, mort, poignardé en plein cœur. Qui a fait ça ? Demanda-il sur un ton inquisiteur.
Ils déglutirent et tandis que la poitrine de Dearing se serrait, Grady commença à bredouiller une explication.
— Ecoutes Gilbert, ce qui est arriv…
— C’était moi. Déclara Dearing d’une voix blanche.
— Claire… Lui siffla Grady sur un ton l’invitant à garder le silence.
— Laisses-là parler Owen ! Trancha Brunet.
Dearing s’avança d’un pas vers le Français, tenant dans sa main droite la dague d’Hamada.
— C’était un accident. Je comptais poser la dague sur le côté mais Katashi m’a supplié de l’achever. Je n’ai pas pu alors il m’a attrapé la main et forcée à le poignarder. Le temps que je m’en rende compte, la lame était déjà dans son cœur. Lui raconta-elle alors que Brunet la considérait avec froideur. Je suis sincèrement désolée, s’il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour me repentir de cet acte…
Paume de la main ouverte vers le haut, elle lui tendit la dague. Elle avait si honte qu’elle n’osait regarder Brunet dans les yeux.
Il s’approcha lentement et saisit délicatement la dague par la manche. Il regarda pendant un instant le sang séché sur la lame et passa doucement ses doigts le long du tranchant de la lame.
— Claire. Comme vous devez le savoir, je n’ai pas une haute opinion de vous. Lui rappela-il. Ce qui est arrivé n’était pas un accident mais ce n’était pas non plus un meurtre.
Dearing releva les yeux vers Brunet.
— Vous n’êtes pas une assassine. Ce que vous avez fait, même si c’était contre votre volonté, c’est achever les souffrances d’un homme mourant. Lui expliqua-il avant de ranger la dague à sa ceinture.
Puis, d’une voix amère, il ajouta :
— Katashi aurait surement souhaité que ce soit l’un des nôtres qui lui permette de rejoindre l’au-delà à la place de vous mais c’est ainsi. Veuillez m’excuser, je dois aller m’occuper de mes hommes.
Brunet prit congé d’eux et entra dans le Centre à la suite des autres gardes. Dearing et Grady franchirent le seuil à leur tour peu après et se dirigèrent vers les niveaux inférieurs à la recherche de Zach et Gray.
Alors qu’il s’assurait de l’état de chacun de ses Hommes, alors dispersés dans la rotonde et les galeries et salles alentours, Brunet retrouva Velasquez dans les toilettes.
Il était agenouillé sur le carrelage et pleurait à chaudes larmes, tenant le corps de Durant dans ses bras. Elle avait succombé à de multiples hémorragies internes entretemps.
Darbinian se trouvait également dans la pièce. Elle vint poser une main sur l’épaule de Velasquez et s’agenouilla pour lui adresser des paroles réconfortantes.
Deux gardes vinrent avec une civière et une housse mortuaire. Velasquez les regarda insérer le corps de Durant dans la housse, puis déposer cette dernière sur la civière et s’en aller.
Il resta un moment sur place, le regard triste et hagard rivé vers le sol, puis il se mit à errer dans le bâtiment mais alors qu’il s’avançait dans la rotonde, il reconnut parmi la foule ceux qui avaient piétiné Durant.
Le chagrin qui s’était emparé de lui laissa alors place à une grande rage. Il accéléra le pas et couvrit rapidement les deux tiers de la distance le séparant de ceux responsables de la mort de son amie et collègue avant que Brunet ne crie dans son dos.
— Velasquez !
Voyant que ce dernier continuait toujours, Brunet lui agrippa avec force le bras, le stoppant sur place et le poussa à le regarder droit dans les yeux.
— Je connais bien trop la haine qui habite votre cœur en ce moment. Les gens qui l’ont piétinée sont des connards mais restent des civils sans défense ! Attaquez-les et vous vous engagerez alors sur une voie sans retour dont il sera très difficile d’en sortir. Croyez-moi j’en sais quelque chose ! Le mit-il en garde. Elle ne voudrait pas que cela vous arrive.
Velasquez comprit dans l’intonation de Brunet que ce dernier s’était retrouvé dans une situation similaire dans son passé. Il savait que le français était mercenaire avant de rejoindre de la garde et qu’il avait vécu des conflits violents tels que la Guerre civile du Rwanda, la Première Guerre du Congo et la Guerre du Kosovo mais il ignorait dans quel genre d’opérations il avait été impliqué et pour qui il avait travaillé. Il avait juste entendu de la bouche de l’un des officiers que le commandant Störmer ne faisait pas confiance à Brunet et que sans Hamada pour avoir plaidé sa cause, il serait en train de croupir en prison.
Qui était donc Gilbert Brunet le mercenaire ?
— Lieutenant Brunet ! Héla une voix rauque dans leur dos.
Ils se tournèrent vers le vestibule et virent l’épéiste ayant décapité l’un des Quetzalcoatlus devant le groupe piégé dehors avancer dans leur direction, suivi d’une partie de ses compagnons.
Ils avaient tous enlevé leurs casques, le tenant sous le bras, et une partie de leurs équipements de protection, laissant leurs bras nus.
L’épéiste était leur chef. C’était un homme de moyenne stature, au corps athlétique, âgé entre trente-cinq et quarante ans, au visage ciselé rasé de près et aux longs cheveux bruns descendant jusqu’aux épaules.
Il avait pour bras droit une femme élancée légèrement plus âgée que lui et plus grande aussi, le dépassant d’une tête et demie et dont les cheveux roux étaient coupés court. Elle avait aussi pour particularité d’avoir les bras tatoués et d’avoir rangée dans son dos son arme principale, la hampe aux deux lames courbes vue plus tôt.
Brunet fit quelque pas vers les arrivants, s’arrêta et salua froidement l’épéiste :
— Sherman.
— Mes Hommes ont nettoyé la cité de toutes les créatures déchaînées. Déclara ce dernier. Je…
— Ouais ben vous en avez mis du temps ! Lança l’un des gardes d’un ton plein de reproches.
— Un merci serait peut-être de rigueur, non ? Lui répliqua sèchement l’un des compagnons de Sherman, un homme d’origine asiatique au crâne rasé. C’est pas comme si on avait sauvé vos miches !
Le garde grogna et tout comme une bonne partie de ses collègues rassemblés là, il avait une main gardée à proximité de la poignée de son sabre, alors rangé dans son fourreau, et lançait un regard noir aux soldats arrivants.
Les visiteurs et employés amassés dans la rotonde s’étaient tus en entendant l’altercation et la tension existant entre les deux groupes de soldats les mettaient mal à l’aise.
Sherman balaya du regard les gardes et s’adressa à eux :
— Je suis conscient que vous nous en voulez toujours depuis cet incident survenu à Caer Draig il y a des années. Mais là maintenant, près de vingt mille personnes comptent sur nous pour agir contre les menaces de cette île infernale.
Il s’approcha de Brunet et lui dit :
— Hoskins est actuellement en train de s’entretenir avec le commandant Störmer afin de définir une stratégie commune sur lequel il faut nous accorder. Il est dans l’intérêt de tous à ce que nous collaborions. Ajouta-il en jetant un regard aux visiteurs.
Tandis que Brunet et Sherman s’entretenaient, Drekanson se rapprocha de Velasquez qui se tenait en retrait et lui révéla la nature de ces soldats :
— Les pourfendeurs. L’élite même des troupes d’InGen. Tantôt chasseurs de dinosaures aguerris, tantôt force d’intimidation.
Lambert Ross, qui était jusque-là assis l’air patraque contre un mur non loin, vint les rejoindre et ajouta :
— Pour combattre des monstres, Hoskins a créé des monstres. Ces gars sont pour en grande partie des vétérans du conflit contre les derniers dinosaures sauvages de Nublar. La plupart d’entre eux étaient de bonnes personnes que je qualifiais d’amis mais la guerre primitive que nous avons vécus ne les a pas laissés tous indemnes et à l’issue de cette dernière, la frontière les séparant des bêtes sauvages qu’ils avaient affrontés était devenue fine pour certains.
En regardant Sherman, son second et les pourfendeurs derrière le premier, il vit qu’ils avaient tous le même tatouage à l’avant-bras droit, celui de Saint Georges sur son destrier transperçant d’une lance le Dragon.
— Vous n’étiez pas qu’un simple soldat d’InGen, vous étiez l’un d’entre eux. Se rendit compte Velasquez en faisant le lien entre le tatouage de Ross et de celui des autres pourfendeurs. C’est pour ça que Bellamy n’avait pas l’air contente hier soir lorsque j’ai mentionné que mon cousin avait aussi le tatouage de Saint Georges et du Dragon. Lui aussi en est un...
— J’ai entraîné la majorité de ceux qui se tiennent là. J’étais leur chef même. Déclara le tavernier. Dire que Sherman était encore plus jeune que vous lorsqu’Hoskins l’a ramené ici d’Afghanistan. Si le jeune aumônier militaire apeuré que j’avais pris sous mon aile regardait le bretteur d’aujourd’hui, il ne se reconnaîtrait même pas.
L’un des pourfendeurs, un amérindien costaricain d’une quarantaine d’années avec de longs cheveux noirs lisses, avait aperçu Velasquez du coin du regard. Il se mit en périphérie du groupe formé par ses compagnons pour mieux dévisager Velasquez, le regardant comme si il le connaissait.
— Julio ? Demanda-il.
Velasquez se demanda d’où le soldat connaissait son nom puis en le dévisageant à son tour, ce fut alors qu’il reconnut celui qu’il n’avait pas vu depuis des années.
— Paco ?
Les deux hommes se séparèrent de leurs groupes respectifs et vinrent se donner l’accolade au milieu de la rotonde.
— J’aurais aimé te revoir en d’autres circonstances, cousin. Déclara Velasquez à son cousin dans la langue des Tun-Si.
— De même. Tu as toutes mes condoléances pour tes frères et sœurs d’armes tombés. Lui dit Paco Cortès dans cette même langue.
Gardes et pourfendeurs confondus les regardaient avec étonnement. Sherman quant à lui, considéra la scène avec un certain amusement :
— J’ignorais que Paco avait un cousin parmi vos rangs. Avoua-il à Brunet. Peut-être que leur relation constituent un premier pas vers le retour d’une entente entre nous.
— Il y a des blessures qui nécessitent bien plus que des étreintes pour être guéries, Gregor.
Avant de descendre dans les niveaux inférieurs, Dearing demanda une radio à l’un des agents de la J-SEC et contacta immédiatement la salle de contrôle pour d’une part les informer qu’elle et Grady étaient en vie, nouvelle que les techniciens reçurent avec soulagement, et d’autre part leur demander la localisation de Young et des garçons.
— Zara n’est pas à l’Administration en tout cas. Lui répondit Krill. Elle a été repérée en train d’emprunter l’ascenseur qui descend jusqu’à la station de monorail. Elle devait être dans ou aux alentours du Centre lors de l’attaque.
Dearing entendit Krill déglutir. La technicienne était nerveuse et vu ce qui venait d’arriver, elle aurait été étonnée qu’elle ne le soit pas.
— Claire, puis-je vous demander une faveur ? Demanda Krill.
— Bien sûr.
— Trouvez-là s’il vous plaît. Avec Lowery, on est si inquiets pour elle…
— Tant que je suis ici je la chercherais, c’est promis.
Environ une minute et demie plus tard, alors qu’ils descendaient un large escalier, Cruthers les recontacta :
— On les a ! Ils sont dans la salle des hologrammes, près de la grande alcôve.
— Merci Lowery.
Ils parvinrent dans le sous-sol du Centre et prirent la direction de la salle des hologrammes, passant au milieu des centaines de personnes ayant cherché refuge à ce niveau, auparavant blotties les unes contre les autres en attendant la fin de l’attaque mais toujours massées contre le faux-rocher des parois des couloirs tortueux.
La salle des hologrammes était un espace comportant plusieurs alcôves de tailles différentes et comportant chacune une scène. Devant les alcôves, on trouvait une console sur laquelle l’utilisateur pouvait choisir l’espèce dont il voulait en voir une représentation holographique basée en vérité sur le principe du fantôme de Pepper.
Un projecteur caché projetait l’image de l’animal sur un miroir à l’horizontale du sol puis sur une toile inclinée en tulle, si fine qu’elle était invisible aux yeux du public mais suffisamment dense pour capturer la lumière projetée tandis que le cœur de l’illusion reposait sur la profondeur qui existait entre le fond de la scène et l’hologramme. Des haut-parleurs dissimulés diffusaient quant à eux les sons propres à chaque espèce.
D’ordinaire plongée dans la pénombre, on avait allumé l’éclairage de secours pour des raisons de sécurité.
Comme Cruthers le leur avait indiqué, ils retrouvèrent Zach et Gray non loin de la console de l’alcôve centrale où on pouvait projeter les hologrammes des plus grandes créatures.
— C’est eux ! S’écria Dearing. Zach ! Gray !
En entendant la voix familière de leur tante les héler, les garçons relevèrent le regard et balayèrent la foule les séparant d’elle avant d’apercevoir la chevelure rousse ébouriffée de Dearing progresser dans leur direction.
— Claire ! S’écrièrent-ils à leur tour.
Ils se frayèrent un chemin au milieu des autres rescapés et lorsqu’ils furent à son niveau, Dearing vint les prendre dans ses bras. Zach fut quelque peu surpris de voir qu’Owen Grady accompagnait sa tante.
— Où étais-tu passée ? Demanda Gray.
— Je vous cherchais. J’ai même suivit vos traces à pied à travers la Réserve pour vous retrouver…
Elle s’aperçut soudainement que Zach présentait une longue coupure barrant toute sa joue gauche.
— Zach, que t’est-il arrivé ? S’inquiéta Dearing, le regardant avec de grands yeux inquiets et inspectant la blessure.
Zach vit que tout le bas de la jambe droite du pantalon de sa tante était maculé de sang. Il considéra cela comme étant plus grave que sa propre blessure.
— Gray m’a sauvé d’un tir raté. Lui dit-il. T’as pas été épargnée non plus on dirait… On est vivants, c’est ce qui compte. Où est Zara ? On ne l’a pas vue.
— J’allais vous poser la même question. Dit leur tante. Essayons-de la trouver.
— Madame Dearing ! Hélà quelqu’un.
Elle se retourna vers la voix et se rendit compte que c’était celle d’un agent de la J-SEC. Ce dernier avait l’air essoufflé, il avait dû courir pour aller la chercher.
— Vous devez rejoindre la salle de réunion dès que vous pouvez. Déclara-il. Le Conseil d’Administration vous a convoquée.
Dearing se figea sur place et blêmit. Pour elle, ces mots avaient sonnés comme une condamnation à mort.
Lorsqu’ils se garèrent sur le parking de l’Administration, une petite pluie de cendres commença à tomber sur Burroughs. Même depuis la cité, les grondements du Sibo étaient bien audibles et le panache volcanique culminait à ce moment-là à environ quinze kilomètres d’altitude. Depuis le toit de l’Administration, on pouvait même voir des rivières de lave dévaler les pentes ainsi que les lueurs rougeâtres lointaines provenant des alentours du volcan, celles d’incendies ravageant la jungle du Secteur Sept et menaçant de s’étendre en direction du sud.
Attendant près de l’entrée du pont menant à l’entrée de l’Administration, Barry Sembène avait attendu l’arrivée de Grady, soucieux de l’état de son ami.
— Owen !
— Barry ! Les filles sont en sécurité ?
— Encore effrayées par l’éruption mais elles sont saines et sauves. On les a enfermées dans le bâtiment de nuit. Par chance, il a résisté au séisme.
— Et toi, tu vas bien ?
— Je suis l’un des rares à n’avoir rien eu aujourd’hui.
Tout comme Grady, Sembène était supposé être en jour de repos mais dès que la nouvelle de l’attaque des métriacanthosaures lui était parvenue, il avait foncé au bureau des soigneurs pour en savoir plus et se préparer si on avait besoin de leur assistance. Il savait que Grady était partit aider Dearing dans la recherche de ses neveux mais lorsque le Mont Sibo avait commencé à montrer les signes d’un réveil imminent, Sembène avait foncé à l’enclos des achillobators et convoqué là-bas ses collègues de travail afin qu’ils mettent en sécurité les raptors. Ce fut de justesse qu’ils y étaient parvenus, les achillobators refusant d’obtempérer et ce ne fut que le passage au-dessus d’eux du vol de Quetzalcoatlus qui poussa les quatre prédateurs à aller se réfugier dans leur loge de nuit, collées les unes contre les autres, tremblant à chaque manifestation de la part du Sibo et regardant par intermittence le plafond au-dessus d’elles.
Sembène remarqua que le T-Shirt de Grady était déchiré et tâché de sang au niveau de son flanc droit.
— T’es blessé !
— C est rien. Je me soignerais dès que j’aurais un moment de libre.
— Si tu le dis.
— Après la réunion, Il faut que je retourne à l’enclos.
Sembène secoua de la tête.
— Owen, tu as besoin de repos ! Prends-en et soignes toi s’il te plait car je ne sais pas ce qui adviendra dans les prochains jours mais on aura besoin de toi en pleine possession de tes capacités. Le supplia-il. Les gars et moi prendront les premiers quarts.
— Ok, mère poule. Merci. Au moindre problème, appelles moi quand même s’il te plaît.
Tandis que Sembène regagnait son véhicule, ils traversèrent le pont et entreprirent de gravir les marches menant au porte mais durant la montée, Dearing geignit de douleur à cause de son mollet.
— Ce mollet a besoin d’être pansé. Dit Grady. Passons à l’infirmerie d’abord, le conseil peut attendre.
Une fois dans le bâtiment, ils se dirigèrent directement vers l’infirmerie.
On y avait déjà installé des blessés sur les quelques lits qui s’y trouvaient et les soins étaient pour le moment dispensés par l’infirmière remplaçante, l’infirmier étant occupé ailleurs.
Grady fit alors asseoir Dearing sur l’une des chaises de la salle d’attente et releva la jambe de son pantalon, révélant la blessure.
Les spicules de la langue de l’Indominus s’étaient enfoncés pour certaines de plusieurs centimètres dans la chair et la moitié de l’un d’entre eux était même resté fiché dedans. Le sang ne coulait plus mais s’était coagulé, laissant des traînées sur tout le pourtour du mollet.
Grady commença par l’extraction du morceau de spicule.
De son sac à dos, il sortit une trousse de secours qu’il ouvrit à même le sol juste à portée de bras. Il s’empara d’une pince à échardes et délicatement, il extrait la moitié de spicule. Avant de le déposer, il l’inspecta :
— S’il avait été entier, ça aurait pu te faire une épingle pour les cheveux. Ça t’aurait fait un petit souvenir… Plaisanta-il à mi-voix.
Malgré la douleur provoquée par le retrait du morceau, Dearing lui esquissa un petit sourire.
Il partit ensuite humidifier un bout de tissu au lavabo et tandis qu’il faisait ça, l’infirmière vint prodiguer des soins à la joue de Zach.
Grady revint et lava à l’eau la blessure dans le but d’enlever les impuretés et le sang séché, puis il la sécha avant d’appliquer un antiseptique et enfin, il enroula autour un bandage.
— Merci. Lui dit Dearing en lui prenant chaleureusement la main.
— Espérons qu’il n’y ait pas de complications…
— Tu veux que je regarde la tienne…
— Ça peut attendre. Il faut qu’on aille à la salle de réunion.
— Mettez-là là ! Entendirent-ils l’infirmier dire.
Ce dernier, un costaricain grand, fin, moustachu et jeune entra à reculons dans la pièce, guidant les deux agents de la J-SEC portant une civière sur lequel était étendu le corps sans vie d’une jeune femme.
Lorsqu’ils passèrent devant eux, Dearing eut le souffle coupé en reconnaissant le corps : C’était celui de Zara Young.
Des larmes commencèrent à couler de ses yeux.
— Qu’est-il arrivé ? Leur demanda-elle en voyant qu’elle ne comportait aucune blessure en dehors d’une trace de griffures au visage.
— Elle a été retrouvée en bas des escaliers qui conduisent à la station de monorail. Elle devait être en train de les remonter lorsqu’elle a croisé la route de l’un des Harpactognathus s’étant introduits dans le bâtiment. On pense qu’il l’a fait tomber et que la chute lui a brisé la nuque. Répondit l’infirmier. Toutes mes condoléances.
Les agents allèrent jusqu’au niveau du seul lit de libre et déposèrent sur ce dernier le corps de Young.
Dearing vint s’agenouiller au pied du lit et commença à pleurer la mort de son assistante. Grady et Zach, eux aussi attristés, vinrent la consoler.
L’un des agents s’approcha de Dearing, un petit objet dans le creux de sa main.
— Elle avait ça dans la main quand on l’a retrouvée. Dit-il.
Il lui tendit une clé usb noire accrochée à une chaîne en argent. Dearing avait déjà vue la clé en question, Young l’utilisait fréquemment au travail et en dehors.
Elle saisit la clé et les deux agents ainsi que l’infirmier repartirent, les laissant auprès de la défunte mais quelques secondes plus tard, l’un des techniciens de la salle de contrôle, un trentenaire bien habillé et coiffé, vint quérir Dearing :
— Claire, le Conseil vous...
— Je sais ! Qu’on me foute la paix cinq minutes bordel ! S’énerva-elle.
— Ils ont dit sur le champ. Insista le technicien. Et c’était il y a deux minutes. Je vous présente toute mes condoléances au sujet de Mademoiselle Young, ce qui est arrivé est tragique, mais sauf votre respect Madame, je vous conseille de vous rendre à la salle de réunion immédiatement.
Malgré la situation, il avait le culot de se comporter comme un véritable coq et sa seule présence enrageait Dearing. A contrecœur, elle quitta l’infirmerie, suivie de ses neveux et de Grady.
— Je ne donne pas cher à votre poste personnellement... L’entendit-elle lâcher à voix basse lorsqu’il crut qu’elle fut suffisamment éloignée.
Dearing se retourna vivement, le fusilla du regard et lui dit :
— Ta gueules. Juste ta gueules...
Le technicien se tut et tout en la regardant se diriger vers la salle de réunion, il réajusta sa cravate et déglutit.
Le long du couloir menant à la salle de réunion, située à quelques mètres de la salle de contrôle, les employés s’étaient rassemblés en attendant l’arrivée de Dearing.
Lorsqu’elle apparut à l’extrémité du couloir suivie de Grady et de ses neveux, certains eurent grand peine à la reconnaître avec ses cheveux en pagaille recouvrant à moitié son regard hagard, ses habits sales et ses chaussures de randonnée presque trop grandes et crottées laissant des empreintes visibles sur son passage. L’odeur de son parfum à la vanille était désormais mêlée à celui de l’humidité de la jungle et de celle âcre de la fiente de tyrannosaure, et elle frappa les narines de ceux près desquels Dearing passa. Sa démarche était également ponctuée de boitements de la part de sa jambe droite et en voyant la jambe de son pantalon déchiré et tâché de sang, on se demanda quelles furent les épreuves qu’elle avait traversées.
Derrière elle à sa gauche, Zach aperçut au fond du couloir Krill en train de pleurer dans les bras de Cruthers, lui-même profondément attristé. Les deux techniciens venaient d’apprendre que Young était morte.
Lorsqu’ils atteignirent la porte, l’agent en faction devant cette dernière arrêta Grady et les garçons.
— Seule Claire peut entrer. Dit-il. Veuillez rester dehors s’il vous plaît.
Dearing se retourna vers eux et vit Grady et Zach lui adresser un regard lui intimant de garder le courage.
Elle fit face à la porte, inspira profondément, saisit la poignée et entra.
Dearing balaya la salle du regard. Tous les cadres du parc ainsi que Wu et Hoskins étaient présents, debout derrière une grande table ovale. Leurs regards étaient braqués sur elle. Elle remarqua cependant que Masrani était absent alors qu’elle s’était attendue à sa présence.
— Où est Monsieur Masrani ? Demanda-elle.
— Il a été emmené sous bonne garde à la suite présidentielle du Palais. Lui répondit Hoskins. Il est encore sous le choc.
Sur le mur du fond, un grand écran était allumé. Il permettait de communiquer avec la direction d’InGen à Palo Alto en Californie et affichait alors une retransmission vidéo montrant une salle aux murs recouvert d’un placo de bois brun sombre, plongée dans la pénombre sauf en son cœur, où la lumière des plafonniers éclairait une grande table ovale en bois et les sièges disposés autour, ainsi qu’au niveau du centre de l’un des murs où un écriteau Ingen Corporation diffusait sa propre lumière.
Devant ce dernier et faisant face à la caméra, trois individus, des membres clés du Conseil d’Administration, étaient assis. Une tablette tactile était posée sur la table devant chacun d’entre eux.
A droite, il y avait Alistair Iger, le directeur des relations publiques et porte-parole de la compagnie, un homme chauve grand et sec, âgé d’une cinquantaine d’années ; A gauche, était assis un jeune septuagénaire assez petit portant des lunettes, au front dégarni et dont le costume à cravate rouge laissait trahir un léger embonpoint : Dominick Silverman, directeur financier ; Et enfin, au centre, se trouvait Susan Lynton, vice-présidente, de quelques années plus âgée que Silverman mais paraissant plus jeune de par son élégance et son raffinement et beaucoup disaient même qu’elle était bien conservée pour son âge. Elle portait un tailleur beige impeccable et ses cheveux blonds étaient coupés au carré. Ce fut elle qui prit la parole en premier :
— Bonjour madame Dearing. Puisque vous êtes enfin arrivée, nous pouvons commencer la réunion malgré l’absence de Monsieur Lockwood.
Benjamin Lockwood, philanthrope, ancien ami de John Hammond, créateur d’une fondation portant son nom visant à soutenir toute recherche dans le domaine de la biologie pouvant améliorer l’humain, était le président directeur général d’InGen. Ayant succédé à Peter Ludlow après la mort de ce dernier au cours du tristement célèbre incident de San Diego, c’était lui qui avait rouvert les négociations avec Masrani pour le rachat d’InGen. Mais depuis quelques années, il était devenu notable pour ses absences, justifiées par des soucis de santé, et supervisait autant qu’il pouvait InGen depuis son manoir dans le nord de la Californie, envoyant parfois son aide à Palo Alto pour transmettre ses directives et veiller à leur application. Mais en vérité, c’était Lynton, plus accessible des investisseurs et davantage présente dans les médias, qui dirigeait la compagnie.
Les cadres du parc prirent tous place autour de la table, à l’exception de Dearing à qui on demanda de rester debout entre la table et l’écran.
Le Conseil commença par faire un bilan provisoire de la catastrophe :
— Comme vous le savez, l’état d’urgence a été déclaré sur Isla Nublar. Déclara Iger. Les chiffres que nous avons reçus il y a quelques minutes font état d’un bilan provisoire est de cent seize morts et quatre-cent soixante-huit blessés confirmés, le genre de chiffres digne d’un attentat terroriste à grande échelle et à en juger par les images qui nous parviennent, ce bilan risque fort d’être revu considérablement à la hausse au cours des heures à venir. Dit-il en regardant sa tablette. Ce n’est qu’une question de minutes avant que le président lui-même ne nous passe un coup de fil pour demander comment ça a pu putain d’arriver. S’énerva-il.
— L’opération Royaume Déchu a été lancée. Continua Lynton. Des instructions ont été déjà transmises au personnel. Comme prévu à l’origine, le Anne B s’arrimera aux Docks de l’Est ce soir et une première partie de nos actifs, incluant une partie des animaux du zoo, pourra y être embarquée. Dans notre nouveau terminal portuaire de la province de Libéria, l’Arcadia est en train d’être armé au moment même où nous parlons et il arrivera à Nublar demain en fin d’après-midi. Les animaux récupérés au cours de l’opération seront ramenés sur le continent où ils iront en quarantaine dans nos installations des montagnes de l’Ismaloya en attendant d’être transférés aux Etats-Unis. A San Diego, le Venture est en train d’être préparé également.
— Une vente aux enchères sera prochainement organisée. Annonça Silverman. L’argent récolte via la vente des actifs biologiques et technologiques récupérés devrait nous permettre de compenser en partie les pertes financières dues à la catastrophe actuelle. Mais si nous voulons que la compagnie évite la banqueroute, restrictions budgétaires et licenciement de personnel seront de rigueur. Ça commence dès à présent par le vôtre.
Dearing se paralysa sur place. Elle s’y attendait mais ce fut comme si elle se sentait mourir.
— Certes, reprit le directeur financier, elle n’a pas encore été votée et actée mais suite à une discussion entre les membres du Conseil, on peut vous annoncer que vous pouvez déjà commencer à ranger votre bureau.
— Et quel est l’avis de Monsieur Masrani sur la question nous demanderiez-vous ? Vous le connaissez déjà à cause des trois manquements que vous lui avez faits aujourd’hui. Ajouta le porte-parole d’InGen.
— S’il n’y avait que ça… Vous êtes également en partie responsable de la crise actuelle. Déclara Silverman. Laissez-nous exposer les faits : Entre-autres, vous avez refusez la proposition du capitaine Hamada visant à faire construire de bunkers à grande capacité d’accueil…
— Je l’ai fait parce que vous vous y êtes opposés Monsieur Silverman. Répliqua Dearing.
— Vraiment ? Fit Silverman en feignant d’être étonné. Je ne me souviens pas avoir un quelconque échange avec vous au sujet de ces bunkers.
Sale menteur de Youpin ! Rugit intérieurement Dearing.
Silverman ne payait peut-être pas de mine au premier abord mais Dearing avait eu tôt fait de se rendre compte qu’il était sournois et là, il mentait ouvertement à tous. Mais c’était sa parole contre celle de Dearing…
— Vous avez également fait construire la volière des Quetzalcoatlus à proximité du Mont Sibo. Ajouta la vice-présidente. Certes, la décision a été approuvée par le Conseil mais il n’empêche que les dommages dû à l’éruption ont permis aux ptérosaures de la fuir.
Dearing ignorait encore à ce moment-là comment les ptérosaures s’étaient échappés et elle aurait accepté d’être blâmée si le surintendant du parc n’était pas intervenu pour en révéler la raison.
— Balivernes ! S’écria ce dernier, un moustachu enveloppé d’une quarantaine d’années. C’est l’Indominus qui les a fait évader, j’ai vu les images ! La volière a tenu face au séisme et à l’éruption.
— Est-ce la vérité, Monsieur Figueres ? Fit Lynton. Voyons plutôt ces images filmées par drone…
L’écran afficha les dites images, montrant la volière et son cirque au milieu des ténèbres. En arrière-plan, on voyait les flots de lave ruisseler le long des pentes du Sibo et des bombes volcaniques s’écraser au sol en explosant. La caméra du drone effectua un zoom pour montrer une grosse brèche béante au milieu du maillage de la volière dont la végétation était en proie aux flammes. Si l’on considérait seulement ces images, on pouvait être aisément amené à croire qu’une bombe volcanique était à l’origine de la brèche.
— La nouvelle de l’évasion de l’Indominus n’est pas encore parvenue aux oreilles des médias et on ne veut surtout pas que ça arrive. Déclara Iger. Imaginez un instant la panique qui s’emparerait des visiteurs restants encore à Isla Nublar s’ils apprenaient qu’un tel monstre arpente librement l’île. Le bâtiment dans lequel vous vous trouvez serait aussitôt pris d’assaut.
— Etant liés à la compagnie par une clause de confidentialité, tout employé ou ex-employé qui dira à la presse ce qui s’est passé réellement se verra poursuivit en justice. Les mit-en garde Lynton. De leur côté, les gardes sont eux aussi tenus au secret quant à leurs missions sauf permission ou contre-indication de leur commandement. Mais Victor s’est entretenu avec le commandant Störmer et ce dernier comprend notre position donc il n’y aucun risque de ce côté-là.
— Pour en revenir à vous, madame Dearing. Dit Silverman. Votre principale faute aujourd’hui consiste à avoir abandonné la supervision de la crise pour aller courir les bois avec Monsieur Grady, votre wapiti viril. Gloussa-il en mentionnant ce sobriquet avant de lui adresser un sourire moqueur de dents jaunâtres.
Dearing rougit de honte.
Comment il a su ?
— Oui, nous savons à propos de vos cachotteries et nous avons des bandes audios pour le prouver. Si ça tenait qu’à moi, je serais en train de les passer en ce moment même.
Elle se rappela alors d’un mail où Hoskins annonçait qu’il allait mettre en place des mesures de contre-espionnage dans toutes les installations-clés d’InGen. Elle n’avait pas imagé qu’il allait faire truffer de mouchards des lieux auxquels on ne s’attendait pas à ce qu’ils le soient.
— En soit, on se fout de à qui vous ouvrez les cuisses mais ce qui nous dérange c’est que ça c’est passé plusieurs fois dans des locaux de travail ou d’usage commun, ce que la clause de bonne conduite que vous avez signé tous les deux réprouve. Continua Silverman. Des sanctions disciplinaires s’appliqueront également pour Monsieur Grady en temps et en heure.
— Recentrons-nous sur le sujet. Proposa Lynton, jugeant que Silverman s’attardait trop sur la liaison entre Dearing et Grady alors qu’il y avait matière plus urgente à discuter. On se doute bien que vous êtes allée dans la jungle pour des raisons autres que celle évoquées par Dominick. Victor nous a mentionné le fait que vos neveux avaient été attaqués et s’étaient perdus dans la réserve. Je comprends le désir de sauver ses proches mais c’était le travail des gardes et de la J-SEC, pas le vôtre. Ce n’était pas à Vic de vous remplacer au pied levé ! Sauf en cas de nécessité, votre devoir vous incombait de rester à la salle de contrôle.
Et le Conseil continua d’incriminer Dearing pendant un quart d’heure entier au cours duquel Iger déclara même « Ne comptez-pas sur nous pour vous payer un avocat, on ne s’appelle pas Biosyn ! ». Rares furent ceux qui tentèrent de la défendre, plaidant qu’elle ne pouvait prévoir la manière dont la situation pouvait dégénérer et que à plusieurs reprises, tout le monde avait été pris de court par la tournure des événements mais ils rejetèrent ou ignorèrent leurs arguments. Au bout de ce qui fut l’équivalent d’un procès voir d’une exécution pure et simple au ressentit de Dearing, ils finirent par conclure et congédièrent Dearing d’un « Au revoir » froid mais cinglant.
L’écran s’éteignit et on resta un instant silencieux en regardant Dearing. N’adressant en retour à personne le moindre regard, elle prit la direction de la porte. Par-dessus son épaule, l’ex-directrice lança un « Adieu » à peine audible à ses anciens collègues puis, le regard rivé au sol et les épaules voûtées, quitta la salle de réunion, épuisée physiquement et émotionnellement.
Lorsqu’elle rejoignit Grady et Gray, évitant du regard au passage les employés, elle déclara :
— Tout ce dont j’ai envie maintenant, c’est un bon repas, une douche et un lit.
Peu après, elle ajouta :
— Quelle journée ! Quelle journée de merde !
Ils comprirent qu’elle allait être licenciée mais alors qu’ils s’apprêtaient à partir, Cruthers pointa Hoskins à Zach au moment où il sortit à son tour :
— C’est lui. Vas lui dire. Il doit le savoir.
Zach avait en effet révélé à Cruthers et Krill le fait qu’avec Gray, ils avaient été témoins de l’assassinat de trois gardes par une bande de mercenaires mystérieux. Une fois qu’il le leur eut tout raconté, le technicien lui avait alors suggéré d’en informer Hoskins.
Le jeune homme s’avança alors en direction du directeur de la division sécurité et le héla :
— Euh excusez-moi Monsieur Hoskins ?
Hoskins se retourna, surpris par le fait qu’un adolescent l’avait hélé au sein de l’Administration du parc juste après une réunion importante.
— Oui jeune homme. Que fais-tu ici ? Lui demanda-il.
— Claire est ma tante. Comme vous le savez elle est partie à notre recherche suite à l’attaque de notre camion. Alors que mon frère et moi traversions la jungle, nous avons été témoins du meurtre de trois gardes gris.
A l’annonce de cette nouvelle, tous ceux qui l’entendirent se tournèrent vers lui et répétèrent d’un air abasourdi le mot meurtre. On s’échangea des regards choqués et Hoskins considéra Zach d’un air grave.
— Un meurtre ? Racontes-moi précisément ce qui s’est passé s’il te plaît. Lui demanda-il, le prenant à part.
Tandis que Zach lui narrait ce passage de leur périple, Harriman arriva auprès de ses collègues techniciens :
— Les gars ? J’ai eu les gardes côtes au téléphone… C’est quoi tout ce raffut ? Fit-il en voyant l’effervescence suscitée par la nouvelle.
Cruthers lui répéta alors ce que Zach lui avait raconté et dès qu’il en eut l’occasion, Harriman transmit l’information à Brunet.
— Bon sang… Il ne manquait plus à ce que quelqu’un profite du chaos actuel pour accomplir ses méfaits. Dit Hoskins, troublé. Je te remercie de m’en avoir informé. Courage ! Cette île ne sera bientôt plus qu’un mauvais souvenir.
Zach tourna les talons et partit rejoindre sa tante. Lorsqu’ils disparurent à l’angle du couloir, les employés se dispersèrent pour retourner à leurs postes. Alors qu’ils faisaient cela, Hoskins sortit son téléphone et composa le numéro de Lynton :
— Susan ? Il faut qu’on parle. En privé.
Il revint dans la salle de réunion déserte et s’y enferma.
A SUIVRE...
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
Hors ligne
Bonjour à tous,
Contrairement à ce que j'avais prévu, j'ai finalement pu achever la deuxième partie du chapitre Le Conseil aujourd'hui même et je suis donc en mesure de vous la publier dans le post ci-présent.
Bonne lecture et bonne fin de journée.
Chapitre XIII : Le Conseil (partie 2/3)
Lorsque Grady, Dearing et ses neveux quittèrent l’Administration, des vents contraires avait chassés le panache du Sibo davantage vers l’est et ainsi, les derniers rayons du Soleil couchant parvenaient à illuminer les ruines fumantes des bâtiments de la Promenade et de l’Avenue Richard Owen. Dans les allées et les rues, on cherchait encore des blessés au milieu des corps des victimes, corps qui étaient ramassés et chargés dans des camions et des pickups tandis que d’un autre côté, ceux des animaux tués étaient rassemblés en un tas aux limites de la Cité.
La moitié nord de Burroughs, à l’exception du Grand Nublarian dont les vastes halls encore intacts consistaient un refuge pour un grand nombre de visiteurs, avait été évacué de tous les touristes et employés non-essentiels, désormais regroupés dans la moitié sud, principalement dans et aux abords du Palais de la Vallée Perdue.
La Cité étant désormais devenu un lieu synonyme de mort, Dearing n’avait guère envie d’y retourner et Grady s’en rendit compte aisément. Puisqu’elle devait retourner à son bungalow pour aller chercher son véhicule et ses sandales, il lui proposa de rester pour dîner, ce qu’elle accepta.
Lorsqu’ils atteignirent le bungalow d’Owen, le Soleil était passé derrière la Cordillère Occidentale et là où la Sibo n’avait pas propagé son ombre, les étoiles étaient brillantes dans le Ciel. Ils n’étaient pas seuls dans le village car celui était illuminé par les lumières d’autres bungalows et ils virent une Jeep avancer au milieu de l’obscurité, empruntant une rue voisine.
Venant de l’autre rive du Long Lac, on entendait les chants et les mugissements des animaux de la réserve et Grady tendit l’oreille un instant pour les écouter avant d’ouvrir la porte de son bungalow.
Durant le séisme, quelques livres étaient tombés des étagères et des cadres s’étaient décrochés du mur. Craignant des dommages plus graves, le maître des lieux commença par faire un tour rapide de son domicile pour vérifier s’il n’y avait pas de fuites ou tout autre élément pouvant présenter un risque. Il alla ensuite dans la cuisine et inspecta les plaques de cuisson et le réfrigérateur pour s’assurer de leur bon fonctionnement.
Lorsque ce fut fait, il revint vers ses invités :
— Si tu veux rester seule un moment, ma chambre est disponible. Je vais demander aux garçons de m’aider à préparer le dîner. Proposa-il à Dearing.
— Merci Owen.
Elle partit en direction de sa chambre et il se tourna vers Zach et Gray.
— Vous encaissez ? Leur demanda-il.
— Je crois… Répondit Zach d'un air incertain.
Gray répondit par un petit hochement de la tête.
— Ok. Pendant que votre tante se repose, allons préparer le dîner. Je ne sais pas ce que vous avez mangés à midi dans la jungle mais vous devez être affamés… Si on s’y met tous les trois, ce sera prêt dans une demi-heure. N’hésitez pas à prendre un fruit pour calmer votre faim. Leur dit Grady en indiquant la corbeille de fruits sur l’un des plans de travail de la cuisine.
Tandis que Grady coupait des filets de poulet en morceaux et que Zach faisait revenir de l’oignon et du céleri dans un wok, Gray était chargé de préparer le table.
— Après avoir posé la vaisselle sur la table, tu pourras aller te reposer un peu Gray. Lui dit Grady. Deux suffisent pour ce qu’il reste à faire.
Une fois qu’il eut mis la table, Gray erra un peu dans le bungalow mais se sentant oisif et un peu gêné par le fait que certains des livres jonchaient le sol au pied des étagères, il se dit qu’il pourrait rendre service à leur hôte en les rangeant.
Alors qu’il faisait cela, il parcourut les titres.
En plus d’ouvrages célèbres sur les dinosaures ou la paléontologie tels que Le Ptérodactyle Rose de Robert T. Bakker, Le Monde Perdu des Dinosaures d’Alan Grant ou Le Guide Princeton des Dinosaures de Gregory S. Paul, il y avait des livres sur entre-autres la zoologie en général, l’éthologie, la gastronomie costaricaine, l’histoire et la culture Tun-Si, ainsi que deux livres liés aux découvertes scientifiques d’InGen mais exprimant chacun un point de vue radicalement opposé : La prochaine étape : Une évolution des concepts de Dieu d’Henry Wu, vantant le potentiel de la technologie génétique d’InGen et explorant les possibilités de la création de nouvelles espèces, et Dieu crée les dinosaures de Ian Malcolm, œuvre très critique du célèbre mathématicien texan sur les répercussions des travaux d’InGen.
Une fois les livres tombés rangés, son regard se porta vers un ensemble de cadres accroché au-dessus du bureau, juste à côté du poster du film King Lear.
Des photos avaient été mises dans les dits cadres, celles des achillobators pendant leur jeunesse alors qu’elles n’étaient pas plus grandes qu’un poulet ou un chat.
Sur celle au centre, on voyait Grady de dos, marchant dans une allée de service tout en étant suivie par les quatre dinosaures, marchant en file indienne avec Blue en tête ; celle en haut à gauche montrait Echo en train d’inspecter un xylophone ; et celle en haut à droite Blue couchée sur les jambes de Grady, sa tête reposant sur les genoux du soigneur et semblant regarder la télévision.
Ces scènes avaient de quoi attendrir et Gray sourit en regardant ces photos mais son regard descendit rapidement en direction d’un document assez volumineux rangé dans le porte-dossier en dessous.
Curieux, il voulut savoir quel était son contenu mais avant de le saisir et de le lire, il prit soin de vérifier que son frère et le maître de maison étaient absorbés par leurs tâches respectives.
Saisissant le document par la tranche, il le sortit du porte-dossier et le retourna pour lire la couverture :
GRADY Owen
LORENZ Nikolaas
SEMBÈNE Barry
Integrated Behaviour Raptor Intelligence Study
Journal de bord.
Version du 31/09/2017
Il ouvrit le document et en le feuilletant, son regard fut attiré tout de suite par l’une des annexes à la fin, consistant en une présentation sous forme de fiches individuelles, comportant chacune une ou plusieurs photographies, des animaux impliqués dans le programme. Gray se rendit compte qu’en plus des quatre achillobators dont ils venaient de voir les photos, il y avait six autres meutes, de quatre individus chacune elles-aussi, et d’une espèce différente, les neoraptors, auparavant considérés à tort comme étant des vélociraptors.
Les huit premières fiches étaient celles d’animaux appartenant à la sous-espèce Neoraptor athertonii tigris. Chez cette dernière, les mâles avaient un corps orange rayé de noir et un bas-ventre blanc pâle tandis que les femelles étaient brunes avec des marbrures et de légères rayures grises ainsi qu’un bas-ventre brun pâle. Il lut les noms attribués aux individus. Pour les mâles on avait Priam, Hector, Pâris et Enée tandis que les femelles s’appelaient Hécube, Andromaque, Briséis et Cassandre. Tous des noms de personnages de l’Iliade.
Gray passa ensuite à la deuxième sous-espèce, Neoraptor athertonii iroquoii, nommé ainsi en référence à la crête de plumes grises sombres qu’arboraient les mâles au sommet du crâne. Gray trouva ces derniers visuellement attrayants. Ils avaient un corps bleu-gris avec un bas-ventre brun crème, un dos rouge brunâtre et comportaient de chaque côté, une légère rayure bleue latérale courant du haut du crâne jusqu’au bout de la queue tandis que deux petites crêtes jumelles rouges ornaient le haut du museau. De leur côté, les femelles avaient un corps blanc crème marbré de noir. De part la posture droite et élégante qu’ils avaient sur les photos et leur pupille ronde, les iroquoii évoquaient davantage les oiseaux que les tigris. Là aussi les noms choisis étaient issus de la mythologie grecque et on avait Agamemnon, Ajax, Ulysse et Achille pour les mâles ; Clytemnestre, Hermione, Iphigénie et Electre pour les femelles.
Et enfin, vint les fiches consacrées à une sous-espèce hybride des deux précédentes, nommée Neoraptor athertonii iroquoii x tigris. Les mâles, d’un gris sombre avec un bas-ventre gris clair, avaient hérités de la crête de plumes et des yeux rouges des iroquoii ainsi que des rayures des tigris mais comparé aux premiers, les crêtes sur le museau et les rayures latérales étaient moins marquées. Les femelles, elles aussi gris sombres mais marbrées de noir, avaient les yeux jaunes. Les noms donnés aux mâles étaient Héraclès, Persée, Thésée et Bellérophon et ceux aux femelles étaient Atalante, Hippolyte, Médée et Andromède.
— Zach ? Tu pourrais aller voir comment Claire va ? Demanda Grady à ce moment-là. Ne la dérange pas si elle semble dormir. Passe par la terrasse si nécessaire. Je veux juste savoir ce qu’elle fait. Ajouta-il à voix basse.
Alors qu’il était arrêté sur la fiche d’Andromède, une information attira l’œil de Gray : Il était indiqué qu’Andromède avait été abattue au milieu de l’année 2013 suite à un incident.
Un bruit de pas se rapprochant parvint aux oreilles de Gray.
— Gray ? Fit la voix de Grady sur un ton neutre. Pourrais-tu venir remplacer ton frère à la cuisine s’il te plaît ?
Il referma le journal, le déposa sur le bureau et se retourna pour s’apercevoir que Grady se tenait à quelques pas de lui et le regardait avec une expression mi sévère mi mélancolique. Il avait clairement vu que Gray lisait la fiche d’Andromède et le garçon se rendit compte que cela mettait mal à l’aise le soigneur qu’il ait découvert que l’une des neoraptors de son programme d’études était morte.
— Oui, Monsieur Grady. Répondit Gray nerveusement.
Alors qu’ils revenaient vers la cuisine où du riz commençait à cuire dans le wok, Grady lui dit :
— Tu peux m’appeler Owen…
Vingt minutes plus tard, le dîner était prêt et Grady alla en informer Dearing. Elle arriva peu après et les quatre s’installèrent à table, les garçons en vis-à-vis, Grady dos à la cuisine et Dearing en face de lui. Ses yeux se portèrent sur la nourriture disposée sur la table et tenaillée par la faim, son regard perdu s’illumina un peu.
Le maître des lieux et les garçons avaient préparé des morceaux de poulet aux épices ainsi qu’un plat de Arroz Navideño ou riz de Noël, agrémenté de persil, de pruneaux, d’amandes pilées, de céléri et dont les effluves de curry se diffusaient dans toute la pièce. Pour le dessert, ils avaient mis sur le comptoir quelques fruits.
— Ce n’est pas une bonne vieille dinde, je sais. Je comptais aller au banquet prévu ce soir donc j’ai fait avec ce que j’avais. Déclara Grady en parlant du plat principal.
Il se tut un instant, réfléchissant à ce qu’il allait dire ensuite.
— Je conviens que l’adjectif n’est pas vraiment approprié mais Joyeux Noël. Ajouta le soigneur après avoir poussé un soupir. Bon appétit.
— Bon appétit. Lui répondirent-ils faiblement.
Ils se servirent et dînèrent avec un appétit non-dissimulé.
Cependant, personne n’eut le cœur à parler et le repas se déroula dans un silence des plus complets, uniquement perturbé par les bruits lointains de l’éruption et les cris ponctuels de quelque dinosaure, poussés au milieu des ténèbres de la nuit.
Après la réunion avec le Conseil d’Administration, Wu était immédiatement retourné aux laboratoires pour y appliquer les directives de l’opération Royaume Déchu.
Tandis que les techniciens de laboratoire remettaient en ordre les allées suite aux dommages engendrés par le séisme et sécurisaient les produits dangereux, les généticiens s’attelaient à préparer les équipements les plus gros au transport et à en démonter d’autres. D’autres encore retiraient délicatement les œufs des couveuses et les embryons de leurs unités de stockage pour les mettre respectivement dans des caisses rembourrées et des réceptacles compartimentés réfrigérés. A la sortie du laboratoire, un assistant s’occupait de tenir un registre des actifs évacués.
Lorsqu’il fut voulu se rendre à son bureau, Wu remarqua quelque chose d’inhabituel : La porte était entrouverte alors qu’il n’y avait pas été de la journée.
— Excusez-moi. Est-ce que quelqu’un est allé dans mon bureau aujourd’hui ? Demanda-il à voix haute au personnel des laboratoires.
— Personne, Henry. Lui répondit une généticienne. Vous étiez le seul à avoir les clés. La porte était comme ça lorsque nous sommes arrivés.
— Pourtant elle était bien fermée lorsque nous avons dû évacuer… Précisa l’un des techniciens de laboratoire.
— Vous êtes sûr de ce que vous dîtes ? S’inquiéta Wu.
— Absolument certain, professeur. Affirma le technicien.
Cette information troubla en plus haut point Wu. Il sortit son téléphone de la poche de son jean.
— Faut que j’appelles Bailey… Dit-il à ses subordonnés.
Il composa le numéro du chef de la J-SEC et attendit qu’il décroche :
— Auguste ? Pourriez-vous jeter un œil aux retransmissions des caméras de surveillance du laboratoire ? Je crois que l’on est entré par effraction dans mon bureau.
— Ok, professeur. Je regarde ça…
— Professeur ! Héla l’un des techniciens. Je crois que vous aimeriez venir voir ça…
Wu alla alors auprès de celui qui l’avait hélé. Il avait le regard fixé sur la caméra de surveillance qui donnait droit sur l’entrée du bureau de Wu. En regardant attentivement, Wu vit une tache orange sur l’objectif.
— C’est bizarre, professeur, mais presque au même moment que le début de l’attaque des cigognes de l’Enfer, quelque chose est venu se foutre sur l’objectif et y serait toujours. Dit Bailey.
— On vient juste de découvrir quoi. Lui apprit Wu. De la peinture.
— De la peinture ?! Fit Bailey, interloqué. Je vous envoie quelqu’un tirer ça au clair.
Cinq minutes plus tard, un agent se présenta sur les lieux et il alla avec Wu vérifier ensuite dans son bureau que rien n’avait été volé. Tandis que l’agent, un jeune homme rondouillard au visage juvénile, inspectait les autres caméras du laboratoire ainsi que celles du couloir surplombant ce dernier et faisant partie du parcours de la visite du Centre, Wu prit soin de vérifier qu’aucun fichier sur l’ordinateur n’avait été supprimé. Lorsqu’il s’en fut assuré, il se détendit mais l’agent revint alors pour l’informer que la caméra du couloir de visite ainsi qu’une autre du laboratoire avaient aussi leurs objectifs recouvert de peinture.
Ne pouvant alors poursuivre son investigation pour le moment par manque d’éléments, l’agent partit et Wu rumina pendant tout le reste de la soirée au sujet de l’entrée par effraction dans son bureau et la dégradation des caméras.
Aux alentours de dix-huit heures, on lui annonça l’arrivée du camion sensé transporter les actifs jusqu’aux Docks de l’Est.
— Le Anne B sera aux docks dans une heure. On peut commencer à embarquer le matériel dans le camion. Faîtes très attention avec les œufs et les embryons ! Il faudra aussi que l’on supprime tout ce qu’il y a sur les serveurs avant de partir. Commanda Wu.
Les laborantins acquiescèrent mais alors qu’il allait les aider à charger le camion, son téléphone sonna.
— Je reviens… Leur dit Wu.
S’éloignant du remue-ménage ayant envahi une grande partie du laboratoire, Wu partit s’isoler dans son bureau pour prendre l’appel qu’il décrocha en chemin :
— Henry Wu à l’appareil, je vous écoute.
— Bonsoir, Professeur Wu. Dit la voix d’un homme d’âge mur.
— Bonsoir. Répondit le généticien sur un ton neutre. A qui ais-je l’honneur ?
— Nous nous sommes déjà rencontrés il y a bien longtemps, dit l’homme, lorsque nous étions tous deux étudiants en génétique à Stanford sous la direction de feu Norman Atherton.
— Nous étions bien plus que deux à l’époque. Lui rappela Wu. Si nous nous connaissions alors je crois que je ne me rappelle plus de vous, désolé.
— Ce n’est pas grave, mon identité importe peu mais si nous étions face à face, vous me reconnaîtriez tout de suite. J’ai pendant longtemps éprouvé un grand intérêt pour vos travaux et les activités d’InGen. Il est vraiment regrettable que la compagnie soit à nouveau menacée…
— Allez droit au but Monsieur, mon temps est précieux. Fit Wu avec une certaine impatience.
— Si je vous ai appelé, c’est pour vous faire une offre que vous ne pourrez pas refuser.
— En quoi consiste-elle ? Lui demanda Wu uniquement par politesse. Je vous le dis tout de suite, je ne cours pas après l’argent.
— Je vous propose tout simplement de rejoindre l’entreprise pour laquelle je travaille. Comme vous venez de me le rappeler et comme je le savais déjà, vous vous moquez de l’argent. Ainsi je ne vais pas me servir de cet argument pour vous convaincre de nous rejoindre.
— Je vous écoutes…
— Regardons la situation en face : Jurassic World est finit et avec l’une des plus grosses sources d’argent d’InGen. Exposa son interlocuteur. L’héritage de John Hammond n’est plus que flammes, cendres, ruines, sang et vautours se disputant ses restes. A cause du grand nombre de morts et de blessés que vous avez sur les bras, les yeux du Monde se sont tournés vers vous. Avez-vous vu allumé la télévision ou parcourut les réseaux sociaux ? On ne parle que de ça ! La catastrophe actuelle est en train d’être vécue comme un traumatisme semblable à celui suscité par ces attentats islamistes survenus à Paris il y a deux ans. L’incident de San Diego fait figure de vulgaire histoire de fauve échappé à côté…
Wu n’avait pas eu l’occasion d’allumer la télévision et mettre une chaîne d’informations ou d’aller sur internet et consulter des sites de News. Il savait qu’Hoskins s’entretenait au même moment avec des journalistes ayant sauté dans le premier hélicoptère venu pour couvrir la crise mais le généticien n’avait pas la moindre idée des réactions suscitées par la catastrophe à l’échelle du monde entier. Cela contrastait fortement à l’incident de 1993 qui fut considéré comme un canular dans les premiers temps.
—… A l’issue de cette crise sans précédent et une fois qu’elle aura fini de payer tous les dédommagements à venir, le géant aux pieds d’argile qu’est InGen sera très affaiblit, même si elle est soutenue par Masrani Global. Poursuivit l’homme. Le Conseil d’Administration est bien naïf de croire que les fruits de l’opération Royaume Déchu permettraient de sauver InGen de la ruine totale, ils ne feront que retarder l’inéluctable au mieux. Quel intérêt y-a-il, cher confrère, à vouloir remplir d’eau un tonneau troué alors que vos efforts pourraient être utilisés ailleurs à meilleur escient. Ce serait gâcher votre talent de rester chez InGen. Chez nous, vous pourriez avoir carte blanche quant à vos créations et zéro cahier des charges pondu par je ne sais quel bureaucrate coincé du cul qui ne comprennent rien au talent des artistes du vivant que nous sommes.
Ce qu’avançait son interlocuteur étant loin d’être sans fondements, l’attention de Wu pour ce qu’il avait à dire ne fit que croître et lorsqu’il avança l’argument de la carte blanche et de l’absence de cahier des charges, Wu fut presque séduit par sa proposition.
— J’ai ouïe dire de choses sur l’Indominus rex, votre dernière création, bien des choses. Une véritable révolution dans le domaine du génie génétique. Une nouvelle espèce de dinosaure à part entière. Grande, puissante, d’une sauvagerie effroyable et d’une intelligence presque inégalée dans le Règne Animal, capable de déjouer les plans visant à l’arrêter en usant de capacités extraordinaires comme du camouflage. Vous avez pris de grandes risques et fait preuve d’audace lors de sa conception, Henry, j’aime ça. Je ne peux être qu’admiratif.
La séduction avait laissé place à la consternation lorsque l’homme avait mentionné le camouflage. Le fait qu’il fut en possession d’informations de cette nature au sujet de l’I.rex était effrayant.
— Comment diable savez-vous à propos du camouflage de l’Indominus ? S’écria Wu.
Il regarda en dehors de son bureau pour s’assurer à ce qu’aucune oreille indiscrète ne l’écoute.
— Avant aujourd’hui, nous n’étions qu’une poignée chez InGen à savoir qu’elle était dotée de cette capacité. Ajouta-il à voix basse.
— Comme je vous l’ai dis, je suis avec attention vos recherches. L’information, c’est le pouvoir et pour en avoir, j’ai déployé tous les moyens nécessaires. Victor Hoskins n’est pas le seul à envoyer des espions chez la concurrence voyez-vous… Ainsi je connais même certains des petits secrets d’InGen les mieux gardés, y compris un pour lequel vous avez pris toutes les précautions que vous jugiez nécessaires. Vous pouvez duper Claire Dearing, Simon Masrani, Victor Hoskins, le Conseil d’Administration d’InGen, les médias ou les masses… Mais nul ne peut me duper moi. Déclara son interlocuteur non sans arrogance.
Il marqua une pause.
— Connaissez-vous l’histoire de Prométhée, professeur ? Demanda-il soudain.
— Bien sûr que oui. Fit Wu assez sèchement.
— Dans ce cas je vous passe les détails. J’aimerais juste vous demander pourquoi il se retrouve enchaîné à un rocher et que chaque jour, un aigle vient pour lui dévorer le foie ? Je ne m’en rappelle plus trop vous voyez…
L’interlocuteur de Wu connaissait la réponse. Il voulait juste entendre Wu la dire, comme s’il voulait qu’il se rende de quelque chose.
— Parce qu’il avait volé le feu aux Dieux pour le donner aux Hommes. Répondit Wu.
— Ah, là je m’en rappelle ! En effet oui, les Dieux sont prompts à punir tous ceux qui tentent d’élever leurs créations… Je vous laisse réfléchir à ma proposition le temps nécessaire. Le moment venu, vous prendrez la bonne décision. Vous finirez par nous rejoindre, j’en suis certain. Si besoin, rappelez-moi à ce numéro. Joyeux Noël, professeur.
L’homme finit son appel et Wu se cala dans son fauteuil, profondément troublé par cette conservation. Son esprit ressassait une phrase en particulier « Les Dieux sont prompts à punir tous ceux qui tentent d’élever leurs créations…». Le choix de mentionner la faute et le sort de Prométhée n’avait rien d’anodin dans le cadre de leur conversation et sachant désormais de quel genre d’informations l’homme semblait être en possession, Wu réalisa que c’était en fait une menace. S’il ne considérait pas sérieusement la proposition ou s’il se mettait en travers de la route de son mystérieux confrère au lieu de travailler avec lui, alors il y avait un fort risque à ce que l’entièreté carte génomique de l’Indominus ne soit envoyée aux médias ou à une institution chargée de veiller au respect de la bioéthique.
Il était allé loin avec l’Indominus, beaucoup trop loin et il le savait. Il commençait à le regretter même. Etant son créateur, il se croyait naturellement jusqu’alors être le seul détenteur de certaines informations sensibles à son sujet.
Si jamais la vérité éclatait, alors c’en était finit de sa carrière et il était bon pour comparaître devant la justice.
Ce fut en tremblotant de la main qu’il reposa son portable, hanté qu’il était par cette idée.
Tentant de se détendre tant bien que mal en faisant les cent pas, il vit ,au travers de la fenêtre qui lui permettait d’observer le laboratoire depuis son bureau, Hoskins descendre l’escalier en métal qui y menait. Le directeur de la division sécurité était au téléphone et lorsque Wu ouvrit la porte de son bureau, il se rendit compte que la personne avec qui la personne à l’autre bout du fil était sa fille.
— Essaie de passer quand même un joyeux Noël, ma puce. Lui souhaita son père. Passe le bonjour à Haytham de ma part. Je te rappellerais demain dès que je pourrais. Bye.
Hoskins rangea son téléphone et se dirigea alors vers le bureau d’Henry Wu. Voyant le professeur assis derrière son bureau l’air pensif, il toqua.
— Je vous dérange, Professeur ?
— Non. Entrez Vic, je vous en prie.
Il entra et vint s’adosser contre l’encadrement de la porte. Il semblait soucieux. Il poussa un lourd soupir.
— Ce sont des temps incertains qui s’annoncent avec leur lot de sacrifices et de concessions. Déclara Hoskins. InGen mettra des années à se relever de cette crise. Jeff Rossiter et Amelia Grendel doivent être en train de jubiler devant leurs télévisions tels des méchants de dessins-animés en voyant notre cote en bourse se casser la gueule. Les employés ont peur, Henry, peur pour leur emploi, leur avenir. Certains des soigneurs refusent carrément d’évacuer pour rester avec les animaux jusqu’au bout et ce malgré la menace du volcan et des créatures échappées. Vous savez ce que je leur ais dits ? La valise ou le cercueil. La valise ou le cercueil…
Hoskins s’avança jusqu’à la fenêtre donnant sur le laboratoire.
— Je crains que votre division soit également touchée par la vague de licenciements à venir. Parmi nos généticiens, combien vont passer chez la concurrence ? Se demanda-il, sa voix laissant sous-entendre clairement qu’il en craignait les conséquences.
Il se tourna vers Wu.
— Dîtes-moi, vous n’êtes pas de ceux-là rassurez-moi ?
Le généticien était toujours hanté par la conversation téléphonique qu’il venait d’avoir. En omettant la menace sous-jacente dans certains des propos tenus par son interlocuteur, il savait que ce dernier avait peut-être raison lorsqu’il disait qu’InGen était condamnée.
Pendant un instant, il voulut dire à Hoskins qu’un individu travaillant pour la concurrence venait de le contacter et lui raconter l’échange qu’il avait eu mais ignorant jusqu’où le bras de son contact s’étendait et qui était à sa solde parmi InGen, il préféra s’abstenir pour l’instant.
— J’ai travaillé toute ma vie pour InGen. J’aurais l’impression de trahir la mémoire de John Hammond en quittant la compagnie de mon plein gré. Dit-il.
— Le bon vieux John Hammond… Il doit nous regarder depuis là-haut, secouant la tête en se demandant ce qu’on a fait pour en arriver là. Quand je regarde ce que les événements ont faits à Masrani… Je crains que si il avait été à sa place, Hammond serait mort sur place d’un cœur brisé.
A imaginer la réaction de John Hammond face à la catastrophe et l’état mental actuel de Masrani, Wu sentit sa poitrine et sa gorge se serrer.
— Comment va Simon ? Demanda-il.
— Pas très bien pour être franc. Répondit Hoskins. Il s’est plongé dans un état de mutisme et refuse de boire ou de s’alimenter. Il était si flamboyant avant et le voilà devenu une coquille vide… J’essayerais de passer le voir pendant la soirée. Malgré la dispute que vous avez eue, vous devriez peut-être en faire de même si vous avez le temps. Il reste votre ami.
Quel ami je fais ?
Cette question traversa l’esprit du généticien à ce moment-là. Son propre orgueil lui avait coûté l’amitié et le respect de Simon Masrani.
En regardant au travers de la porte ouverte, il vit des hommes vêtus de treillis s’avancer dans le laboratoire. Il remarqua qu’ils étaient armés de fusils d’assaut et d’armes de poing semi-automatiques.
— Que font ces hommes ici ?
Juste avant qu’Hoskins ne rende visite à Wu, le directeur de la division sécurité s’était rendu au lieu de rendez-vous avec la deuxième vague de renforts envoyés par la base de la division sécurité d’InGen au Costa Rica, la première étant les pourfendeurs et la troisième allant arriver avec l’Arcadia.
Deux Boeing CH-47 Chinook et un AgustaWestland EH101 Merlin avaient débarqués deux véhicules Caiman, un hummer, et près de cinquante mercenaires et tout l’équipement que l’on pouvait leur procurer. Là où les deux CH-47 Chinook étaient repartis pour le continent, l’ EH101 Merlin était resté sur l’île.
— C’est pour votre sécurité. Ça devrait dissuader ceux qui veulent porter atteinte à votre personne. Si vous voulez sortir, faîtes-vous escorter car prenez-le comme vous le voulez mais vous êtes devenu un objet de convoitises.
Wu savait que l’intrusion chez lui du lieutenant Brunet et de l’adjudant Darbinian et l’agression qui s’en était suivie n’étaient en rien étrangères à cette décision.
— Vous êtes un atout clé d’InGen, Henry, ne l’oubliez pas et il est impératif à ce que l’on s’assure à ce que vous quittiez l’île avec vos travaux. Ces hommes vont également vous donner un coup de main dans le nettoyage des laboratoires. Une fois qu’il aura fini à la salle de contrôle, le commandant Torres descendra ici pour superviser le tout. D’ici minuit au plus tard, il faut que vous soyez dans l’hélico et en route pour le continent. Compris ?
— Minuit ? Mais ça ne nous laisse plus qu’environ six heures. Craignez-vous que le nuage de cendres cloue nos appareils au sol à partir de cette heure-là ?
— Oui mais ce n’est pas la raison principale. Il faut que vous partiez le plus rapidement possible tant que la situation est stabilisée par ici. Quelque chose me dit que la nuit va être longue. Ne vous inquiétez-pas, s’il reste quelque chose de valeur ici, je veillerais à ce que personne ne s’en empare…
Les Dieux peuvent saigner.
L’Indominus s’en était rendu compte pendant sa jeunesse, le jour où elle avait presque arraché le bras de l’un des soigneurs. L’aura mythique qu’elle donnait alors aux membres de la race qui l’avait créé avait définitivement disparu ce jour-là et ce même si les souvenirs de sa naissance dans une salle spéciale des laboratoires Norman Atherton étaient encore vivaces et suscitaient des cauchemars pendant son sommeil. Pendant toute sa vie en captivité, elle s’était interrogé sur le fait de pourquoi les Hommes étaient libres et non elle ? Elle avait trouvé la réponse en ce jour. Elle était plus forte qu’eux et ils le savaient. Ils avaient peur d’elle et ô combien.
Tous ceux qu’elle avait croisés pendant sa cavale s’étaient retrouvés démunis face à elle. En les saisissants entre ses mâchoires ou ses doigts, elle s’était rendu compte de leur fragilité et rapidement, elle avait pris goût aux massacres car ils lui permettaient de se défouler et d’évacuer toute la frustration accumulée au cours de son existence.
Sentir la chair se déchirer entre ses dents, le sang humidifier sa gueule, ses griffes déchirer la peau et les organes, ses mâchoires broyer les os… Tout cela avait l’effet d’une drogue, tout comme l’odeur enivrante qui l’avait saisi et conduit droit sur les gardes. Effrayer ces derniers via son habileté à se fondre dans son environnement, capacité qu’elle avait découverte pendant sa jeunesse lorsqu’elle avait voulu surprendre un rongeur, avait presque relevé du jeu pour elle.
Quant aux dinosaures, elle n’avait éprouvé qu’un intérêt secondaire pour eux. Ils étaient soient trop rapides et agiles, soit trop gros et dangereux, soit trop solidaires entre individus.
Ainsi, l’Indominus les évita la plupart du temps et la seule confrontation à laquelle elle ne put échapper fut celle avec ce jeune apatosaure mâle un peu trop sûr de lui à la sortie du bois alors que le soleil était à son zénith. L’herbivore l’avait chargée à vue et ce fut de justesse qu’elle avait évité les piquants ornant son cou, piquants qui avait laissé une série de petites blessures sur la partie haute du flanc droit et le dos de la chimère. Au bout d’une brève lutte, elle était parvenue à vaincre et s’était contentée d’abandonner sa dépouille aux charognards.
La seule fois où elle s’était sentit en danger fut lorsque l’oiseau de métal l’avait pourchassée et acculée contre la volière tandis que la grande montagne rugissait.
Fuyant sa colère, l’Indominus était revenue dans la réserve et lorsqu’elle fut aux alentours des ruines maintenant ensevelies du Vieux Centre des Visiteurs, braqua vers l’est, passant près des restes d’ancienne arche de basalte recouverte de plantes grimpantes.
Du haut de la ligne de crêtes barrant l’extrémité ouest de l’Etreinte, l’Indominus vit une montagne aux arêtes déchiquetées et au sommet pointu se dresser à l’est, au delà de la vallée et de l’amas de collines recouvertes par la jungle à son extrémité. Elle pensa alors qu’elle pourrait trouver refuge à l’ombre de cette dernière et descendit dans l’Etreinte.
Lors de son périple, elle vit la verdoyante vallée se recouvrir progressivement d’une couche de cendres et se transformer peu à peu en un désert gris. La vallée ayant été abandonnée par ses habitants, l’Indominus était seule entre les deux arcs montagneux se dressant de part et d’autre de son trajet. Pour un être humain, le sentiment d’isolation qui y régnait était tel qu’il en aurait était oppressant.
La seule chose d’intérêt qui brisa la monotonie du parcours de l’Indominus fut de croiser la carcasse fumante du Pegasus. C’était une menace de moins mais lors de la confrontation au pied de la volière, l’oiseau de métal lui avait enfoncé son dard dans l’épaule. Le dard s’y trouvait toujours et à chaque mouvement un peu vif de la part de son bras, elle ressentait la douleur.
Plus la cendre tombait, plus l’air devenait sec et plus sa gorge s’asséchait. Il lui fallait trouver de l’eau. Il y avait bien un ruisseau coulant au milieu de la vallée mais en se penchant au-dessus, la chimère se rendit compte que les précipitations de cendre l’avaient déjà souillé. Pour trouver une eau plus propre, elle devait poursuivre sa route et chercher là où les cendres ne pouvaient tomber ou ne tombaient pas encore.
Parvenue aux portes de la vallée, elle fut en vue du glissement de terrain qui avait emporté une portion du Limes. La clôture était désormais en lambeaux et à moitié ensevelie sous la terre.
L’Indominus longea le glissement et une fois à son sommet, bifurqua sur le côté pour revenir vers la brèche.
A ce niveau, elle vit des empreintes de plusieurs herbivores différents fichées dans la cendre, principalement celles de parasaurolophus et de gallimimus, menant hors de la réserve, dans le secteur se trouvant au-delà.
Elle franchit la brèche et continua vers le sud-est.
Son ascension des pentes du sommet septentrional des Monts Brumeux commença rapidement au milieu de grands arbres. Peu après être sortie de leur ombre pour emprunter une crête rocheuse étroite conduisant vers le haut de la montagne, elle s’arrêta et se retourna brièvement pour regarder le coucher du Soleil au-delà de l’écran formé par le nuage de cendres.
Un peu plus loin sur la crête, elle eut un point de vue surplombant un complexe constitué par plusieurs enclos aux hautes clôtures et bâtiments austères en béton, occupant le fond d’une petite vallée à l’ombre de la montagne et enserré de toute part par une jungle dense : Les enclos de quarantaine. L’endroit lui était familier. C’était là qu’elle avait vécu les premiers mois de sa vie avant d’être transportée au cirque.
Un regard porté en direction du nord lui fit voir que sa deuxième demeure qu’était le Colisée n’était plus qu’une petite masse proéminente au sommet d’une colline et entouré par des incendies de forêt, semblable à un château assiégé.
Entre les enclos, l’Indominus vit les phares d’un véhicule en mouvement : des Hommes s’y trouvaient toujours, patrouillant alors que l’obscurité s’abattait.
Elle reprit son ascension mais au beau milieu de cette dernière, l’Indominus menaça de perdre l’équilibre et ne se reprit que de justesse. Son esprit s’embrouillait et une sensation de nausée l’envahit. Elle finit par vomir, laissant au milieu des rochers le cadavre à moitié digéré de l’un des passagers du camion. L’Indominus attendit que son état se stabilise et continua son chemin.
A la nuit tombée, elle parvint aux abords d’un bassin ovale dominé par une haute cascade et éclairé par la lumière de la lune.
Elle s’approcha de l’eau et voyant qu’elle était saine, s’y désaltéra, entrouvrant la gueule pour y faire entrer de l’eau en abondance avant d’arquer le cou en arrière pour la laisser descendre dans son œsophage.
Le contact de l’eau avec sa langue amputée créa une sensation fort désagréable, douloureuse même. Une autre blessure, imputée par l’humaine aux cheveux de feu.
Elle connaissait bien cette dernière et reconnaissait son odeur, semblable à celles des fleurs qui poussaient dans la jungle, et son visage entre tous de ceux de sa race.
A la sortie de la mère-cuve, elle fut le premier être sur lequel l’Indominus posa les yeux en venant au monde et elle se souvint que la vue de son visage recouvert par un masque de protection antibactérienne et de ses yeux verts regardant avec convoitise la frêle créature qu’elle était l’avait effrayée. Mais au fil de la croissance de l’Indominus, ce rapport s’était inversé et la chimère s’en était parfaitement rendue compte lors des représentations tests où elle n’osait même pas la regarder en face. Quelle ironie.
Mais tandis qu’elle buvait, ce fut alors qu’elle contempla son reflet pour la première fois.
Dans un premier temps, elle prit peur et lacéra de ses griffes la surface de l’eau pour chasser l’être qui la regardait depuis le fond du bassin mais en remarquant ce dernier copier son geste, la curiosité pris le pas et elle le regarda avec attention. Elle pencha la tête d’un côté puis de l’autre et vit qu’il copiait son geste à la perfection. Elle vit aussi que lui aussi avait un dard enfoncé dans l’épaule et se rendit compte qu’elle ne pouvait laisser le sien resté planté dans sa chair. Il fallait le retirer.
Elle referma les doigts de sa main droite autour du harpon et tira d’un coup sec mais la douleur fut telle qu’elle vacilla et tomba sur le flanc au milieu de la berge rocailleuse. Alors qu’elle haletait, l’épuisement menaça de la faire s’évanouir mais elle ne pouvait pas se permettre de tomber dans l’inconscience dans un lieu exposé tel que celui-ci. Qu’allait lui faire les Hommes s’ils la trouvaient ainsi, à leur merci ? Elle devait maintenant trouver un abri.
Au bout de quelques minutes, elle se releva doucement et s’avança dans le bassin jusqu’à ce que l’eau vienne mouiller son bas-ventre. Elle avait senti un léger courant d’air, venant de derrière la cascade. Une grotte devait se trouver-là. Un abri.
L’Indominus immergea ses bras, lavant le sang sur eux.
A SUIVRE...
"I'm a simple man. I like pretty, dark-haired women and breakfast food" Ron Swanson, Parks and Recreations
"I have come up with a plan so cunning you could stick a tail on it and call it a weasel." Black Adder the Third
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